La malediction de la galigai
à Mondreville, laissa tomber ce dernier à l'attention de son ami.
â Tu viens de l'apprendre ?
â Oui.
â De quelle maison s'agit-il ? demanda Anaïs, tandis qu'Armande restait silencieuse, son époux lui ayant préalablement raconté ce qu'avait révélé le prieur des Cordeliers.
â Une bâtisse abandonnée dans Paris. J'ai envoyé chercher un ami clavellier qui nous ouvrira la porte. Et nous irons visiter l'intérieur, demain soir.
Anaïs le considéra avec un mélange d'indécision et de curiosité, mais finalement demanda :
â Croyez-vous que Thibault puisse y être⦠enfermé ?
â C'est possible, mademoiselle, mais je ne veux pas que vous vous berciez de faux espoirs. Il a disparu depuis le 8, et nous sommes le 21.
Elle comprit que Thibault était sans doute mort et, ne pouvant retenir ses larmes, se leva en balbutiant des excuses afin de se retirer dans la bibliothèque.
Armande et la dame de compagnie la rejoignirent pour la consoler.
â Elle logera ici cette nuit, dit Gaston quand ils furent seuls (les domestiques étaient dans la cuisine). Crois-tu que nous trouverons Thibault dans cette maison ?
Louis écarta les mains en signe d'impuissance.
â Je n'ai pas tout révélé en sa présence, ajouta-t-il à voix basse. Mais j'ai découvert que la maison appartient désormais à Bréval.
*
La bibliothèque de Tilly étant occupée par Anaïs et sa domestique, Louis rentra chez lui avec cheval et bagages.
Le lendemain, après avoir déjeuné d'une soupe et de confitures préparées par Marie Gaultier, il se rendit à la messe à Saint-Merry, puis alla dîner chez ses parents à qui il raconta les aventures de Gaston avant de leur donner des nouvelles de Mercy.
Il revint rue des Blancs-Manteaux en fin d'après-midi et soupa avec Marie et son frère Germain. Vers huit heures du soir, pendant qu'il lisait le seul ouvrage échappé au pillage des gens de Beaufort, il entendit les roues d'un carrosse entrant dans le cul-de-sac. Il descendit aussitôt au premier étage.
Quelques instants plus tard, Bauer introduisait Jacques Hérisson.
*
Jacques avait été pensionnaire au collège de Clermont avec Fronsac entre 1624 et 1630. à l'époque, comme les autres élèves, Louis le croyait fils de clavellier. D'ailleurs, n'était-il pas capable d'ouvrir n'importe quelle serrure ? Et ne lui avait-il pas permis de sortir avec Gaston, une nuit, afin de rencontrer le Liron, un célèbre voleur 3  ?
Seulement Jacques leur avait menti. Car c'est son oncle qui lui avait appris le savoir-faire des serruriers, son propre père étant en vérité l'exécuteur de la haute justice de Senlis. Ce que Louis avait découvert plus tard. Adulte, Hérisson n'avait pas succédé à son père mais était devenu maître clavellier en reprenant un métier familial mais moins entaché de mépris et infamie. Il s'était néanmoins installé dans sa ville natale pour rester avec ses proches.
â Me voici, monsieur le marquis, fit-il en entrant, tout intimidé.
â Merci d'être venu, Jacques. Assieds-toi. Marie va te servir de sa bonne soupe qui mijote encore dans la cheminée. Ensuite, nous irons chercher Gaston. Tu monteras en croupe avec moi et nous nous rendrons rue de Tournon où j'ai besoin de tes talents. Il y a une maison fermée, inhabitée, que nous devons visiter. As-tu pris tes outils ?
â Oui, monsieur, mais nous aurons besoin de lanternes.
â J'en ai.
â Et s'il passe le guet ?
â Il ne vient pas là -bas. En revanche, les chevau-légers du palais d'Orléans pourraient nous voir. Il faudra être discrets et silencieux. Mais ne t'inquiète de rien, Gaston est procureur, et cette visite relève d'une enquête criminelle.
Nicolas apparut à son tour et se mit à table. Bauer, qui avait monté un pichet de vin de Montmartre depuis le cellier, remplit les verres de chacun en se plaignant de la chaleur. Ayant vidé le sien d'une gorgée, il le remplit à nouveau.
â Friedrich, nous partons dans un instant. Comme il s'agit d'une expédition sans danger, tu peux rester ici. D'ailleurs, tu dois être fatigué. De plus, tu n'as pas de monture et les chevaux du carrosse
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