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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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phénomènes parallèles ayant la même origine, le besoin de la noblesse de se régénéreraprès son dépérissement lié aux guerres des décennies précédentes.
    C’est d’abord au Portugal et en Espagne qu’elle dérogea, en s’associant aux marchands. Ultérieurement (au XVII e  siècle), des pays d’Europe plus anciennement développés, la Hollande notamment, l’Angleterre puis la France, possédant un équipement politique qui se solidifie, prennent la relève… Ainsi l’expansion hollandaise, puis anglaise, et même l’expansion française plus faible n’eurent pas le même système de causes que celui qui avait donné l’impulsion à la colonisation portugaise et espagnole, aux colonisations polonaise, voire russe, à l’est.
    La poussée démographique a aussi joué son rôle, l’accroissement de la population castillane aux XV e et XVI e  siècles aidant au mouvement d’émigration, tout comme en Mazurie et en Russie. En outre, on sait qu’au XVII e  siècle la victoire facile remportée par les Hollandais sur les Portugais s’explique en partie par le fait que les Hollandais disposaient d’un surplus de population, car ils pouvaient mobiliser non seulement leurs concitoyens, mais une partie de la population allemande.
    Expansion coloniale, impérialisme : quelles ruptures ?
    Les grandes entreprises auxquelles la monarchie portugaise avait participé, depuis Jean le Parfait, constituaient une alternative à la politique de reconquête et de croisade qui avait connu une fin tragique à la bataille d’Alcazarquivir, en 1578, le plus grand désastre de l’histoire du Portugal. Dans un film superbe, Non, ou la vaine gloire de commander , Manoel de Oliveira a bien senti le lien entre l’échec des tentatives portugaises d’unifier la Péninsule, ou de s’implanter au Maroc, et l’essor de ces voyages, leur valorisation, qui se sont substitués aux objectifs antérieurs des souverains — tout en poursuivant, mais ailleurs, l’œuvre d’évangélisation et de conquête.
    La glorification des grandes découvertes portugaises aeu, ainsi, pour fonction de détourner le Portugal de la lutte frontale contre les Maures, une thérapeutique de l’oubli qui a duré plusieurs siècles, car, pour le Portugal, une seconde humiliation est venue plus tard, lorsque ce sont les rivaux du Portugal, les Princes de la Couronne d’Espagne, qui ont vengé Alcazarquivir à la bataille de Lépante — avant de s’emparer du Portugal lui-même, en 1580, pour unifier la Péninsule… Cette thérapeutique de l’oubli, Lucette Valensi en a étudié les modalités et le parcours dans Fables de la mémoire .
    Or, cette fonction de contrepoids et de transfert a bientôt été relayée par d’autres — développement commercial, évangélisation, colonisation, asservissement des peuples, etc., au point que la mémoire historique occidentale a fini par oublier combien avait été capital ce motif de la lutte contre l’Infidèle. Seul, au XVIII e  siècle, l’abbé Raynal a perçu avec force quel avait été le principal enjeu (G. Brisvert). Mais la volonté d’oubli a effacé sa trace.
    Or, cet enjeu, on le retrouve en France, à l’âge dit de l’impérialisme, où, par un transfert de même nature, la III e  République s’oriente vers une politique impériale conquérante pour oublier et effacer la défaite de Sedan, la faillite de la politique européenne de l’Empire et la perte de l’Alsace-Lorraine. Le dessin de Hansi adressé à Jules Ferry, promoteur de ces conquêtes impériales en Indochine et en Tunisie, le dit bien : « J’ai perdu deux enfants, vous m’offrez deux domestiques. »
    Le même jeu alternatif se dessine dans l’Empire russe, où, au XIX e  siècle, faute d’avoir pu par deux fois imposer sa volonté à l’Europe centrale, le tsar reporte sa volonté de domination vers le Caucase puis l’Extrême-Orient. Après la guerre de Crimée, cette étape expansionniste fut marquée par la fin de la conquête et la « pacification » du Caucase, la conquête de Tachkent (1865), Samarcande (1868), Khiva et Khokand (1876), puis des régions de l’Amour et de l’Oussouri.
    Une deuxième fois, un terme ayant été mis à ces conflits dans les Balkans par un accord avec François-Joseph, en 1897, le tsar veut « compenser » cet arrêt imposé au panslavisme en déplaçant le centre d’intérêt de la Russievers l’Extrême-Orient et le Pacifique

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