La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
DEAN R. KOONTZ
LES …TRANGERS
TRADUIT DE L'AM…RICAIN
PAR JACqUES GUIOD
…DITIONS J'AI LU
Pour Bob Tanner,
dont l'enthousiasme lors d'une étape cruciale fut plus important qu'il ne l'imagine.
Titre original:
STRANGERS
G.P. Putnam's Sons, New York
Editions Albin Michel S.A., 1989
PREMIERE PARTIE
Le temps
des visions
Un ami fidèle est une forte défense,
Un ami fidèle est une médecine pour la vie.
Apocryphe
De terribles ténèbres se sont abattues sur nous, mais nous ne devons pas y céder. Nous brandirons des lampes de courage et nous nous fraierons un chemin jusqu'à l'aube.
Résistant français anonyme (1943) 7 novembre - 2 décembre
Laguna Beach, Californie Dominick Corvaisis s'endormit sous une couverture légère et un drap blanc apprêté, seul dans son lit, mais il se réveilla autre part-dans l'obscurité, tout au fond du placard de l'entrée, derrière les vestes et les manteaux. Il avait adopté la position du foetus. Ses poings étaient serrés, les muscles de son cou et de ses bras tendus par un cauchemar dont il ne se souvenait pas.
Il ne se revoyait pas quittant le confort du matelas au beau milieu de la nuit, mais n'était pas pour autant surpris de s'être déplacé dans le noir. Cela lui était déjà arrivé à deux reprises, récemment.
Le somnambulisme était un état potentiellement dangereux qui avait fasciné les hommes tout au long de l'histoire et qui fascina Dom dès l'instant o˘ il en fut victime. Il avait trouvé des références aux somnambules dans des écrits remontant à plus de mille ans avant J.-C. Les Perses croyaient que le corps errant du somnambule allait à la recherche de son esprit, lequel s'était détaché et dérivait dans la nuit. Les Européens de l'époque médiévale préféraient quant à eux évoquer la possession démoniaque ou la lycanthropie.
Dom Corvaisis n'était pas inquiet, seulement décon-tenancé par ce trouble. Romancier, il ne pouvait qu'être intrigué par ces déambulations nocturnes: pour lui, toutes les expériences nouvelles viendraient un jour nourrir ses livres.
Cependant, et bien qu'il p˚t profiter un jour ou l'autre de l'aspect créatif de son propre somnambulisme, c'était tout de même un trouble. Il rampa hors du placard. La douleur qui paralysait son cou s'insi-nua dans ses épaules. Ses jambes étaient engourdies et il eut du mal à se redresser.
Une fois de plus, il se sentit tout penaud. Il avait beau savoir que les adultes étaient sujets à des crises de somnambulisme, il ne pouvait s'empêcher d'y voir une maladie de l'enfance. Comme faire pipi au lit.
Les pieds nus et vêtu en tout et pour tout de son pantalon de pyjama, il traversa le séjour et le couloir avant de regagner la chambre à coucher, puis la salle de bains. Dans le miroir, il se trouva l'air dissipé d'un libertin qui refait surface après huit jours de débau-ches effrénées.
En fait, ses vices étaient extraordinairement peu nombreux. Il ne fumait pas et ne cédait ni à la gour-mandise ni à l'abus de médicaments. Il buvait peu. Il appréciait les femmes sans être coureur. Il croyait à
la fidélité dans les relations. A vrai dire, il n'avait couché avec personne depuis bientôt quatre mois.
Il n'avait cette allure de décavé que lorsque ses escapades nocturnes le conduisaient vers le lit de fortune du placard. Il se sentait épuisé. Bien qu'endormi, il avait énormément marché.
Il s'assit au bord de la baignoire et plia la jambe pour vérifier l'état de la plante de son pied gauche.
Puis il fit de même pour le pied droit. Ni l'une ni l'autre n'était griffée, sale ou entaillée. Il n'était donc pas sorti de la maison. A deux reprises, il s'était réveillé dans le placard, une fois la semaine précédente et une douzaine de jours auparavant. Cette fois encore, ses pieds étaient intacts.
Une bonne douche bien chaude le détendit. Il était grand et mince; ‚gé de trente-cinq ans, il avait la capacité de récupération de son ‚ge. A la fin du petit déjeuner, il se sentit redevenu un homme. Enfin, presque.
Il termina son café dans le patio et contempla l'agréable panorama de Laguna Beach, qui s'étendait entre les collines et la mer, puis il se rendit dans son bureau, certain que son travail était la cause de ses promenades nocturnes. Pas tant le travail proprement dit que le succès étonnant de son premier roman, Crépuscule à Babylone, qu'il avait achevé en février dernier.
Son agent avait mis
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