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La passagère du France

La passagère du France

Titel: La passagère du France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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lui avait annoncés, elle encourageait Sophie à suivre son exemple.
    — Je vais réfléchir, dit alors celle-ci. Il me va bien, c’est vrai, mais... il est un peu cher.
    Dénouant à regret la soie marine du tour de son visage et de son cou, elle s’en voulait déjà de sa décision raisonnable quand le téléphone intérieur sonna. L’autre vendeuse décrocha et fit un signe discret à sa collègue qui la rejoignit. Sophie les entendit dire que Chantal avait des ennuis.
    Décidément pensa-t-elle, pour une affaire qui devait rester discrète, tout le monde était déjà au courant. Et, peut-être pour se féliciter de n’avoir pas donné suite à la demande de cette Chantal dans une histoire qui faisait déjà le tour du navire, elle changea brusquement d’avis et décida de s’offrir le foulard.
    — Vous êtes sûre ? questionna la vendeuse, étonnée par cette volte-face. Je ne voudrais pas que vous regrettiez votre achat. Nous tenons à ce que nos clientes soient satisfaites, si vous voulez je peux le mettre de côté et vous repasserez demain après avoir réfléchi.
    Agréablement surprise de cette vendeuse qui ne forçait pas à la vente, Sophie confirma. La jeune femme fit alors le paquet qu’elle glissa dans un beau sac de papier blanc rigide sur lequel était écrit en bleu cobalt et lettres stylisées : « À bord du France. » Sophie prit délicatement la poche, fière d’y voir cette inscription, et se jura de la garder en souvenir.
    — Ce foulard vous portera bonheur, dit la vendeuse, vous avez bien fait de vous décider. À New York, nous allons être dévalisées et vous ne l’auriez pas retrouvé. Les Américaines sont folles de nos nouveautés et le carnet des rendez-vous d’essayage est complet.
    — Ah bon ! Mais pourquoi ? Les boutiques françaises de luxe sont installées à New York, elles peuvent y aller ! fit judicieusement remarquer Sophie.
    — Les boutiques en ville, ce n’est pas pareil. Les riches Américaines qui n’ont pu obtenir des places pour le premier voyage n’attendent qu’une chose, acheter sur le bateau. Tout ce qui vient du France les fascine et, dès qu’elles pourront monter à bord à Manhattan, lors de la visite organisée au Pier 88, ce sera la ruée. C’est pour cette raison qu’on a fait des poches spéciales, comme celle que je viens de vous donner. Ce que nous mettons en évidence, c’est le nom du paquebot, pas celui des marques ou du magasin. D’ailleurs, ajouta-t-elle, soucieuse, je me demande si nous en aurons assez pour les contenter toutes. Elles vont faire fureur, toutes les clientes en veulent déjà et en redemandent. Nous sommes forcées de refuser, nous devons en garder pour New York.
    Sophie, qui tenait sa poche le long de son corps, releva aussitôt son bras contre sa taille, de façon à mettre l’inscription bien en évidence.
    — C’est vrai que ces sacs sont jolis, dit-elle, et puis ça fera un souvenir. Mais... qu’est-ce que c’est, le « Pier 88 » ?
    — C’est le numéro du quai d’amarrage des bateaux de la French Line, sur l’Hudson. Nous sommes très attendus là-bas, la folie ! Tellement de gens n’ont pas pu avoir de billet pour le premier voyage. Certains pourtant s’y sont pris dès la construction du France et ils ont fait des pieds et des mains.
    — Mais il y aura plein d’autres traversées, ils feront le voyage suivant.
    — Le suivant ! s’exclama la vendeuse. Vous voulez rire, les réservations sont complètes sur deux ans et bien au-delà, on en enregistre par centaines tous les jours.
    Sophie n’en revenait pas et prenait encore davantage la mesure du privilège qui était le sien. Elle regarda sa montre : 15 heures. Elles avaient encore du temps avant d’aller se faire coiffer et maquiller. Elles quittèrent la boutique et décidèrent de flâner au hasard. Curieusement, tout au long de cette journée, pas un instant Sophie ne pensa à la présence de l’océan. Elle l’avait même complètement oublié. En fait, depuis qu’elle avait posé le pied sur le navire, elle avait eu peu d’occasions de le voir, tant l’espace intérieur était gigantesque. L’unique fois où elles s’aventurèrent sur le pont-promenade couvert, il faisait tellement froid et il y avait tant de monde qu’elles se replièrent immédiatement vers l’intérieur et n’en sortirent plus. Elles circulaient par d’étroites coursives reliées par des ascenseurs, avec çà et là quelques

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