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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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mes traits que je suis un honnête homme.
    Et en effet, quoique notre artiste fût loin d’être beau, il avait sur sa physionomie l’expression d’une intelligence pénétrante et d’un génie inventif, qui, joints à des yeux vifs et brillans, à une bouche bien faite, et à un sourire spirituel, donne souvent de la grâce à des traits irréguliers.
    Jeannette le regarda quelque temps avec la simplicité maligne de son sexe, et répondit :
    – Malgré la bonne foi dont tu te vantes, l’ami, et quoique je n’aie pas l’habitude de lire et de juger les livres de la nature de ceux que tu viens de me soumettre, je crois découvrir en toi quelque chose du colporteur et quelque chose du picoreur.
    – Peut-être une légère dose, dit Wayland en riant ; mais écoute : ce soir ou demain matin, un vieillard viendra ici avec ton père. Il a le pas perfide du chat, l’œil perçant et malicieux du rat, les basses flatteries de l’épagneul et le naturel féroce du dogue ; prends garde à lui, et pour ton bonheur et pour celui de ta maîtresse. Prends garde à lui, belle Jeannette ; il cache le venin de l’aspic sous la prétendue innocence de la colombe. Je ne sais précisément quel est le crime qu’il médite ; mais la maladie et la mort suivent ses pas. Ne dis rien de tout ceci à ta maîtresse : mes connaissances m’apprennent que dans son état la crainte d’un mal peut lui être aussi dangereuse que la réalité ; mais veille à ce qu’elle fasse usage de mon spécifique, car, continua-t-il en baissant la voix, et d’un ton solennel, c’est un antidote contre le poison. Écoutez ; ils entrent dans le jardin.
    En effet on distinguait les accens d’une joie bruyante et d’une conversation animée ; Wayland, à la première alarme, se cacha dans le fond d’un bosquet touffu ; et Jeannette se retira dans la serre, pour ne pas être vue et pour cacher, au moins pour le présent, les achats qu’on avait faits au prétendu colporteur.
    Jeannette cependant n’avait aucune raison de s’inquiéter. Son père, le domestique de lord Leicester et l’astrologue entrèrent dans le jardin en tumulte et dans un embarras extrême. Ils cherchaient inutilement à apaiser Lambourne, à qui le vin avait complètement tourné la cervelle. Il avait le malheur d’être du nombre de ces gens qui, une fois pris de vin, ne se laissent pas aller au sommeil, comme font d’ordinaire les ivrognes, mais qui demeurent pendant fort long-temps sous l’influence de la liqueur, jusqu’à ce que, par de fréquentes libations, ils tombent dans une frénésie indomptable. Comme tant d’autres ivrognes, Lambourne ne perdait rien de la liberté de ses mouvemens ou de ses paroles ; au contraire, il parlait dans l’ivresse avec plus d’emphase et de facilité, et il racontait tout ce qu’il aurait voulu tenir secret dans d’autres momens.
    – Quoi ! criait Michel de toute la force de ses poumons, vous n’allez pas me donner ma bienvenue, me faire faire quelque bombance, à moi qui vous amène la fortune dans votre chenil, sous la forme d’un cousin du diable, qui peut changer des morceaux d’ardoise en bonnes piastres espagnoles ! Approche, Tony Allume-Fagots, papiste, puritain, hypocrite, avare, libertin, diable composé de tous les péchés des hommes ; approche, et prosterne-toi devant celui qui t’a amené le Mammon {95} que tu adores.
    – Au nom de Dieu, dit Foster, parle bas ; viens dans la maison, tu auras du vin et tout ce que tu demanderas.
    – Non, vieux rustre, je veux l’avoir ici, criait de toute sa force le spadassin, ici, al fresco , comme disent les Italiens. Non, je ne veux pas boire entre deux murailles avec ce diable d’empoisonneur, pour être suffoqué par des vapeurs d’arsenic ou de vif-argent. Le traître Varney m’a appris à m’en défier.
    – Au nom de tous les diables ! donnez-lui du vin, dit l’alchimiste.
    – Ah ! ah ! et tu l’épicerais, n’est-ce pas, bonne pièce {96}  ! Oui, j’y trouverais du vert-de-gris, de l’ellébore, du vitriol, de l’eau-forte, et vingt autres ingrédiens diaboliques, qui fermenteraient dans ma pauvre tête comme le philtre qu’une vieille sorcière fait bouillir dans son chaudron pour faire venir le diable. Donne-moi le flacon toi-même, vieux Tony Allume-Fagots, et que le vin soit frais ; je ne veux pas qu’on le chauffe au bûcher des évêques. Ou attends. Que Leicester soit roi s’il veut. Bien. Et Varney, le

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