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La chasse infernale

La chasse infernale

Titel: La chasse infernale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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pièce à droite. Corbett s’efforça de cacher sa surprise. La chambre de Bullock était propre et spacieuse, le sol récuré et couvert de tapis de laine. Au-dessus de la fenêtre losangée pendait un triptyque représentant la Passion du Christ, avec Marie et saint Jean sur les panneaux latéraux. Un haut lit à quatre colonnes trônait dans la pièce ; sous la fenêtre se trouvaient un bureau, une large chaire, des tabourets et des coffres couverts. Mais ce qui arrêta l’attention de Corbett, ce fut les étagères, croulant sous les livres, qui montaient du sol au plafond et encadraient la fenêtre.
    — Ne jugez jamais un livre d’après sa couverture, plaisanta Bullock. Vous regardez ma joie et mon orgueil, Sir Hugh. J’ai acheté quelques-uns de ces livres, mais un bon nombre m’ont été légués par mon oncle, prieur à Hailes Abbey.
    Il se dirigea vers une étagère et en sortit un volume qu’il épousseta avec délicatesse avant de le donner au magistrat.
    Le clerc reconnut le titre : Cur Deus homo
    — Pourquoi Dieu se fit homme – l’oeuvre du grand érudit normand Anselme.
    — Le joyau de ma collection, souffla Bullock en s’approchant.
    Il désigna la calligraphie et les splendides lettrines au début de chaque paragraphe.
    — Copié directement sur l’original. Ces bâtards de Sparrow Hall savent que je le possède. Tripham m’a proposé de l’or à l’once, mais j’ai refusé de le vendre.
    Il remit le livre en place, prit une clé à un crochet planté dans le mur et conduisit Corbett à la resserre, une longue pièce étroite, pleine de coffres et de boîtes en bois. Elle était sombre et sentait le renfermé. Bullock saisit une des boîtes qu’il emporta sur le palier.
    — Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, expliqua-t-il, je préfère ne pas la poser dans ma chambre.
    Il remua le contenu, qui sentait le moisi, et souleva un nuage de poussière.
    Le shérif regagna sa chambre pendant que Corbett commençait à farfouiller dans les pitoyables haillons.
    — J’ai ordonné que l’on déshabille les corps ! cria Bullock. Ces pauvres diables ne pouvaient s’offrir de cercueils mais je me suis assuré qu’ils étaient ensevelis dans des linceuls décents.
    Corbett posa les vêtements un à un sur le plancher : de vieilles bottes éculées, des chausses déchirées et rapiécées, un justaucorps en cuir, une cape mitée dont la fourrure de taupe, sur la bordure, avait été mangée, une chemise de laine, trouée et sale. Il essaya de faire abstraction de l’odeur en examinant attentivement les bottes et les chausses.
    — Pas un seul brin d’herbe ! murmura-t-il en regardant Ranulf. Ni une feuille. Rien ! Je crois que ces hommes n’ont pas été tués à l’endroit où on les a découverts.
    Ranulf prit une paire de chausses et passa au crible les fils de laine usés.
    — Regardez, Messire ! s’écria-t-il en désignant les petits cailloux, semblables à des grains, qu’il venait de découvrir.
    — Et voilà les mêmes ici.
    Corbett montra une autre paire de chausses d’un vert bouteille passé. Puis il s’intéressa aux bottes : ici aussi, rien, ni boue, ni autre indice, n’indiquait que les mendiants avaient été assassinés dans un champ ou un bois.
    — Remets-les en place, ordonna-t-il.
    Il aida Ranulf et Bullock revint.
    — En avez-vous terminé ?
    — Oui.
    Le shérif poussa la boîte dans la resserre d’un coup de pied et claqua la porte.
    — Eh bien, Sir Hugh, qu’en pensez-vous ?
    — Je suppose, répondit le magistrat, que ces hommes n’ont pas été tués pendant un rite satanique. Je ne crois pas qu’ils aient été attirés par ruse dans une lande désolée ou un champ désert : on les a tués ici, à Oxford. Peut-être dans une rue ou une ruelle.
    — Mais pourquoi ? insista Ranulf.
    — Peut-être par plaisir, répondit son maître. Quelque âme perverse qui aime voir un vieil homme demander grâce avant d’être exécuté ? C’est pour cela qu’on les a choisis. À qui un mendiant peut-il manquer ?
    — De la pure méchanceté ? s’exclama Bullock. Une simple soif de meurtre ?
    — Quelque chose dans ce genre-là, dit Corbett. Une chasse infernale. Quelqu’un qui erre dans les rues, la nuit, choisit sa victime et la traque comme vous traqueriez un lapin ou un faisan.
    — Et pourtant personne n’a rien vu ni rien entendu, souligna le shérif.
    — Pensez à tous les endroits déserts de la ville.

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