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Histoire Romaine

Histoire Romaine

Titel: Histoire Romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Theodor Mommsen
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de Verrès,
il l’entreprend contre la juridiction sénatoriale, après que cette juridiction
est tombée. Discute-t-on la loi Gabinia  ? il se tait : la loi Manilia  ?
il la soutient ! Et quand il tonne contre Catilina, déjà le départ de
Catilina est constant. Je m’arrête. Contre une fausse attaque, il est grand et
puissant, il emporte à grand fracas les forteresses de carton : mais, en
bien comme en mal, quelle affaire sérieuse a été décidée jamais par son
initiative ? Il a fait exécuter les Catilinariens ! Non pas, il a seulement
laissé faire ! Dans la littérature, il est bien vraiment le créateur de la
prose latine moderne, je l’ai dit ailleurs : son art du style est sa
meilleure gloire, son style fait sa haute importance ; et ce n’est que
comme écrivain qu’il a la sûre conscience de sa force. Sous le rapport de la
conception littéraire, je ne le place pas plus haut que le politique. Il s’est
essayé dans les travaux les plus divers : il a chanté les grands exploits
de Marius et ses minces hauts faits à lui-même dans d’innombrables hexamètres :
il a voulu mettre hors de champ ; dans ses discours, Démosthène, dans ses
dialogues philosophiques, Platon : le temps seul lui a manqué, sans quoi, sans
doute, il eût battu Thucydide aussi dans l’histoire [1586] . Avant tout, possédé
de la rage d’écrire, peu lui importait le terrain, pourvu qu’il le labourât. Nature
de journaliste dans le pire sens du mot : trop riche en paroles, c’est lui
qui l’avoue, pauvre en pensée au-delà de ce qu’on peut dire, il n’était point
de genre littéraire, où ; s’aidant de quelques livres, traduisant, compilant,
il n’improvisât une œuvre de commode lecture. Son portrait fidèle se retrouve
dans sa correspondance. D’habitude on la loue, comme intéressante, comme pleine
de verve : je l’accorde, en tant qu’elle est le journal de la ville et de
la campagne, et le miroir du grand monde. plais prenez l’auteur laissé à
lui-même ; prenez-le en exil, en Cilicie, après la bataille de Pharsale, il
devient aussitôt terne et vide, pareil à un feuilletoniste égaré loin de son
milieu. Qu’un tel politique, qu’un tel lettré ne put être. qu’un homme
superficiel et de cœur faible, avec sa mince couche d’élégant vernis, j’estime
inutile d’en fournir la preuve. Nous occuperons-nous de l’orateur ? Tout
grand écrivain est de fait un grand homme : c’est chez le grand orateur
surtout que les convictions et la passion débordent à flots clairs et sonores
des, profondeurs de la poitrine. Autrement en est-il de la foule des indigents
parleurs, qui ne font que nombre et ne sont point. Or, de conviction, de
passion, Cicéron n’en a pas ; il n’est qu’un avocat ; et pour moi, un
médiocre avocat. Il expose bien le point de fait, le relève d’anecdotes
piquantes ; il excite sinon l’émotion, du moins la sentimentalité de son
auditoire : il avive la sécheresse du sujet juridique par son esprit et
par le tour souvent personnel de sa plaisanterie. Ses bons discours, enfin, sont
d’une lecture facile et agréable, quoiqu’ils n’atteignent point tant s’en faut,
au libre enjouement, à la sûreté de trait des chefs-d’œuvre du genre, des mémoires
de Beaumarchais par exemple ; mais aux yeux du juge sévère, ce ne sont là
que des qualités d’un douteux mérite, et quand vous constatez à la charge de
Cicéron l’absence complète du sens de l’homme d’État dans ses écrits politiques,
de la déduction logique et juridique dans ses écrits judiciaires ; quand
vous vous heurtez sans cesse à cette infatuation de l’avocat, perdant sa cause
de vue pour ne songer qu’à lui-même, à ce triste vide de la pensée, enfin, vous
n’achevez pas la lecture sans une révolte de votre cœur et de votre esprit. Ce
que j’admire ici, c’est moins le plaidoyer que l’admiration qu’il a suscitée. Dégagée
de toutes préventions, la critique en a bientôt fini avec Cicéron. Mais le cicéronianisme est un problème dont on ne saurait, à proprement parler, fournir la solution :
on la tourne seulement quand l’on pénètre dans le grand secret de l’humaine
nature, en tenant compte de la langue, et, de l’effet de la langue sur l’esprit.
Au moment même où la fin du latin était proche, en tant qu’idiome populaire, voici
venir un styliste souple et habile, qui rassemble et résume ce noble
langage ; il le dépose dans

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