Histoire de France
cette exception, échappait aux règles féodales. C’est pourquoi la couronne passa sans encombre, non à la fille que laissait Louis Hutin, mais à son frère, le deuxième fils de Philippe le Bel, Philippe le Long. Il ne vint d’opposition que de quelques grands féodaux et des princes de Valois qui ne devaient pas tarder à profiter de cette règle, comme héritiers de France, et à la trouver fort raisonnable. Cette opposition fut promptement écartée par l’assemblée des notables qui fut convoquée à Paris. Chose curieuse : on éprouva le besoin de donner une base juridique à la succession de mâle en mâle dont tout le monde reconnaissait l’utilité, et l’on alla chercher, pour justifier une loi naturelle, je ne sais quelle loi des Francs Saliens, d’où le nom baroque de loi salique. La France était décidément un pays de juristes et de grammairiens.
Quelle qu’en fût la base, une règle était posée et elle serait salutaire. Nous savons ce qu’a donné la succession dans la ligne masculine. Nous ne savons pas ce qui fût advenu de la France si, comme en d’autres pays, la couronne avait pu être portée dans la ligne féminine. Cette fois l’hérédité était bien établie. Ce qui est remarquable encore c’est que personne ne pensa à rappeler les origines électives de la royauté. La raison décisive en faveur de Philippe le Long eût été qu’en 987 on n’aurait jamais songé à élire une femme. On n’en parla même pas, tant le principe héréditaire était enraciné.
Philippe V ne régna guère plus que son frère aîné. Comme lui, il voulut en finir avec le « butin ». Si peu que la succession de son frère lui eût été contestée, Philippe se méfiait. Il voulut de l’ordre partout, brisa les ligues en s’appuyant sur les bonnes villes et sur l’Université de Paris, courut sus à un nouveau soulèvement de Pastoureaux. Lui aussi mourut jeune et sans laisser de fils, en 1322. Cette fois, la couronne passa sans plus de difficulté à son frère Charles, surnommé le Bel, comme son père, et qui eut soin, étant le premier Capétien qui s’appelât Charles, de prendre le numéro quatre pour se rattacher à la lignée de Charlemagne, de même que le premier Louis avait pris le numéro six pour attester la même filiation.
Charles le Bel, comme ses frères, fut occupé à la police du royaume et il eut la main rude. On pendit quelques financiers : le peuple, après chaque règne, réclamait ces holocaustes. Quelques brigands féodaux furent aussi condamnés à mort. Ces choses se passaient tandis que l’Angleterre et l’Allemagne étaient en révolution. En Angleterre, le roi Édouard II, déposé, était tué dans sa prison, car le régicide n’est pas nouveau. Charles profita de ce désordre chez les Anglais pour mettre la Guyenne sous séquestre. En Allemagne, l’empereur, un Bavarois, était contesté, excommunié. Ses adversaires sollicitèrent l’aide du roi de France et lui offrirent même leur couronne impériale. Il fallait, pour que la France fût en sécurité, ces divisions chez nos voisins. Malheureusement, elles ne dureront pas.
Charles le Bel, à son tour, mourut de bonne heure, en 1328. Comme ses frères encore, il ne laissait qu’une fille. La reine attendait un deuxième enfant. Charles désigna son cousin germain Philippe de Valois pour la régence. Mais la reine mit au monde une autre fille. Le régent, de fait, devint roi. La loi salique, la transmission de la couronne de mâle en mâle par ordre héréditaire, s’appliquait d’elle-même.
Une assemblée, semblable à celle qui avait jadis élu Hugues Capet approuva, sur l’avis conforme des juristes. L’avènement de la branche cadette se passa donc aussi bien que possible. Il n’en est pas moins vrai qu’il y avait eu discussion et, dans un temps où les Français n’étaient pas très portés à respecter le pouvoir. Sans doute il ne s’éleva qu’une réclamation, celle d’Édouard III, petit-fils de Philippe le Bel par sa mère Isabeau. La réclamation fut écartée pour diverses raisons dont la majeure fut « qu’en France on ne voulait pas être sujet du roi d’Angleterre ». Mais la revendication d’Édouard servira bientôt de prétexte au besoin d’expansion du peuple anglais. Dans ce conflit, par lequel le royaume de France sera mis tout près de sa fin, l’ennemi ne manquera pas d’attaquer les titres de Philippe VI que les Flamands appelleront le « roi
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