Histoire de France
longtemps que l’épopée napoléonienne, jusqu’au jour où elle est tombée dans l’oubli. Mais, à la mort de Théodebald, fils de Thierry, de terribles dissentiments éclatèrent dans la descendance de Clovis. Austrasiens et Neustriens se battirent pour la prééminence. Il s’agissait de savoir qui commanderait. Les luttes dramatiques de Chilpéric et de Sigebert, l’interminable rivalité de Frédégonde et de Brunehaut, n’eurent pas d’autre cause. C’étaient des partis qui se déchiraient et toute idée de nationalité était absente de ces conflits.
Après cette longue guerre civile, l’Empire des Francs se trouva de nouveau réuni dans une seule main, celle de Clotaire II. Mais l’Austrasie, la Bourgogne et la Neustrie avaient gardé chacune une administration distincte et, par l’effet des désordres, l’autorité royale s’était affaiblie, dépouillée. Grands et petits, laïcs et religieux, lui avaient arraché des « immunités ». Le pouvoir s’émiettait, le territoire se démembrait. En outre, pendant cette période troublée où la mort allait vite, il y avait eu des minorités à la faveur desquelles une nouvelle puissance avait grandi : le maire du palais, c’était en somme le premier ministre devenu vice-roi quand le souverain était mineur ou incapable. Avec les maires du palais paraissait une nouvelle force. L’un d’eux, Pépin de Landen, en Austrasie, devait donner naissance à une deuxième dynastie.
Les Mérovingiens eurent encore deux règnes brillants et forts avec Clotaire II et Dagobert. Celui-là, grand lettré, grand bâtisseur, véritable artiste, est resté fameux, ainsi que son ministre saint Éloi. C’est peut-être, de tous les princes de sa race, celui qui a porté le plus loin l’imitation des empereurs de Rome. Les Francs s’étaient entièrement romanisés.
Après Dagobert (638), ce fut la décadence ; les partages recommencèrent entre ses fils et l’effet des partages fut aggravé par les minorités. Les maires du palais devinrent les véritables maîtres. Quelques Mérovingiens, parvenus à l’âge d’homme, essayèrent de réagir et de rétablir l’autorité royale. Ils ne réussirent pas à remonter le courant. On avait perdu l’habitude d’obéir. Les grands conspiraient et défendaient par tous les moyens ce qu’ils appelaient déjà la liberté. Chilpéric II passa pour un despote et un réactionnaire : il fut assassiné. Des années de guerre civile s’en suivirent, luttes entre des partis rivaux qui exploitaient la vieille concurrence entre Neustriens et Austrasiens, et qui, selon les besoins du jour, couronnaient ou détrônaient des rois enfants. Le grand conflit qui mit aux prises Ebroin, maire de Neustrie, et saint Léger, tout-puissant en Bourgogne, formerait une histoire fastidieuse de coups d’État et de révolutions politiques. Les contemporains assistèrent avec terreur à cette anarchie où la France sombrait, à peine apparue au jour.
Il fallait autre chose. L’expérience mérovingienne, bien commencée, finissait mal. On sentait le besoin d’un nouveau Clovis. Où le prendre ? Une dynastie ne se fonde pas toute seule. Il y avait bien, en Austrasie, une famille dont l’influence ne cessait de croître, et c’était encore, malgré les efforts des hommes politiques de Neustrie, l’Austrasie qui disposait des plus grands moyens matériels pour diriger l’Empire franc. Cette famille, celle des ducs d’Héristal, qui devait être la souche de la dynastie carolingienne et qui se rattachait au maire du palais Pépin de Landen, mit près de cent ans à s’emparer de la couronne. Ce fut un beau travail de patience jusqu’au jour où les circonstances permirent la substitution.
Les d’Héristal ou Pipinnides réussirent parce qu’ils eurent le temps pour eux et parce qu’ils rendirent les services que l’on attendait. Riches et puissants en Austrasie où ils portaient le titre de ducs, ils représentaient, aux frontières du monde germanique, la civilisation catholique et romaine qui avait besoin d’une grande force politique pour se maintenir. Aussi devaient-ils avoir avec eux, et l’Église, et les sentiments qui avaient déjà assuré le succès de Clovis. C’est ce qui leur promettait de refaire un jour l’unité de la Gaule, appuyés sur l’Austrasie où était le siège de leur pouvoir. En somme, les ancêtres de Charlemagne se sont élevés par les mêmes procédés qui, de notre temps, ont
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