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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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l’autre rive. Arrivé au milieu du pont, il se retourne et fait un dernier salut de la main.
    D’ici quelques jours il sera à Beaumont, l’un de ses domaines proches de Senlis, au bord de l’Oise.
    Beaumont où l’attend son épouse.
     
    Jeanne n’a pas assisté au départ de Gilles de Rais : il est parti la veille, dans une aube brumeuse, sans lui faire ses adieux, et elle sait pourquoi. Ce sombre chevalier refuse en toute circonstance de se laisser attendrir.
    En revanche, le lendemain du départ de Jean d’Alençon, La Hire, Xaintrailles, Dunois, Boussac et quelques autres capitaines de l’armée du Sacre ont fêté leur séparation par un repas commun, en donnant la place d’honneur à Jeanne, le roi ayant refusé de se joindre à eux.
    Quelques heures plus tard elle a assisté à leur départ, chacun vers sa destination propre, bannière au vent, dans le grondement des chansons de route dont certaines parlent de la Pucelle en tout bien tout honneur. Une pluie aigre de fin d’été brouillait l’horizon.
    Lorsque Jeanne a repris son cheval pour remonter vers le château, un sentiment de solitude s’est appesanti sur elle, donnant à l’avenir l’apparence désolée des immenses gravières jaunâtres bordant la rive opposée du fleuve.
    Comme il lui restait quelques heures de jour et qu’elle redoutait de se retrouver si tôt dans sa chambre, elle s’est mise à flâner dans les rues marchandes, s’arrêtant pour parler avec des boutiquiers et des chalands qui, l’ayant reconnue, l’interpellaient joyeusement. Ce qui l’importune d’ordinaire, ces témoignages de dévotion, elle le supporte aujourd’hui, sinon avec plaisir, du moins avec l’impression qu’ils l’aident à chasser ses idées noires. Parvenue sur la crête, face au vallon agreste qui occupe l’autre versant envahi par des vignes, des champs, parsemé de hameaux paisibles, elle se dirige vers l’église et, méprisant les douleurs à la cuisse qui la harcèlent, reste une heure en prière devant le Christ en croix.
    Quand elle en ressort il tombe avec la nuit une nouvelle averse qui semble devoir engloutir le monde jusqu’à la fin des temps.

5
    Au bout de la lance

Bourges, début hiver 1429-1430
    Partie de Bourges en compagnie de son fils Louis, la reine Marie se portait à la rencontre de son royal époux. Charles demanda à Jeanne d’aller à ses devants ; elle ne put refuser. La rencontre eut lieu sur une rive du Cher, près de la petite ville de Selles-sur-Berry.
    À part une discrète entrevue sur les terrasses de Loches, Jeanne n’avait pas revu la reine depuis son départ de Chinon pour Orléans. La fille de Louis d’Anjou et de Madame Yolande n’avait pas embelli : elle avait, à vingt-cinq ans, gardé ce visage ingrat qui faisait dire aux mauvais esprits que sa seule apparition eût suffi à faire fuir les Anglais. Sa taille s’était alourdie, son nez semblait s’être allongé ; sa conversation était toujours aussi parcimonieuse. Parlant des rapports de Charles avec cette épouse disgraciée, les mêmes mauvais esprits proclamaient qu’il tempérait les déplaisirs des amours de dette par les plaisirs des amours de grâce, une observation qui excusait les passades adultérines auxquelles Sa Majesté se livrait sans retenue et sans scrupules.
    Le dauphin Louis, lui non plus, n’avait pas gagné en grâce en prenant de l’âge : ce garçonnet de sept ans, laid et sournois, s’accrochait encore aux jupes de sa mère.
     
    La reine Marie et Jeanne ne s’attardèrent pas à Selles : il tardait à Marie de retrouver ses habitudes de Bourges et la petite Catherine qui, née l’année précédente, était entre la vie et la mort.
    En chemin, la reine demanda à Jeanne comment se portait le roi : Charles avait pris de son côté le chemin de Sully-sur-Loire où La Trémoille avait proposé de l’accueillir dans son château.
    – Au mieux, madame, répondit Jeanne. Vous avez pu le constater. Il est fort satisfait que nous n’ayons pas eu à faire combattre l’armée du Sacre. Sa santé et son humeur se ressentent de ces bonnes conditions.
    – Souffre-t-il toujours de ses maux d’estomac ? A-t-il encore des vents ?
    – Ma foi, je ne saurais dire. Sa Majesté ne me fait pas l’honneur de ses confidences. Je puis vous assurer qu’il ne souffre de rien de grave.
    – Je ne vous cache pas, ma fille, que j’étais inquiète à son sujet. Mon époux est un homme de cabinet, fait pour la diplomatie

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