La Reine Sanglante
roi ! » cria Bigorne en exhibant un parchemin.
Le pont-levis s’abaissa.
Un officier s’approcha avec un archer porteur d’un falot, reconnut les armes du roi et s’inclina devant le sceau royal qui s’étalait au bas du parchemin.
L’instant d’après, toute la troupe mettait pied à terre dans la cour intérieure.
« Combien avez-vous d’hommes avec vous préposés à la garde du pont-levis ? demanda rudement Buridan.
– Trois ! répondit l’officier, qui reconnaissait un supérieur en celui qui lui parlait.
– C’est bien ! »
Puis, se tournant vers sa troupe, Buridan commanda :
« Quatre hommes ici pour renforcer ce poste !
– Monsieur, reprit-il en se tournant vers l’officier, momentanément vous êtes sous les ordres de monsieur (et il désignait Guillaume Bourrasque)… Voici l’ordre de Sa Majesté », reprit-il en voyant que l’officier paraissait hésiter.
Ce disant, il lui mettait sous les yeux un papier portant le sceau du roi.
L’homme s’inclina en signe d’obéissance, pendant que Guillaume et ses hommes, qui sans doute avait reçu des instructions préalables, prenaient possession du poste.
Pendant ce temps, Lancelot Bigorne parlementait avec un autre officier venu de l’intérieur pour s’informer.
« Message du roi ! disait Bigorne, qui se couvrait le visage de son chaperon… qu’on me conduise immédiatement auprès du capitaine des archers du Temple. Inutile de réveiller M. le gouverneur. »
Et, comme l’officier paraissait hésiter, lui aussi, devant ces mesures qui lui paraissaient suspectes :
« Ordre du roi ! » fit Buridan, qui les avait rejoints, en exhibant son parchemin.
Comme l’avait fait le gardien de la porte, dès qu’il eut vu le sceau royal, l’officier ne songea plus à discuter et s’empressa d’obéir.
Toute la troupe de Bigorne était entrée dans une vaste salle, attendant que l’officier revînt. Au bout de quelques instants, celui-ci reparut annoncer que le capitaine des archers du Temple attendait le messager du roi.
Comme il l’avait fait à la porte d’entrée, Buridan plaça quatre hommes à la porte de cette salle et, désignant Riquet Haudryot :
« Vous seul commandez ici jusqu’à nouvel ordre. »
Et, pour la troisième fois, il exhiba son parchemin royal en disant :
« Ordre du roi ! »
Ce qui restait de la troupe suivit Lancelot Bigorne et s’arrêta à la porte de la chambre où le capitaine des archers s’habillait en toute hâte, fort étonné de cette visite faite au nom du roi.
Lancelot, avant d’entrer, avait ouvert le vaste manteau qui l’enveloppait et il apparut revêtu de son costume de fou ; tel qu’il était d’usage de le porter à la cour.
« Seigneur capitaine, fit Lancelot en s’inclinant profondément, je suis chargé par le roi de vous remettre cet ordre. »
Ce disant, il tendait au comte un parchemin que celui-ci parcourut en donnant toutes les marques de la plus profonde stupeur.
« Vous avez ici un prisonnier du nom de Philippe d’Aulnay.
– Cela se peut… il y a tant de prisonniers, ici.
– Eh bien, donc, s’il vous plaît, veuillez me remettre ce prisonnier.
– Que je vous remette ce prisonnier ?… Vous n’y pensez pas… Mgr de Valois m’a bien recommandé…
– C’est l’ordre du roi ; Mgr de Valois n’a rien à faire ici.
– C’est bien, vous pouvez vous retirer dans la pièce que vous désignez, on vous y amènera le prisonnier dans quelques instants… Je vais donner des ordres. »
Lancelot, sans répondre, s’inclina profondément, sortit et rejoignit ses acolytes dans la pièce voisine.
« Pourquoi ne sommes-nous pas descendus dans les cachots délivrer Philippe nous-mêmes ? fit alors Gautier à voix basse.
– Eh ! fit Lancelot sur le même ton, sait-on jamais ce qui peut arriver ?… Je me soucie médiocrement de descendre dans ces caves d’où, en cas d’alerte, il nous serait impossible de nous tirer, tandis qu’ici nous voyons venir… En cas de danger, nous sommes d’un bond dans la salle d’à côté, gardée par Riquet Haudryot et les nôtres… en un mot, nous avons notre retraite assurée… tandis que, en bas… diantre !…
– Pourtant, il me semble…
– Lancelot a raison, fit à son tour Buridan ; si les choses marchent normalement, on nous amènera Philippe ici sans qu’il soit besoin d’aller le chercher… »
Au même instant, la porte s’ouvrit et on vit Philippe,
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