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La Sorcière

La Sorcière

Titel: La Sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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partout. Il semble avoir vaincu. Mais profite-t-il de la victoire ? Gagne-t-il en substance ?
    Oui, sous l'aspect nouveau de la Révolte scientifique qui va nous faire la lumineuse Renaissance. Non, sous l'aspect ancien de l'Esprit ténébreux de la sorcellerie ses légendes, au seizième siècle, plus nombreuses, plus répandues que jamais, tournent volontiers au grotesque. On tremble, et cependant on rit 9. .
    8. Fauslin Hélie, dans son savant et lumineux Traité de l'instruction criminelle (t. I, 398), a parfaitement expliqué comment Innocent III, vers 1200, supprime les garanties de l' Accusation , jusque-là nécessaire (surtout la peine de la calomnie que pouvait encourir l'accusateur). On y substitue les procédures ténébreuses, ta Dénonciation , l' inquisition . Voir dans Soldan la légèreté terrible des dernières procédures. On versa le sang comme l'eau.
    9. V. mes Mémoires de Luther , pour les Kilcrops, etc.

III
    Cent ans de tolérance en France - Réaction
    L'Église donnait au juge, et à l'accusateur la confiscation des sorciers. Partout où le droit canonique reste fort, les procès de sorcellerie se multiplient, enrichissent le clergé. Partout où les tribunaux laïques revendiquent ces affaires, elles deviennent rares et disparaissent, du moins pour cent années chez nous, 1450-1550.
    Un premier coup de lumière se fait déjà au milieu du quinzième siècle, et il part de la France. L'examen du procès de Jeanne d'Arc par le Parlement, sa réhabilitation, font réfléchir sur le commerce des esprits, bons ou mauvais, sur les erreurs des tribunaux ecclésiastiques. Sorcière pour les Anglais, pour les plus grands docteurs du Concile de Bâle, elle est pour les Français une sainte, une sibylle. Sa réhabilitation inaugure chez nous une ère de tolérance. Le Parlement de Paris réhabilite aussi les prétendus Vaudois d'Arras. En 1498,il renvoie comme fou un sorcier qu'on lui présente. Nulle condamnation sous Charles VIII, Louis XII, François I er .
     
    Tout au contraire, l'Espagne, sous la pieuse Isabelle (1506), sous le cardinal Ximénès, commence à brider les sorcières. Genève, alors sous son évêque (1515), en brûla cinq cents en trois mois. L'empereur Charles-Quint, dans ses constitutions allemandes, veut en vain établir que « la sorcellerie, causant dommage aux biens et aux personnes, est une affaire civile (non ecclésiastique). » En vain il supprime la confiscation (sauf le cas de lèse-majesté). Les petits princes-évêques, dont la sorcellerie fait un des meilleurs revenus, continuent de brûler en furieux. L'imperceptible évêché de Damberg, en un moment, brûle six cents personnes, et celui de Wurtzbourg neuf cents ! Le procédé est simple. Employer tout d'abord la torture contre les témoins, créer des témoins à charge par la douleur, l'effroi. Tirer de l'accusé, par l'excès des souffrances, un aveu, et croire cet aveu contre l'évidence des faits. Exemple. Une sorcière avoue avoir tiré du cimetière le corps d'un enfant mort récemment, pour user de ce corps dans ses compositions magiques. Son mari dit : « Allez au cimetière. L'enfant y est. » On le déterre, on le retrouve justement dans sa bière. Mais le juge décide, contre le témoignage de ses yeux, que c'est une apparence , une illusion du diable. Il préfère l'aveu de la femme au fait lui-même. Elle est brûlée 10. .
    Les choses allèrent si loin, chez ces bons princes-évêques, que plus tard l'empereur le plus bigot qui fut jamais, l'empereur de la guerre de Trente ans, Ferdinand II, est obligé d'intervenir, d'établir à Bamberg un commissaire impérial pour qu'on suive le droit de l'Empire, et que le juge épiscopal ne commence pas ces procès par la torture qui les tranchait d'avance, menait droit au bûcher.
     
    On prenait les sorcières tort aisément par leurs aveux, et parfois sans tortures. Beaucoup étaient de demi-folles. Elles avouaient se transformer en bêtes. Souvent les Italiennes se faisaient chattes, et, glissant sous les portes, suçaient, disaient-elles, le sang des enfants. Au pays des grandes forêts, en Lorraine et au Jura, les femmes volontiers devenaient louves, dévoraient les passants, à les en croire (même quand il ne passait personne). On les brûlait. Des filles assuraient s'être livrées au diable, et on les trouvait vierges encore. On les brûlait. Plusieurs semblaient avoir hâte, besoin d'être brûlées. Parfois folie, fureur. Et parfois

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