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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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oublié à Senlis son jeu de boules, il se cantonna dans une cellule du monastère à lire L’Imitation et dans un vieil hôtel de la ville à jouer avec ses petites maîtresses.
    Au matin du 8 septembre, alors qu’il avait écrit aux échevins de Paris pour leur demander de livrer la ville et n’avait pas obtenu de réponse, d’Alençon dit à sa compagne :
    – Lorsque nous attaquerons il faudra changer de tactique : faire porter le gros de nos forces sur la porte Saint-Honoré en laissant quelques compagnies en faction devant ses voisines.
    C’était l’avis de Jeanne. Elle avait longuement inspecté les lieux et constaté que les défenses, comme l’abbé le lui avait déjà signalé, étaient plus vulnérables devant la porte Saint-Honoré, sous la Butte des Moulins et près du chemin du Roule, du Louvre et de la Seine ; elle était précédée d’un vaste espace favorable aux mouvements des troupes : le Marché aux Pourceaux.
    – J’ai commencé, ajouta Jean d’Alençon, à constituer un pont de bateaux de manière à pouvoir passer sans encombre sur la rive gauche du fleuve et de prendre pied sur le Pré-aux-Clercs. Une attaque sur deux points jettera la panique chez l’ennemi.
     
    Peu avant que l’armée ne s’ébranle, Jeanne reçut la visite de Pierre, fils du Seigneur de l’Ours. Il venait donner à Jeanne les dernières nouvelles de la situation à Paris, il ne fit que confirmer ce que son père avait révélé à la Pucelle : les gens de la Prévôté faisaient courir la rumeur selon laquelle les habitants seraient passés au fil de l’épée, les maisons incendiées et les femmes violées si la « légion infernale des Armagnacs » entrait dans Paris.
    – Il s’est trouvé beaucoup de sottes gens, dit-il, pour croire ces sornettes. Les hommes des milices sont fort remontés contre vous et vous font brûler en effigie sur les places. Le Régent a renoncé à retirer des troupes de Normandie mais il nous a envoyé quelques valeureux capitaines. La partie n’est pas jouée. Il vous faudra beaucoup de sacrifices et de persévérance. Où allez-vous attaquer ?
    – À la porte Saint-Honoré.
    – Vous avez fait un choix judicieux.
     
    Durant la nuit précédant la marche sur Paris Jeanne avait envoyé des équipes chargées de collecter les matériaux divers nécessaires au comblement des fossés : arbres, poutres, vieux meubles arrachés aux ruines du faubourg, échelles, claies, fagots... Elles étaient encore à l’ouvrage quand l’avant-garde conduite par Gilles de Rais arriva sur les lieux. Le gros de l’armée, environ dix mille hommes, suivait de peu sous la conduite du maréchal de Boussac, de Saint-Vallier, de Vendôme, de Gaucourt, d’Albret et des deux frères de Laval.
    Le premier soin de Jeanne fut de faire abattre les gibets et de les faire jeter aux fossés avec les deux cadavres qui y étaient restés suspendus. Elle distribua l’artillerie : bombardes, couleuvrines et veuglaires, en regrettant que l’on n’ait pu tracter la Bougue jusque-là. Un convoi transportant sept cents échelles fermait la marche.
    Les Français avaient commencé à se répandre, compagnie par compagnie, devant la porte Saint-Honoré, dite des Aveugles, quand les premiers tirs de couleuvrines partirent des remparts où flottaient bannières et étendards marqués de la croix de Saint-André. Les Français ripostèrent par un feu nourri qui bouqueta de poussière la pierre des tourelles.
    Jeanne pria le sire de Saint-Vallier d’ouvrir le bal avec ses compagnies de Dauphinois : il s’agissait de mettre le feu aux barrières protégeant le boulevard et de poser les premières échelles. Les compagnies de Gilles attaqueraient sur un autre point ; il fit sans trop de grabuge franchir les fossés à ses hommes en passant sur les bourrées, et leur fit prendre position sur le boulevard avec quelques échelles. Jeanne, qui ne voulait pas manquer cette vaillance d’armes, le suivait de peu avec sa bannière portée par le petit page Raymond. Elle lui avait dit :
    – Tu veux m’accompagner, gamin, mais tu sais que tu vas risquer ta vie ?
    – Elle m’importe peu si je meurs pour vous.
    – Alors suis-moi et ne me quitte pas d’un pouce en tenant ferme cette bannière que j’ai ramenée d’Orléans.
    Ils parvinrent à franchir le premier fossé malgré les flèches et les viretons qui pleuvaient autour d’eux et ricochaient sur la cuirasse de la Pucelle. Dressée sur ses arçons, les mains

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