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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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aussitôt sa demande déposée, il obtint la nationalité française. Cette rapidité exceptionnelle s’explique par le fait que la requête fut présentée par Pierre-François Gréville en personne…
    Le capitaine de grenadiers Hyppolite se remit de ses graves blessures mais, amputé d’un bras, il dut abandonner le métier des armes. Il épousa une ancienne religieuse ayant jeté le voile en 1789, fonda une nombreuse famille et s’installa à Rochefort, ce qui lui permettait de rencontrer souventes fois ses amis, les Valencey d’Adana.
    John et Marie O'Shea , que nul n’appela jamais plus Marie Toute Troussée, s’installèrent à Charleston, en Caroline du Sud, où l’ancien commodore de la marine de guerre des États-Unis fonda une compagnie de navigation florissante. Héros respecté et honoré, il aimait faire le voyage en France avec sa ravissante épouse afin de revoir ses nombreux amis.
    Pierre-François Gréville , bien qu’il demeurât dans l’ombre, ne fut jamais contesté à la tête de la police secrète car il était craint des rois, des empereurs et de tous les sauveurs suprêmes en puissance. Même Fouché, ministre de la police, en avait peur. Napoléon, prudent, le fit baron d’Empire. Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe le décorèrent et l’honorèrent, mais sans jamais ébranler ses convictions profondément républicaines.
    On le vit souvent au château des Valencey d’Adana car il considérait le prince comme son meilleur et sans doute son seul ami. Il épousa tardivement la veuve d’un officier de hussards, une femme de quarante-deux ans pour laquelle il fut le plus adorable des maris. Dans la foulée, il traita les trois enfants de sa femme comme les siens, se montrant un père attentif, plein d’esprit mais tatillon sur les principes. Encore que, pour ceux qui savaient y voir, le terrible général de la police secrète avait au fond des yeux une lueur amusée, comme si la vie se résumait au fond à une vaste blague mais qu’en esthète consommé, il la voulût toujours du meilleur goût…
    Mahéde Campagne-Ampillac suivit Joachim dans l’armée, l’un et l’autre ne voulant plus naviguer car pour qui avait connu La Terpsichore , prendre le commandement d’un autre navire eût été de quelque façon déchoir. Promu général de brigade en 1797, il quitta l’armée en même temps que Valencey d’Adana, en 1799, lorsque Bonaparte instaura le Consulat qui préparait l’Empire.
    Il avait fait revenir sa famille de «la base secrète» du Guatemala et s’installa avec sa femme et ses quatre enfants – qui devinrent sept – dans la vieille demeure délabrée de Campagne-Ampillac… où il ne demeura pas vingt-quatre heures. En effet, «monsieur son frère» et la princesse lui offrirent le très joli et confortable château de La Chesnaie de Flers.
    Comme Valencey d’Adana, il reprit brièvement du service en 1814 et 1815, pour défendre la France lorsque celle-ci fut envahie. Puis il raccrocha définitivement et sans regrets son uniforme de général.
    Il vécut heureux et parvint à établir chacun de ses sept enfants. Il est vrai que «monsieur son frère», qu’il voyait tous les jours, veilla à ce qu’il ne manquât jamais de rien.
    Seul avec lui-même, il était fier de sa vie. L'enfant abandonné avait parcouru tant de chemin depuis la hotte du «meneur de nourrice». Mais plus que tout, il aimait regarder ses enfants grandir dans une véritable famille car le plus grand ennemi de cet homme bon ne fut ni l’Anglais ni le Vendéen mais le malheur, surtout lorsqu’il s’acharne sur de petits enfants.
    La Fayette , le bouledogue qui avait connu le prince d’Adana en prison et à l’ombre de la guillotine, vécut quinze ans. Il demeura jusqu’à son dernier souffle ronchon, ronfleur, grognon, soupe au lait, boudeur, susceptible comme un hidalgo, ombrageux comme un mousquetaire, bref, une «prima donna». Quelquefois, il redevint péteur, mais par courtes périodes, comme un clin d’œil facétieux aux temps jadis. Il fut aussi un peu fou, fantasque, affectueux, adorant avec déraison son maître et sa maîtresse, mais plutôt celle-ci, surtout lorsqu’elle tenait une ombrelle… car il était terriblement sentimental.
    Il eut trois «épouses» et une trentaine de descendants qui eux-mêmes ne firent que croître et multiplier, apportant un peu de leur beauté baroque dans la laideur des villes.
    Joachim de Niel, comte de Valencey et prince

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