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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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volonté, Ginger mobilisa tout son courage et lui porta un violent coup de pied dans l'entrejambe. Il se plia en deux. D'un geste vif, elle prit l'une des mains de l'homme et replia sauvagement l'index en arrière; la douleur dut rapidement être aussi atroce que les abominables élancements qui montaient de ses parties génitales.
    L'extension violente en arrière d'un index, par le pincement qu'il exerce sur les nerfs de la main, peut réduire n'importe quel homme à l'impuissance, si solide soit-il.
    De sa main libre, Néanderthal la saisit aux cheveux et tira. Cette contre-attaque lui fit mal, elle cria, tandis que sa vision se brouillait, mais serra les dents et tordit encore un peu plus le doigt de son assaillant. C'était plus qu'il ne pouvait en supporter, et il renonça à résister davantage. Des larmes involontaires jaillirent de ses yeux et il tomba à genoux, poussant des cris aigus et jurant.
    ´ L‚che-moi ! L‚che-moi, espèce de salope ! ª
    Clignant des yeux pour chasser la sueur dont elle sentait aussi le go˚t aux coins de la bouche, Ginger lui empoigna l'index à deux mains, puis se mit à reculer avec précaution pour sortir du passage (tandis qu'il rampait sur trois appuis), comme si elle tirait un chien dangereux au bout d'une chaîne terminée par une museliere.
    Gigotant, raclant le sol, tressautant, se traînant sur une main et deux genoux, il la fusillait d'un regard que brouillait l'envie de tuer. Son ignoble visage devenait de moins en moins visible au fur et à mesure qu'ils s'éloignaient de l'ampoule, mais la douleur, la fureur et l'humiliation le tordaient tellement qu'il n'en était plus humain: c'était la face d'un gnome. Et c'est avec une voix suraiguÎ de gnome qu'il vociférait tout un assortiment de terrifiantes imprécations.
    Le temps de parcourir maladroitement une quinzaine de mètres dans le passage, la douleur horrible de sa main, jointe aux ondes de plus en plus violentes qui montaient de ses testicules écrasés, eut raison de lui. Il hoqueta, s'étouffa et vomit sur lui.
    Elle n'osait toujours pas le l‚cher. S'il avait la moindre chance d'agir, il ne se contenterait pas de la battre, il la massacrerait. Dégo˚tée et terrifiée, elle l'entraîna encore plus vite avec elle.
    Une fois sur le trottoir, avec la crapule à demi anéantie et souillée de vomi en remorque, elle ne vit personne qui aurait pu appeler la police pour elle; si bien qu'elle força son assaillant humilié à se traîner jusqu'au milieu de la rue, obligeant la circulation à
    s'arrêter devant ce spectacle inattendu.
    quand les flics finirent par arriver, le soulagement de Ginger ne fut dépassé que par celui du voyou qui l'avait attaquée.
    C'est bien souvent à cause de sa taille que les gens sous-estimaient Ginger: avec un mètre cinquante-huit et quarante-six kilos, elle n'avait rien d'imposant et encore moins d'intimidant. Elle était bien proportionnée, mais n'avait rien d'une pin-up. Seulement, elle était blonde, et les reflets argentés de sa chevelure atti-raient le regard des hommes qui la voyaient pour la première ou la centième fois. Même en plein soleil, ses cheveux évoquaient le clair de lune. Une chevelure d'une p‚leur éthérée, des traits délicats, des yeux bleus nécessairement synonymes de douceur, un cou gracile à la Audrey Hepburn, de fines attaches, de longs doigts et une taille de guêpe-tout contribuait à donner cette fausse impression de fragilité. En outre, elle était calme et attentive par nature, deux qualités qu'on prenait souvent pour de la timidité. Sa voix était si douce, si harmonieuse qu'il n'était pas rare qu'on ne saisisse pas l'assurance et l'autorité qui animaient sa personne tout entière.
    Ginger avait hérité ses cheveux blonds, ses yeux céruléens, sa beauté et son ambition de sa mère, Anna, splendide Suédoise de près d'un mètre quatre-vingts.

    ´ Tu es ma poupée dorée ª, lui avait dit Anna quand elle était entrée au lycée à l'‚ge de neuf ans, avec près de deux ans d'avance sur ses condisciples.
    Ginger avait été la meilleure élève de sa classe et avait reçu pour la circonstance un parchemin écrit en lettres d'or. Avec deux camarades, elle avait assuré la partie récréative, juste avant la cérémonie de remise des prix, et avait joué deux morceaux au piano-du Mozart suivi d'un rag-time-qui avaient déclenché
    l'enthousiasme de l'assistance.
    ´ Ma petite poupée dorée ª, ne cessa de répéter Anna dans

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