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LA LETTRE ÉCARLATE

LA LETTRE ÉCARLATE

Titel: LA LETTRE ÉCARLATE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nathaniel Hawthorne
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de feuilles tombées. Au centre, un ruisseau courait, nimbé d’une vapeur légère. Les arbres qui se penchaient au-dessus avaient laissé tomber dans ses eaux de grosses branches. Elles engorgeaient le courant, produisant, çà et là, des tourbillons et des profondeurs noires tandis que sous le passage libre du flot on voyait briller comme un chemin de cailloux et de sable brun. Si l’on suivait le ruisseau des yeux, on pouvait apercevoir ses eaux miroiter à quelque distance, mais on en perdait bien vite toute trace dans l’enchevêtrement des troncs d’arbres, des buissons, des rocs couverts de lichens. Tous ces arbres géants et ces blocs de granit semblaient s’appliquer à rendre mystérieux le cours de ce petit ruisseau. Peut-être craignaient-ils que, de sa voix infatigable, il allât murmurer sur son passage les secrets du cœur de la vieille forêt ? ou refléter des révélations sur le miroir lisse d’une de ses anses ? Sans cesse, en tout cas, le petit ruisseau poursuivait son murmure gentil, tranquille, apaisant mais mélancolique comme la voix d’un enfant qui passerait son enfance sans amusement et ne saurait comment être gai au milieu d’un entourage morne et d’événements sombres.
    – Ô ruisseau ! Sot et fatigant petit ruisseau ! s’écria Pearl après l’avoir écouté un instant. Pourquoi es-tu si triste ? Prends un peu courage et ne sois pas tout le temps à soupirer !
    Mais, au cours de sa petite vie parmi les arbres de la forêt, le ruisseau avait traversé tant de graves aventures qu’il ne pouvait s’empêcher d’en parler et paraissait n’avoir rien d’autre à dire. Pearl lui ressemblait en ceci que sa vie à elle provenait aussi d’une source mystérieuse et se déroulait dans un décor aussi mélancoliquement assombri. Mais à l’inverse du petit ruisseau, elle bondissait, étincelait et babillait légèrement dans sa course.
    – Que dit ce petit ruisseau triste, Mère ? demanda-t-elle.
    – Si tu avais un chagrin à toi, le ruisseau t’en parlerait comme il me parle du mien, lui répondit sa mère. Mais j’entends un pas sur le chemin et le bruit de branches qu’on écarte. Va t’amuser et laisse-moi parler avec la personne qui approche.
    – Est-ce l’Homme Noir ? demanda Pearl.
    – Va t’amuser, te dis-je, reprit la mère. Mais ne t’enfonce pas trop loin dans le bois. Et prends garde de revenir dès que je t’appellerai.
    – Oui, Mère, répondit Pearl. Mais si c’est l’Homme Noir, ne me laisseras-tu point attendre un moment ? pour que je le voie avec son gros livre sous le bras ?
    – Va vite, petite sotte ! dit Hester avec impatience. Ce n’est pas l’Homme Noir ! Tu peux l’apercevoir à travers les branches : c’est le pasteur !
    – C’est vrai, dit l’enfant. Et regarde, Mère, il tient sa main sur son cœur ! Est-ce parce que, quand il signa son nom sur le gros livre, l’Homme Noir lui mit là sa marque ? Mais pourquoi ne la porte-t-il pas au-dehors sur sa poitrine, comme toi, Mère ?
    – Va-t’en à présent et tu me tourmenteras plus tard tant que tu voudras ! s’écria Hester Prynne. Mais ne t’éloigne pas. Reste toujours assez près pour entendre couler le ruisseau.
    L’enfant s’éloigna en chantonnant et suivit le ruisseau en s’efforçant de mêler un air plus gai à ses mélancoliques accents. Mais le petit cours d’eau ne voulait pas se laisser consoler et continuait de conter un secret inintelligible concernant quelque très dramatique mystère qui aurait eu lieu dans la forêt – ou à se lamenter d’avance sur quelque autre tragédie qui n’était pas encore arrivée. Aussi Pearl, qui avait assez d’ombre dans sa petite vie, préféra-t-elle rompre tout commerce avec ce plaintif petit ruisseau. Elle se mit à ramasser des violettes, des anémones et quelques pimprenelles écarlates qu’elle trouva dans une crevasse sur le haut d’un rocher.
    Une fois l’enfant-lutin parti, Hester Prynne fit quelques pas vers le sentier qui traversait la forêt mais en restant cachée sous l’ombre épaisse du sous-bois. Elle aperçut le pasteur en train d’avancer sur le chemin, tout à fait seul et s’appuyant sur un bâton qu’il avait coupé en route. Il avait l’air épuisé et hagard. Il trahissait un accablement absolu par une expression qu’on ne lui voyait ni en ville ni aux alentours de la ville lorsqu’il se promenait, mais qui était tristement visible dans cette solitude

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