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La passagère du France

La passagère du France

Titel: La passagère du France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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Et au même instant, le médecin qui accourait sortait de l’ascenseur suivi par deux brancardiers.
    — Que se passe-t-il ? fit le médecin, anxieux, à Pierre Vercors. Où est le malade ?
    — C’est ici ! hurla Chantal. Vite ! Venez !
    Les brancardiers accoururent et, après que le médecin l’eut examiné, ils l’emportèrent, suivis par Chantal qui, s’en tenant aux directives d’Andrei, leur expliquait qu’elle venait de le trouver étendu là. Tout s’enchaîna rapidement et l’officier et Sophie se retrouvèrent seuls, aussi stupéfaits l’un que l’autre. L’officier voulut rompre le silence, mais il ne trouva rien à dire. Fatigué de sa nuit, il se sentit pris de court. Dans sa courte robe rose, ses escarpins dans une main et ses gants dans l’autre, avec ses pieds nus et ses cheveux encore défaits, Sophie le déstabilisait. La première fois, quand il l’avait surprise au petit salon, elle ne lui avait pas fait d’effet particulier. Il l’avait même trouvée désagréable avec son air de vouloir avoir raison contre l’évidence. Mais, dans ce contexte nocturne inattendu, elle était une autre. Elle était une de ces femmes modernes qui lui paraissaient vivre dans un autre monde que le sien. Dans son élégante et troublante tenue, Sophie représentait pour l’officier un univers fascinant et inaccessible. Un monde de plaisirs et de fêtes, auquel il n’avait jamais eu accès. Celui du couple qu’il venait de surprendre à s’embrasser dans la nuit.
    — Avez-vous compris ce qui s’est passé, qui était cet homme ?
    Elle le questionnait. Il répondit en s éclaircissant la voix :
    — Non, je ne saurais vous dire, mais... je vais me renseigner, j’ai été surpris...
    Un cri l’empêcha de poursuivre. De son bras tendu, Sophie désignait des taches rouge sombre sur la moquette.
    — Regardez là, et là. Mais quelle horreur ! L’officier s’agenouilla et vérifia la consistance des taches du bout de ses doigts.
    — C’est bien du sang, dit-il en se relevant.
    Les traces venaient de l’escalier de service. Il repensa à ces deux hommes qu’il avait cru entrevoir et qui avaient rapidement disparu par l’escalier. Trop rapidement, se dit l’officier en se remémorant la scène. Il se dit que quelque chose de plus complexe qu’un simple malaise avait pu se produire. Ce passager avait peut-être été la victime d’une agression ?
    Sophie était paralysée. La découverte de ce sang la glaçait. Elle se souvenait elle aussi des deux hommes en bleu de travail et une autre histoire faisait son chemin dans sa tête. Elle imagina un conflit, ou peut être même pire, un meurtre. Après tout, ces deux hommes avaient tout l’air de s’enfuir et ils avaient peut-être blessé à mort ce passager, qui sait ? Dans ces coursives vides, la nuit, tout peut arriver. Elle s’affola. Épuisée de la soirée qu’elle venait de passer elle se laissa gagner par une peur panique. Elle si pleine de vie et d’énergie quelques heures avant, elle tremblait et semblait tout à coup incroyablement fragile. L’officier la vit blêmir et, en une seconde, il retrouva toutes ses capacités. Protéger, rassurer, il savait faire. C’était dans l’ordre des choses dans sa vie d’homme. Malhabile l’instant d’avant face à la féminité de Sophie, il s’approcha avec assurance, enleva sa gabardine de laine marine et la posa avec douceur sur les épaules de la jeune femme pour calmer les frissons qui l’avaient gagnée. Il parla de sa voix grave et douce, lui dit de ne pas s’inquiéter, que tout serait éclairci, qu’il devait y avoir une explication simple à ce qui s’était passé.
    — Mais, fit-elle en s’agrippant à lui, je ne veux pas aller seule à ma cabine, ces hommes... ils sont peut-être encore là.
    — N’ayez pas peur. Je suis là et je vous accompagne. Je ne vous quitte pas.
    Sa voix était calme, enveloppante, et elle fondit en larmes. Quelque chose en elle venait de céder. Il avait suffi de ces derniers mots, de cette voix masculine et Sophie s’abandonnait à sa fragilité, à ses peurs, à sa fatigue.
    Il l’entoura de son bras sûr et elle le suivit. Il fut rassurant et discret.
    — Dormez bien, lui dit-il quand ils furent à la porte de la cabine. Après de bonnes heures de sommeil, il n’y paraîtra plus, vous verrez. Ce n’était qu’un incident sans gravité. Vous oublierez, le navire est si beau et il y a tant à faire !
    Il

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