Interdit
ses robes
d’or, l’observant de ses yeux trop sombres pour son visage
trop pâle. Elle avait l’air céleste, plus fragile qu’une flamme.
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ELIZABETH LOWELL
— Ambre, dit-il en tendant la main vers elle.
Au moment où il allait la toucher, elle se recula.
— Il suffit, murmura-t-elle. Je vous en prie. Assez. Je ne
peux le supporter.
— Je ne vous ferai aucun mal.
— Vous n’en aurez pas l’intention. Mais vous m’en ferez.
— Ambre.
Elle recula alors qu’il avançait.
— Vous devez quitter cet endroit, dit-elle précipitam-
ment. C’est trop dangereux pour vous. Erik et Cassandra
n’auraient jamais dû vous mener jusqu’ici.
— Ils ne l’ont pas fait.
— Ils ont dû le faire. Il n’y a pas d’autre possibilité.
Duncan ouvrit la main. Le pendentif d’Ambre reposait
sur sa paume.
— C’est vous qui m’avez guidé, dit-il simplement.
— C’est impossible. Nous ne sommes pas unis par ce
lien profond et irrévocable.
— Et pourtant, si. Je suis ici. Si vous ne repartez pas
avec moi, je resterai avec vous dans ce silence d’ambre.
Ambre ferma les yeux et lutta contre le chagrin et l’es-
poir qui la détruisaient à égale mesure.
— Je suis désolée, sombre guerrier. Je veux que vous
soyez libre.
— Sans vous, il n’y a nulle liberté, si ce n’est la mort.
Elle sentit son mouvement et se serait de nouveau
retirée, mais elle était adossée à la pierre antique. Avec ce
qui lui restait de force, elle se concentra pour ne pas crier
lorsqu’elle serait touchée.
Ce qu’elle ressentit fut le pendentif, remis délicatement
entre ses doigts. Lorsqu’elle sentit le poids dans sa main,
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INTERDIT
elle ouvrit brusquement les yeux. Ce n’était pas seulement
son pendentif qui lui avait été donné.
Duncan lui avait aussi donné le sien.
— Reprenez-les ! s’écria-t-elle. Vous allez mourir ici !
— Souffle de mon souffle, murmura Duncan. Cœur de
mon cœur. Âme de mon âme. Touchez-moi .
Ambre leva lentement la main. Lorsque ses doigts
effleurèrent la paume de Duncan, elle cria.
De plaisir, pas de souffrance.
Un plaisir plus exquis qu’aucun auparavant.
Pleurant et riant à la fois, elle jeta ses bras autour de son
sombre guerrier et le serra contre elle, en toute simplicité, se
noyant dans la vérité éclatante que son contact révélait.
Autour d’eux l’air vibra et s’altéra. Le son se déversa sou-
dain, comme si on avait éclaté une bulle. La vie revint d’un
coup, les oies crièrent, le vent balaya les herbes jusqu’à ce
que le marais soit inondé de murmures et de soupirs, répé-
tant les mêmes mots sans fin, prononçant un sort qui ne
connaissait pas de frontière, ni de temps, ni d’espace…
« Je vous aime. »
Au centre d’un anneau sacré, au loin, un sorbier fleurit pour
la première fois en mille ans.
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c Épilogue
Le château de Stone Ring prospéra grâce aux bienfaits
du sorbier sacré. Les cultures étaient abondantes dans
les champs, les poissons et la volaille tournoyaient dans les
eaux et les airs, et le rire des enfants traversait les prairies
verdoyantes tandis qu’ils jouaient à chat avec le soleil doré.
Duncan et Ambre allaient souvent à Stone Ring et au
sorbier sacré. Ils restaient au pied du sorbier, partageant
l’émerveillement constant qu’un arbre fleurisse en toute
saison, en tout temps, contre toute logique, honorant une
promesse si ancienne que seul le sorbier se rappelait à qui il
l’avait faite, et pourquoi.
La légende du seigneur et de la dame du château de
Stone Ring se répandit dans les Terres contestées, le conte
d’une sorcière d’ambre qui aimait trop et d’un sombre guer-
rier qui refusait d’être parjure malgré la force de la
tentation.
C’était une histoire de perte et d’audace, d’un guerrier
non Érudit bravant la voie des Druides entre le temps et
l’espace, la vie et la mort. Cela parlait d’un chevalier dispa-
raissant dans la brume lors d’une quête dangereuse et qui
en revenait avec une dame dans les bras. C’était une histoire
d’amour qui fleurissait comme fleurissait le sorbier sacré,
contre toute attente, conférant la vie à tout ce qu’il touchait.
• • •
ELIZABETH LOWELL
Le sorbier grandit toujours dans le cercle de pierres sacrées,
car la promesse avait été faite pour aussi longtemps que les
fleuves se jetteraient dans la mer.
Avec le temps, d’autres honnêtes hommes
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