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La Guerre et la Paix - Tome III

La Guerre et la Paix - Tome III

Titel: La Guerre et la Paix - Tome III Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Léon Tolstoï
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ces effets ? »
    La comtesse regarda sa fille et comprit tout de suite la cause de son émotion et de la mauvaise humeur de son mari, qui continuait à ne pas la regarder.
    « Eh bien, faites comme vous voudrez… je ne vous en empêche pas, dit-elle sans se rendre complètement.
    – Maman, pardonnez-moi ! »
    Mais la comtesse, repoussant doucement sa fille, s’approcha de son mari.
    « Mon cher, arrange-toi comme il te plaira ; ai-je jamais empêché… ? dit-elle en baissant les yeux comme une coupable.
    – Les œufs qui en remontrent à la poule ! dit le comte en embrassant sa femme, avec des larmes dans les yeux, tandis que celle-ci cachait sa confusion sur son épaule.
    – Papa, papa, le peut-on ? cela ne nous empêchera pas de prendre tout ce qui nous est nécessaire… »
    Le comte fit un signe d’assentiment, et Natacha s’élança de la salle dans l’escalier, et de l’escalier dans la cour.
    Quand elle ordonna de décharger les voitures, les domestiques, n’en croyant pas leurs oreilles, se groupèrent autour d’elle, et ne lui obéirent que lorsque le comte leur eut répété que telle était la volonté de sa femme. Aussi convaincus maintenant qu’il était impossible de laisser les blessés en arrière qu’ils l’étaient quelques instants auparavant de la nécessité d’emporter les effets, ils les déchargèrent avec empressement. Les blessés à leur tour se traînèrent hors de leurs chambres, et leurs figures pâles et satisfaites entourèrent les charrettes. La bonne nouvelle se répandit bien vite dans les maisons environnantes, et tous les blessés du voisinage affluèrent dans la cour des Rostow. Beaucoup d’entre eux assurèrent qu’ils trouveraient moyen de se placer au milieu des caisses, mais comment arrêter le déchargement, du moment qu’il était commencé, et qu’importait d’ailleurs de laisser le tout ou seulement la moitié ? La cour était encombrée de caisses à moitié ouvertes, contenant les tapis, les porcelaines, les bronzes, tous ces mêmes objets qu’on avait emballés avec tant de soin la veille, et chacun s’employait de son mieux à diminuer le bagage, pour emmener le plus de blessés possible.
    « On peut encore en prendre quatre, dit l’intendant, je donnerai ma charrette.
    – Donnez celle qui porte ma garde-robe, dit la comtesse, Douniacha pourra se mettre avec moi. »
    Cet ordre fut exécuté immédiatement, et l’on envoya chercher de nouveaux blessés à deux maisons de là. Toute la domesticité, et même Natacha, étaient dans un état de surexcitation indicible.
    « Comment, attacherons-nous cette caisse ? disaient les gens, qui ne parvenaient pas à fixer une certaine caisse derrière la voiture… Il faudrait encore au moins une charrette pour les mettre !
    – Que contient celle-là ? demanda Natacha.
    – Les livres de la bibliothèque.
    – Laissez-les-y c’est inutile !»
    La britchka était au grand complet, et il n’y avait même plus de place pour le jeune comte.
    « Il ira sur le siège. N’est-ce pas, Pétia, que tu iras sur le siège ?… »
    Sonia, de son côté, n’avait cessé de travailler, mais, au contraire de Natacha, elle mettait en ordre les objets qu’on laissait, les inscrivait, selon le désir de la comtesse, et faisait de son mieux pour en emporter le plus possible.

XVII
    Enfin, à deux heures de l’après-midi, les quatre voitures, attelées et chargées, se tenaient alignées devant le perron, tandis que les charrettes chargées de blessés quittaient la cour une à une. La calèche dans laquelle se trouvait le prince André attira l’attention de Sonia, qui était occupée, avec la femme de chambre de la comtesse, à lui arranger un bon coin dans sa large et haute voiture.
    « À qui cette calèche ? demanda Sonia en passant sa tête par la portière.
    – Ne le savez-vous donc pas, mademoiselle ? dit la femme de chambre. Elle est au prince blessé qui a passé la nuit chez nous, et qui va maintenant nous suivre.
    – Quel prince ? Comment s’appelle-t-il ?
    – Mais c’est notre ancien fiancé, le prince Bolkonsky, répondit en soupirant la femme de chambre ; on le dit à l’agonie…»
    Sonia sauta à terre et courut trouver la comtesse, qui, habillée de sa robe de voyage, le chapeau sur la tête et le châle sur les épaules, marchait dans les chambres, en attendant que tous les siens fussent là pour s’asseoir les portes fermées, suivant l’usage, et dire une

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