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La cote 512

La cote 512

Titel: La cote 512 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thierry Bourcy
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retrouver le corps du lieutenant. Et puis, je n’ai pas le choix.
    Comme ils écrasaient leurs cigarettes dans la boue, le lieutenant Doussac les rejoignit. Il sortait de son abri et, comme à l’habitude, glissait un carnet de notes dans sa poche.
    — Content de vous revoir, Louise. Votre petit voyage vous a-t-il été profitable ?
    — Très profitable, mon lieutenant. Je vous remercie.
    Germain, qui avait vu le courrier qui arrivait, se leva pour assister à la distribution. Lui ne recevait jamais rien, mais la joie des autres était communicative. Et l’humeur était d’ordinaire au partage, il récupérait toujours un morceau de chocolat, un bout de saucisson ou même une paire de chaussettes. Resté seul avec le lieutenant, Célestin lui communiqua les résultats de son enquête et l’urgence de mettre la main sur Kerivin.
    — Il y a un territorial qui peut m’aider, un nommé Octave Chapoutel. Je sais qu’il est aussi dans notre secteur.
    — Je ne peux plus vous laisser partir, Louise. Mais quand nous serons relevés, allez donc faire un tour jusqu’à l’écluse du Quesnoy, elle a été bombardée et je sais qu’il y pas mal de territoriaux qui y travaillent.
    — Merci, mon lieutenant.
    — Louise ! Hé, Louise ! Du courrier pour toi !
    C’était la voix rocailleuse de Flachon, il trottait maladroitement vers eux, trébuchant sur le caillebotis, une lettre à la main. Célestin fut surpris, il n’attendait pas de lettre de sa sœur, qu’il avait croisée à Paris, encore moins de ses collègues de la Préfecture. Il pensa à Claire de Mérange, une idée idiote qu’il repoussa, mécontent. L’écriture sur l’enveloppe était maladroite, son nom était tracé en grosses lettres, et il manquait le « g » du mot compagnie. Elle venait pourtant de l’état-major. C’était l’armurier. Il lui disait deux choses. D’abord, que les deux balles avaient bien été tirées par le même fusil dont le canon provoquait sur le plomb une striure bien caractéristique. Ensuite qu’il avait eu entre les mains, pour une remise en état, le fusil Lebel qui avait tiré les deux projectiles. Il appartenait à un cycliste de la 14e compagnie, détaché à l’état-major pour ses excellents états de service. Célestin ne s’étonna pas en lisant le nom : Noël Kerivin. Son correspondant concluait en quelques mots, assurant qu’il fallait être un maniaque des armes, comme lui, pour s’intéresser à tous ces détails, mais que cela l’avait amusé. Le jeune policier se demanda un moment s’il devait prévenir la police militaire ou la gendarmerie, il avait suffisamment d’éléments pour accabler Kerivin. Il décida qu’il irait seul au bout de son enquête : les gendarmes avaient assez d’occupation avec les ivrognes et les réfractaires. Il voulait aussi tenir sa promesse à Claire de Mérange, il voulait revoir la jeune femme. Une petite mouche glacée se posa sur son nez. Il leva la tête : le vent arrachait au ciel gris les premiers flocons. Un quart d’heure plus tard, il neigeait d’abondance et, par les créneaux du parapet, on pouvait voir un épais manteau blanc recouvrir peu à peu les débris de la guerre.
    À seize heures, juste avant la tombée de la nuit, les canons lourds de l’artillerie allemande les pilonnèrent systématiquement.
    — Ils sont à l’heure, remarqua Fontaine, recroquevillé à l’entrée d’un abri, son sac remonté sur sa nuque en guise de maigre protection.
    De fait, les artilleurs avaient pris l’habitude de les arroser tous les soirs à la même heure et, prétendait Peuch, exactement aux mêmes endroits. Il suffisait d’avoir suivi attentivement un des bombardements pour prévoir sans se tromper où allait tomber le prochain obus. Célestin n’arrivait pas à s’habituer à ce rythme incessant de déflagrations, il avait l’impression que cela ne s’arrêterait jamais tant que tout n’aurait pas été bouleversé, émietté, réduit à néant. Chaque sifflement annonciateur d’une explosion lui soulevait le cœur, il sentait monter en lui des bouffées de colère incontrôlable, il aurait étripé sans hésiter ces types qui, sans les voir, leur balançaient la mort et le chaos. Enfin, avec la même ponctualité, le bombardement cessa. Le cuisinier arriva avec un ragoût encore tiède et la soirée fut presque joyeuse. Sur le coup de minuit, Célestin était de garde au parapet lorsqu’il vit débarquer une petite équipe

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