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La Flèche noire

La Flèche noire

Titel: La Flèche noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Louis Stevenson
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déroute ou échappés, vie sauve, de Shoreby, qui pouvait le dire   ?
    Il arrêta par la tunique un archer qui passait.
    – Camarade, demanda-t-il, étiez-vous ici quand la maison a été prise   ?
    – Lâchez, dit l’archer. Lâchez, la peste   ! ou je frappe.
    – Écoutez, répliqua Richard, ou bien, à nous deux. Arrêtez et répondez. Mais l’homme, enhardi par la boisson et la bataille, d’une main frappa Dick sur l’épaule, tandis que, de l’autre, il tirait sur son vêtement. Là-dessus, la colère du jeune homme éclata. Il saisit l’individu fortement dans ses bras et l’écrasa contre les plaques de sa poitrine de mailles comme un enfant   ; puis le tenant à bout de bras, il lui ordonna de parler s’il aimait la vie.
    – Je vous demande grâce, soupira l’archer   ; si j’avais pu croire que vous étiez si en colère je me serais bien gardé de vous fâcher. Oui, j’étais ici.
    – Connaissez-vous Sir Daniel   ? continua Dick.
    – Oui, je le connais bien, répliqua l’homme.
    – Était-il dans la maison   ?
    – Oui, Monsieur, il y était, répondit l’archer. Mais au moment même où nous entrions par la porte de la cour il sortit à cheval par le jardin.
    – Seul   ? cria Dick.
    – Il y avait peut-être une vingtaine de lances avec lui, dit l’homme.
    – Des lances   ; pas de femmes alors   ? demanda Shelton.
    – Ma foi, je n’en ai pas vu, dit l’archer. Mais il n’y en avait pas dans la maison, si c’est là ce que vous cherchez.
    – Je vous remercie, dit Dick. Voici une pièce pour votre peine. Mais il eut beau chercher dans son escarcelle, Dick n’y trouva rien. Demandez après moi demain, ajouta-t-il, Richard Shelt… Sir Richard Shelton, corrigea-t-il, et je vous ferai donner une jolie récompense.
    Et alors une idée vint à Dick. Il descendit rapidement dans la cour, traversa le jardin en courant de toutes ses forces, et arriva à la porte de l’église. Elle était grande ouverte   ; à l’intérieur, il n’y avait pas une place qui ne fourmillât de bourgeois fugitifs entourés de leur famille et chargés de ce qu’ils avaient de plus précieux, et au grand autel les prêtres, en grand costume, imploraient la grâce de Dieu. Au moment même où Dick entra, le chœur se mit à tonner sous la voûte.
    Il se hâta entre les groupes de réfugiés et arriva à la porte de l’escalier qui conduisait au clocher. Là un homme d’église de haute taille le devança et l’arrêta.
    – Où allez-vous, mon fils   ? demanda-t-il sévèrement.
    – Mon père, répondit Dick, je suis ici en mission de guerre   ; ne m’arrêtez pas, je commande ici pour Monseigneur de Gloucester.
    – Pour Monseigneur de Gloucester   ? répéta le prêtre. La bataille a-t-elle donc si mal tourné   ?
    – La bataille, Père, est finie, Lancastre en fuite, lord Risingham… Dieu ait son âme   !… Et maintenant, avec votre permission, je continue mes affaires. Et, poussant de côté le prêtre qui parut stupéfait de ces nouvelles, Dick, d’un coup, ouvrit la porte et franchit les marches quatre à quatre sans arrêt et sans faux pas jusqu’à la plate-forme.
    La tour de l’église de Shoreby ne commandait pas seulement la ville, étendue comme un plan, mais dominait au loin, des deux côtés, la mer et la terre. Il était maintenant près de midi, le jour extrêmement brillant, la neige éblouissante. Et, en regardant autour de lui, Dick pouvait mesurer les conséquences de la bataille.
    Le grondement confus d’un tumulte montait jusqu’à lui des rues, et de temps en temps, mais très rarement, le choc de l’acier. Pas un vaisseau, pas même une barque n’était restée au port   ; mais la mer était pointillée de voiles et de bateaux à rames chargés de fugitifs. À terre, aussi la surface des prairies neigeuses était rompue par des bandes de cavaliers, les uns se frayaient leur chemin vers la lisière de la forêt   ; les autres, ceux d’York sans aucun doute, s’interposaient vigoureusement, et les ramenaient vers la ville. Sur tout le terrain découvert gisait un nombre prodigieux d’hommes tombés et de chevaux nettement détachés sur la neige.
    Pour achever le tableau, ceux des soldats à pied qui n’avaient pas encore trouvé place sur un bateau, livraient encore un combat à l’arc sur le port, couverts par les tavernes de la côte. Il y avait aussi dans ce quartier une ou deux maisons incendiées, et la fumée s’élevait

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