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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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1er août, elle déclare la guerre à la Russie, somme la France d’annoncer ses intentions et, comme le gouvernement français se contente de répondre que la France fera ce que ses intérêts commanderont, le gouvernement allemand invente que nous l’avons nous-mêmes attaqué. Le gouvernement de la République ne pouvait plus échapper au destin et il y eut quelque chose de tragique dans ses efforts de la dernière heure. Vainement le président Poincaré avait écrit au roi George pour l’avertir qu’un mot de l’Angleterre, prononcé à temps, pouvait encore faire réfléchir l’Allemagne. L’Angleterre a un Parlement, des ministres libéraux et pacifistes, et elle n’interviendra qu’au moment où la Belgique sera envahie. La France est bien obligée, le 2 août, de mobiliser à son tour : on rassure encore les Français, on leur dit que « la mobilisation n’est pas la guerre ». Viviani ordonne que nos troupes se retirent à 10 kilomètres de la frontière pour prouver que nous ne sommes pas les agresseurs. Mais il était impossible de refuser le combat. Si nous avions déclaré notre neutralité, renié l’alliance russe, l’Allemagne aurait exigé comme gage la remise de Toul et de Verdun. Elle aurait battu la Russie et nous eût ensuite tenus à sa discrétion. La France devait se défendre ou accepter le joug.
    Le peuple français le comprit. La mobilisation, bien préparée par notre état-major, eut lieu non seulement avec ordre, mais avec confiance. C’était sur notre décadence que l’Allemagne avait compté. Elle avait cru que la guerre serait chez nous le signal d’une révolution qui fut même annoncée dans les pays de l’Europe centrale. Elle se trompait. L’assassinat du chef socialiste Jaurès, dans la soirée du 31 juillet, n’avait pas causé le moindre trouble. Pour sa défense, la nation fut unie. Ce qu’elle ne savait pas, c’était à quel point sa préparation matérielle à la guerre était insuffisante, à quel carnage elle allait. La troupe portait encore le vieux pantalon rouge, véritable cible. Notre canon de 75, arme redoutable, ne pouvait rien contre la supériorité des Allemands en grosse artillerie. Des années de négligence et d’imprévoyance furent payées par la vie de milliers et de milliers de Français.
    La colère contre l’agresseur avait, d’un seul coup, balayé beaucoup d’illusions. Ce qui soutenait la confiance, c’était que, cette fois, nous n’étions pas seuls comme en 1870. On savait les Allemands forts et nombreux. Mais la Russie, réservoir d’hommes, quelle compensation ! Et puis, des alliés, nous ne cesserions pas d’en avoir de nouveaux. Le 3 août, l’Allemagne nous déclare la guerre. Dès la veille, violant des traités, elle a sommé le gouvernement belge de livrer passage à ses armées, et la Belgique décide tout de suite de se défendre. Cette décision obligeait l’Angleterre, encore hésitante, à intervenir, parce qu’elle avait promis, en 1839, de garantir la neutralité belge et aussi parce qu’il était dit que jamais dans l’histoire elle ne tolérerait qu’une grande puissance européenne s’emparât des bouches de l’Escaut. La solution qu’avait trouvée, sous le règne de Louis-Philippe, l’antique problème des Pays-Bas, se montrait pour nous salutaire. Non seulement la Belgique, devenue une nation, était dans cette grande guerre à nos côtés, mais elle y entraînait tout l’Empire britannique, et lorsque l’Angleterre entre dans un conflit européen, l’histoire enseigne qu’elle ne s’en retire qu’après avoir vaincu.
    France, Russie, Belgique, Angleterre, cette « Entente », déjà si vaste, semblait plus que capable de tenir tête à l’Allemagne et à l’Autriche et de les battre. L’Italie, fidèle à l’accord qu’elle avait signé en 1902, s’empressait de nous informer qu’elle resterait neutre et, par là, nous délivrait d’un lourd souci sur notre frontière des Alpes. Le seul concours que l’Allemagne allait trouver, ce serait celui de la Turquie et de la Bulgarie, concours non pas négligeable, car il a compliqué et prolongé la lutte, mais insuffisant pour lui donner la victoire quand son coup de surprise aurait été manqué. Ce qu’on ne soupçonnait pas, en 1914, c’était qu’il nous faudrait encore beaucoup d’autres alliés pour venir à bout du grand Empire militaire, tant d’alliés que nous en serions les prisonniers un jour, et que, pour

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