La Perle de l'empereur
était incapable d’une mauvaise action et d’un crime encore moins :
— Je connais les hommes, ma petite, et celui-là en particulier : je l’ai étudié attentivement. Jamais il n’aurait fait cela ! Jamais !
C’était bon à entendre même si Lisa savait, d’expérience personnelle, quelle influence une femme trop jolie pouvait avoir sur Aldo. Elle avait assez souffert de son premier mariage ! Cependant, elle non plus ne le croyait pas coupable du meurtre. Elle était alors rentrée sur-le-champ à Venise et cette autre lettre était arrivée, portée par un messager inconnu. Elle exigeait que la princesse Morosini apporte elle-même, en se soumettant des ordres bien précis, la collection de joyaux de son époux qui comportait aussi ses propres – et très beaux ! – bijoux.
Il avait fallu calmer la colère du vieux et charmant Guy Buteau, qui vouait au couple une affection paternelle :
— Je n’accepterai pas – et en cela je sais que je traduis la pensée d’Aldo – que vous vous engagiez dans une aventure aussi dangereuse ! Aldo ne manque pas d’amis dévoués à Paris. Je suis certain qu’ils font tous leurs efforts pour le retrouver…
— Moi aussi j’en suis certaine, Guy, mais vous avez lu : je dois venir moi-même…
— Pas difficile de deviner pourquoi : quand ils vous tiendront, ils ne vous lâcheront plus. N’oubliez pas de qui vous êtes la fille unique !
— Il y a peut-être un moyen. Nous allons laisser courir le bruit qu’il m’est arrivé un accident et je vais ressusciter Mina. C’est sous cette identité que j’irai à Paris. À moi de les convaincre que je suis vraiment ce que je prétends être. Et pour commencer je vais teindre mes cheveux…
— Lisa, Lisa ! Vous avez des enfants. Les oubliez-vous ?
— Les oublier ? Dieu me pardonne, Guy, mais vous déraisonnez ! Comme si vous ne saviez pas combien je les aime. Seulement ils ont autant besoin de leur père que de leur mère…
— Et s’ils n’ont plus ni l’un ni l’autre ?
— Il leur restera assez d’amour pour les entourer jusqu’à ce qu’ils soient un homme et une femme. Il y a ma grand-mère, mon père, vous.
— Alors je vais avec vous !
— Non, Guy. Je dois y aller seule et le plus vite possible : vous avez lu cette lettre ? Vous devez rester justement pour protéger les enfants. Ces gens sont capables de s’en prendre à eux…
Il avait bien fallu en passer par où le voulait Lisa et, nantie d’une fortune en joyaux tirés de leurs écrins et logés dans des sachets de peau de chamois, elle avait pris le train pour Paris…
Elle consulta sa montre. Il lui restait trois heures avant de gagner le lieu du rendez-vous. Que faire à présent au cœur de cette ville qu’elle aimait, où vivaient ceux qu’elle considérait non seulement comme ses meilleurs amis mais aussi comme sa famille : Adalbert le fidèle, M me de Sommières et ce phénomène sympathique et déroutant qui avait nom Marie-Angéline, et puis, encore plus proche géographiquement parlant, Gilles Vauxbrun qui lui montrait toujours une respectueuse admiration. Ils étaient là, tout près, et cependant à des milliers de lieues. Il aurait été tellement réconfortant de pouvoir partager sa peur, son angoisse avec eux. Mais ne les partageaient-ils pas déjà et depuis plus longtemps qu’elle sans doute, eux qui vouaient à Aldo une amitié si vraie, une tendresse si pure ?
Haussant les épaules comme pour les débarrasser d’un fardeau, Lisa se dirigea à nouveau vers la salle de bains pour se rafraîchir et refaire le léger maquillage qui la différenciait davantage encore de sa propre image.
À ce moment-là, quelqu’un frappa…
La jeune femme se figea. Puis, comme on insistait, elle s’approcha de la porte :
— Qui est-ce ?
— Le service d’étage, Madame, fit une voix féminine. On a oublié de changer les serviettes…
Elle faillit dire que cela n’avait pas d’importance mais craignit de causer un tort quelconque à la femme de chambre.
Alors elle ouvrit…
Le premier mouvement d’Adalbert, en sortant de chez le commissaire Langlois, avait été de récupérer son Théobald et de filer vers cet autre quai de Paris où logeait fastueusement le marquis d’Agalar. Tous deux étaient décidés à employer les plus grands moyens, sinon les pires, pour extraire un renseignement quelconque du valet de chambre. Malheureusement là non plus il n’y avait
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