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La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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elle vous est dévouée ? C’est à peine croyable…
    — Elle est surtout dévouée à l’opium que je lui donne et à quelqu’un d’autre. Eh bien, mon cher prince, je pense que vous en savez assez maintenant pour occuper votre esprit ces jours à venir. Quant à moi, j’ai eu le plus grand plaisir à cet entretien. Que je renouvellerai peut-être ? Ne fût-ce que pour vous tenir au courant… C’est la moindre des choses.
    Le couvercle retomba avec une résonance lugubre, plongeant à nouveau le prisonnier dans des ténèbres d’autant plus cruelles qu’au mal-être physique allaient se joindre l’angoisse, la terreur de ce qui arriverait à Lisa quand elle viendrait s’engluer à son tour dans la toile de cette immonde araignée…

CHAPITRE IX
OÙ ADALBERT TROUVE CE QU’IL NE CHERCHAIT PAS…
    L’arrivée de Marie-Angéline boulevard Rochechouart ne manqua pas d’allure… Il s’agissait d’ôter de l’esprit de celle que l’on allait visiter le moindre doute sur le côté quasi officiel de la démarche et, surtout la moindre idée qu’il pouvait s’agir d’une espèce de complot. Ce fut donc dans la Panhard-Levassor noire de la marquise – vieille mais toujours si admirablement entretenue qu’elle sentait sa bonne maison d’une lieue –, avec Lucien le chauffeur en livrée gris fer sur le siège, qu’elle se rendit chez la fille de Raspoutine, vêtue d’un tailleur simple mais bien coupé et le chef orné d’un chapeau à voilette qui estompait suffisamment son visage pour lui donner une rassurante impression de protection contre la curiosité, et qu’elle souleva lorsque Lucien, casquette à la main, lui ouvrit la portière et qu’elle mit son grand pied, chaussé de richelieus cirés à miracle, sur le trottoir grouillant d’activité entre les boutiques fixes et les petites voitures des marchands des quatre-saisons.
    Avec dignité, la vieille fille s’arrêta un instant pour toiser l’immeuble – convenable d’ailleurs ! – pourvu d’une concierge dans la grande tradition. C’est-à-dire qu’elle passait la majorité de son temps à papoter avec les voisins et à regarder les passants… Impressionnée par l’équipage de Marie-Angéline, elle prit un ton olympien pour lui apprendre que « Mâme Solovieff logeait au troisième gauche mais qu’elle avait déjà une visite » :
    — Feriez p’t-être mieux d’attendre qu’elle s’en aille ? prévint-elle. C’est pas vraiment vot’genre.
    — Quel genre alors ?
    — Une romanichelle ! Et qu’a pas l’air commode avec ça ! Comme j’voulais l’empêcher d’monter parce que ici c’est une maison convenable, alle m’a pointé deux doigts d’vant les yeux en marmonnant je n’sais quoi. Alors j’l’ai laissée passer. Alle t’nai toute la largeur ed’l’escalier.
    — Raison de plus pour y aller ! fit vertueusement la visiteuse. M me  Solovieff peut avoir besoin d’aide et c’est la raison de ma venue.
    Ayant dit, elle s’essuya ostensiblement les pieds sur le tapis-brosse et entreprit de gravir l’escalier à peu près ciré. Au troisième elle s’arrêta, s’approcha de la porte mais ne sonna pas : les échos d’une dispute lui parvenaient où deux voix de femmes alternaient, l’une assaisonnée de sanglots, l’autre avec des intonations de basse-taille qui évoquaient le tonnerre… Ce devait être intéressant, malheureusement les deux antagonistes s’exprimaient en russe et Marie-Angéline, polyglotte distinguée cependant, ne l’entendait pas. Pour ne pas être surprise en train d’écouter, elle sonna en insistant un peu.
    Ce fut efficace. Arrachée plus qu’ouverte, la porte peinte en vert livra passage à une sorte d’énorme boulet de canon qui s’habillerait chez le costumier des Ballets Russes. Dalmatique pourpre brodée d’argent sous un châle bleu, rouge et noir, fichu à fleurs sur la tête, Masha Vassilievich interrompit sa sortie pour considérer la nouvelle venue.
    — Vous êtes qui, vous ?
    En dépit de la rudesse du ton, Marie-Angéline jugea préférable de répondre :
    — Je suis envoyée par la Société d’aide aux réfugiés russes… Mais peut-être vous-même ?…
    Le noir regard qui fusillait Marie-Angéline se fit plus noir encore :
    — Moi je travaille et je n’ai besoin de personne !… Elle non plus d’ailleurs ! clama la tzigane en pointant un doigt vengeur vers l’intérieur de l’appartement où l’on entendait pleurer.

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