La malédiction des templiers
certitude. Même si les touristes n’étaient pas vraiment légion dans le coin, quelqu’un avait sans doute entendu leurs échanges de coups de feu. Auquel cas ce quelqu’un avait certainement alerté les flics. Les environs risquaient fort de lui être hostiles et jouer la fille de l’air ne serait pas chose facile, d’autant que les voies permettant d’accéder à la gorge comme d’en sortir étaient en nombre limité.
Il allait devoir composer avec les moyens du bord.
Après avoir traversé en trombe une vaste salle commune, il s’engouffra dans un passage assez large, éclairé par intermittence par le faisceau de la lampe de ses poursuivants. Celle-ci l’aidait bien, en fin de compte, se réverbérant sur les parois, éclairant tel ou tel passage, lui offrant quelques secondes de clarté. Cela étant, il n’en demeurait pas moins le gibier poursuivi par la meute. Il fallait absolument qu’il sorte de ce piège. Il courait comme un fou, aussi vite que ses jambes le lui permettaient, sans savoir où il allait. Aucune importance d’ailleurs, désormais. Il ne pouvait que suivre les câbles électriques, dans l’espoir qu’ils le ramèneraient à l’entrée de ce fichu labyrinthe.
Il entendait Reilly galoper derrière lui, pas bien loin. Il devait à tout prix le semer. Il aperçut un étroit escalier, l’emprunta, gravissant les marches quatre à quatre. Sur le palier, deux ouvertures, l’une menant à droite, l’autre à gauche. Il s’engouffra dans celle de droite, rentrant la tête dans les épaules, progressant à un rythme plus lent et sans faire de bruit, dans l’espoir de troubler son poursuivant et de se donner un petit répit.
Il devait faire quelque chose. Le retarder, d’une façon ou d’une autre.
C’est alors qu’il eut une illumination.
Au bout de l’étroit tunnel. Une masse ronde faisait saillie sur le côté de la paroi.
Le bord d’une pierre à moulin, ce dispositif circulaire taillé dans le roc, lourd d’une tonne, d’un bon mètre de diamètre, destiné à empêcher les envahisseurs de faire irruption, et que l’on pouvait mettre en place très rapidement, en ôtant simplement les deux gros coins de bois qui le retenaient.
— Arrête-toi, connard.
Zahed se retourna.
Reilly était là, à l’autre extrémité du tunnel. L’Américain tenait son pistolet d’une main, la lampe torche de l’autre. Tous deux étaient braqués sur lui. Le faisceau lumineux le fit cligner des yeux.
Il vit Tess apparaître derrière l’Américain. Chercha la ceinture, à sa taille, mais celle-ci semblait avoir disparu, et en voyant la lueur de défi qui brillait dans ses yeux, il comprit qu’elle s’en était en effet débarrassée.
— J’aurais dû te tuer, à Rome, lança Zahed, histoire de gagner un peu de temps.
— Trop tard, tête de nœud. Pose ton flingue.
Zahed regarda rapidement la base de la pierre à moulin. Les coins de bois avaient disparu depuis longtemps. En lieu et place, une tige de fer rouillée dépassait du mur latéral et la maintenait dans sa loge. Un dispositif assez primitif, sans doute installé quelques décennies plus tôt, avant que les gorges soient évacuées et condamnées. Le nombre de touristes visitant la Cappadoce était des plus limités à l’époque, et la sécurité n’était sans doute pas la préoccupation majeure des gardiens, sans doute autoproclamés, des cités souterraines.
Ce qui était tout aussi bien.
— Je ne peux pas sortir de là avec toi, et tu le sais ! cria-t-il tout en jetant de rapides coups d’œil à la tige de fer, calculant ses options, évaluant ses chances.
— A toi de choisir, mon pote. Tu sors de là avec moi, sur tes jambes, ou sans moi, mais dans un grand sac noir à fermeture à glissière, répliqua Reilly. Les deux me vont.
— A la réflexion, tu sais quoi ? fit Zahed, s’arrêtant une seconde avant de vociférer : Va te faire foutre !
Jouissant brièvement de la surprise qu’il lut dans le regard de l’Américain, il passa à l’action. Rapide comme l’éclair, il se précipita sur sa droite, le rebord de la pierre à moulin le protégeant d’un éventuel tir de son adversaire, et passa son arme dans sa main droite de façon à utiliser la crosse comme marteau.
Il l’abattit contre la base de la tige de fer.
Il avait calculé son coup à la perfection.
La tigelle bougea, écrasant la roche tendre qui l’abritait. Un deuxième coup la déplaça un peu plus.
Tess
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