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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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plus en plus en colère,
soufflait davantage.
    Et Ulenspiegel lui lançait des boulettes sur la physionomie.
    Lamme, comme un lion disait :
    – Combien crois-tu, maigre trogne, que vaille un bel âne, au
museau fin, aux oreilles longues, à la poitrine large, aux jarrets
comme du fer ? dix-huit florins pour le moins, est-il vrai,
baes
marmiteux ? Combien as-tu de vieux clous dans
tes coffres pour payer une si belle bête ?
    Le
baes
soufflait davantage, mais il n’osait
bouger.
    Lamme disait :
    – Combien crois-tu que vaille un beau chariot en bois de frêne
peint en pourpre, tout garni par-dessus de toile de Courtrai contre
le soleil et les averses ? Vingt-quatre florins pour le moins,
hein ? Et combien font vingt-quatre florins et dix-huit
florins ? Réponds, ladre peu calculateur. Et comme c’est jour
de marché, et comme il y a des paysans en ta chétive hôtellerie, je
vais les leur vendre tout de suite.
    Ce qui fut fait, car tous connaissaient Lamme. Et de fait il eut
de son âne et de son chariot quarante-quatre florins et dix
patards. Alors, faisant sonner l’or sous le nez du
baes
,
il lui disait :
    – Y flaires-tu le fumet des ripailles à venir ?
    – Oui, répondait l’hôte. Et il disait tout bas :
    – Quand tu vendras ta peau, je l’achèterai un liard pour en
faire une amulette contre la prodigalité.
    Cependant une mignonne et gentille commère qui se tenait dans la
cour obscure était venue souvent regarder Lamme par la fenêtre, et
se retirait chaque fois qu’il pouvait voir son joli museau.
    Le soir, sur l’escalier, comme il montait sans lumière,
trébuchant à cause du vin qu’il avait bu, il sentit une femme qui
l’enlaçait, le baisait sur la joue, sur la bouche, voire même sur
le nez, goulûment et mouillant sa face de larmes amoureuses, puis
le laissa.
    Lamme, ensommeillé à cause de la boisson, se coucha, dormit, et
le lendemain s’en fut à Gand avec Ulenspiegel.

XIII
     
    Là, il chercha sa femme dans tous les
kaberdoesjen
,
tafelhooren
, musicos et tavernes. Le soir, il retrouvait
Ulenspiegel
In den zingende Zwaan
, au Cygne chantant.
Ulenspiegel allait partout où il pouvait, semant l’alarme et
soulevant le peuple contre les bourreaux de la terre des pères.
    Se trouvant au Marché du Vendredi, près de
Dulle-Griet
,
le Grand-Canon, Ulenspiegel se coucha à plat ventre sur le pavé. Un
charbonnier vint et lui dit :
    – Que fais-tu là ?
    – Je me mouille le nez pour savoir d’où vient le vent, répondit
Ulenspiegel.
    Un menuisier vint.
    – Prends-tu, dit-il, le pavé pour un matelas ?
    – Il en est qui le prendront bientôt pour couverture, répondit
Ulenspiegel. Un moine s’arrêta.
    – Que fait là ce veau ? demanda-t-il
    – Il demande à plat ventre votre bénédiction, mon père, répondit
Ulenspiegel. Le moine, la lui ayant donnée, s’en fut.
    Ulenspiegel alors coucha l’oreille contre terre ; un paysan
vint.
    – Entends-tu du bruit là-dessous ? lui dit-il.
    – Oui, répondit Ulenspiegel, j’écoute pousser le bois dont les
fagots serviront à brûler les pauvres hérétiques.
    – N’entends-tu plus rien ? lui dit un sergent de la
commune.
    – J’entends, dit Ulenspiegel, la gendarmerie qui vient
d’Espagne ; si tu as quelque chose à garder, enterre-le, car
bientôt les villes ne seront plus sûres à cause des voleurs.
    – Il est fou, dit le sergent de la commune.
    – Il est fou, répétèrent les bourgeois.

XIV
     
    Cependant Lamme ne mangeait plus, songeant au rêve doux de
l’escalier de la
Blauwe Lanteern
. Son cœur tirant vers
Bruges, il fut, par Ulenspiegel, mené de force à Anvers, où il
continua ses dolentes recherches.
    Ulenspiegel étant dans les tavernes, au milieu de bons flamands
réformés, voire même de catholiques amis de liberté, leur disait au
sujet des placards : « Ils nous amènent l’Inquisition
sous prétexte de nous purger d’hérésie, mais c’est à nos gibecières
que servira cette rhubarbe. Nous n’aimons à être médicamentés que
selon qu’il nous plaît ; nous nous fâcherons, révolterons et
mettrons les armes à la main. Le roi le savait d’avance. Voyant que
nous ne voulons point de la rhubarbe, il fera marcher les
seringues, c’est-à-dire les grands et les petits canons,
serpentins, fauconneaux et courtauds à grosse gueule. Lavement
royal ! Il ne restera plus un riche Flamand dans la Flandre
ainsi médicamentée. Heureux nos pays d’avoir un si

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