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La croix de perdition

La croix de perdition

Titel: La croix de perdition Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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en cette heure déjà tardive, lui avait affirmé que leur sœur dépositaire n'était pas passée de la journée. Désireuse d'offrir son aide, elle avait même proposé de joindre ses efforts aux leurs afin de trouver Rolande. Madame de Baskerville, touchée par l'émoi et la gentillesse de la novice, avait souri avec chaleur pour la première fois depuis son arrivée et décliné la proposition avec tact.
    Mary contourna le bâtiment et déboucha devant la babillerie. Une sœur écolâtre la reçut.
    – Oh, mais nous ne voyons jamais notre bonne Rolande céans, ma sœur. La babillerie n'a pas de compte propre. Tout nous est fourni par le cloître Saint-Joseph.
    Une fois ressortie, l'apothicaire hésita, puis se décida pour l'herbarium, certaine qu'elle n'y trouverait pas la dépositaire. Au fond, Mary n'espérait plus qu'une chose : être la première à découvrir le cadavre de Rolande Bonnel afin d'épargner l'affreuse surprise aux deux autres. Elle s'y prépara. La mort ne l'effrayait pas. Elle l'avait frôlée cent fois de très près.
    La vaste salle du scriptorium était verrouillée pour la nuit. Se levant sur la pointe des pieds, Plaisance scruta par les fenêtres les formes confuses des scriptionales 7 . Hormis le bureau de l'abbesse, le scriptorium était le seul lieu de l'abbaye protégé de vitres, fort rares et dispendieuses, cela afin de garantir le maximum de lumière aux sœurs copistes et d'éviter que l'encre ne gèle dans les cornes de bœuf à l'hiver. Rien. Nulle lumière à l'intérieur. L'endroit était désert. Désespérément.
    Plaisance de Champlois tenta de juguler l'émotion qui l'étreignait, d'étouffer l'affreuse intuition qui s'imposait peu à peu à elle. Non ! Il n'était rien survenu de fâcheux à Rolande. Sornettes ! Les larmes lui montèrent aux yeux lorsqu'elle se revit, retenant son agacement et les réprimandes qui lui venaient quand sa fille insistait, piétinait devant son bureau, désignant des chiffres d'un index accusateur, bien décidée à ne pas lâcher prise tant que l'abbesse n'aurait pas vérifié, si possible à l'instant, ce qu'elle avançait. Le souffle lui manqua. Elle pensait déjà à Rolande comme si cette dernière était trépassée ! Elle se sermonna. En vérité, sotte qu'elle faisait ! Elle avança d'un pas vif vers les cuisines, glissant parfois sur la neige tassée.
    Le judas de la porte du cloître de la Madeleine se souleva enfin en réponse aux coups de poing qu'assénait Alexia de Nilanay contre le panneau. Une portière laïque, au regard peu amène, cria :
    – C'est bientôt l'coucher !
    La jeune femme rétorqua d'un ton sec :
    – Inutile de perdre votre temps en me rappelant les évidences. Je les sais aussi bien que vous. Sur ordre de l'abbesse, nous cherchons la sœur dépositaire Rolande Bonnel. L'avez-vous vue céans ?
    – Nan. Personne est venu depuis l'matin. Ça, c'est pas les visites d'elles autres les chastes qui nous étourdissent ! D'toute façon, la dépositaire, j'la connais. Ni bonjour ni bonsoir quand elle débarque pour vérifier un compte de la Madeleine !
    – Si les sœurs repentantes sont aussi avenantes que vous, il n'y a pas raison de s'en étonner ! lança Alexia en tournant les talons.
    Sa colère s'atténua lorsqu'elle songea qu'elle devenait aussi affable que madame de Baskerville. Ah non ! Tout, sauf ressembler à cette harpie. Elle devait amèrement regretter son vœu.
    Elle poussa le battant de la petite chapelle Saint-Augustin. On n'y célébrait pas les offices et ce lieu de prière était devenu le havre de celles qui cherchaient un peu de solitude afin de se mieux recueillir. De taille modeste, construit selon un plan centré et surmonté d'un dôme de faible hauteur, l'édifice avait toujours charmé Alexia durant son involontaire séjour aux Clairets, bien plus que l'impérieuse abbatiale Notre-Dame. On s'y sentait la bienvenue, comme si les sombres pierres de grison vous avaient attendue, espérée presque. Alexia, du temps où elle se nommait Marie-Gillette d'Andremont, avait trouvé en ce lieu un apaisement mâtiné d'un sentiment bien moins honorable : une petite revanche. Ici, elle était en paix. Ici, on ne la tançait pas pour ses manquements ou son esprit trop vif. Ici, même l'odieuse Adélaïde Baudet ne venait pas la débusquer afin de lui confier une nouvelle corvée.
    Tendant son esconce devant elle, elle longea le déambulatoire intérieur et se rapprocha de

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