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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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en blach phémant le chaint nom de Dieu et la laicha morte, et son beau vi chage si défiguré
qu’on ne la reconnai chait plus.
    — Tu observeras, mon fils, dit mon père, comment d’un
petit chat on fait un énorme tigre. Louise de Budos fut bien, à sa mort, comme
Gabrielle d’Estrées, étrangement défigurée et c’est la seule note vraie de la
chanson que tu viens d’ouïr. Tout le reste, Mariette, dit-il en se tournant
vers elle, est un damnable ramassis de superstitions, lesquelles prêteraient à
rire, si elles ne portaient pas atteinte à l’honneur d’une grande famille. Et
je te défends bien d’ores en avant de répéter cette fable, car c’est une fable
à te faire pendre, et ton Caboche aussi.
    — Mais ch’est de mon oncle que je la
tiens ! dit Mariette, toute rouge de honte, et je n’y ai pas vu ma liche.
    —  Malice ou pas, ne répète pas cette histoire,
ma pauvre, dit mon père d’un ton plus doux, si tu veux demeurer en mon emploi.
Et va de ce pas m’allumer un grand feu dans la librairie. Greta débarrassera la
table pour toi.
    — La grand mer chi à vous, Meuchieu le
Marquis, dit Mariette qui avait bien entendu que son maître, en sa bonté, la
dispensait ainsi de toucher à l’assiette de Bassompierre, laquelle était bien
évidemment envoûtée, puisque le Comte l’était.
    — J’ai déjà entendu ces fariboles au sujet de Louise de
Budos, dit mon père, dès que Mariette nous eut quittés. Le populaire, dès qu’un
événement pernicieux lui semble inexplicable, l’explique par le diable. Et
passe encore que les ignares croient à ces fables, mais le pis est – tant
notre siècle est crédule ! – que même des barbons pleins d’usage et
de raison, comme Pierre de l’Estoile, ajoutent foi à ces sornettes.
    — Mais vous-même, dit La Surie, je vous ai trouvé fort
réticent à féliciter Bassompierre de son mariage et n’y allant que de la moitié
d’une fesse pour louanger Charlotte.
    — Mais c’est qu’il y avait une raison à cela. Et
Pierre-Emmanuel va vous la dire.
    Je contai alors à La Surie comment, lors du bal de la
Duchesse de Guise, Charlotte de Montmorency, qui avait à peine quinze ans,
m’avait joué le méchant tour que l’on sait.
    — Ah, mais l’affaire est pendable ! dit La Surie.
Et comment se fait-il que je ne l’aie pas sue ?
    — Tu avais l’œil et l’oreille occupés ailleurs, dit mon
père avec un sourire.
    — Et elle avait quinze ans ! dit La Surie. Et
donnait déjà le bel œil aux Grands en montrant ses cuisselettes !
    — Aux Grands et même au Roi ! dis-je.
    — Jour de Dieu ! Se pourrait-il qu’elle soit
succube après tout ? dit La Surie.
    — Miroul ! dit mon père.
    — Ou si elle ne l’est pas, ne serait-elle pas, comme
dit Mariette, une «  ambivichieuse  » ?
    Je ris à cela, mais non mon père.
    — Allons, Miroul, c’est assez ! dit-il. Nos gens
te pourraient entendre. Et ce que dit le maître, le valet le répète un jour.
Voudrais-tu que céans on parle ainsi de la femme de Bassompierre quand il nous
l’amènera à dîner ?
    Après la remontrance qu’elle avait essuyée, la langue
parleresse de Mariette, du moins à ce propos, cessa de frétiller, mais non
point sa cervelle. Et celle-là eut quelque raison de penser que le ciel
lui-même se mettait à la traverse du mariage de Bassompierre. Je notai, à ce
propos, que nos gens sont souvent mieux renseignés que nous-mêmes sur les
secrets des grandes familles et parfois sur nous-mêmes, le plus vif de leurs
plaisirs étant de nous observer et de se communiquer entre eux leurs
observations. C’est ainsi que Mariette apprit, en allant au marché – où
elle rencontra un valet auvergnat du Connétable –, que celui-ci, alors âgé
de soixante-quatorze ans, se trouvant saisi d’un violent accès de goutte, avait
pris le lit et qu’en conséquence, le mariage de Charlotte n’aurait pas lieu
avant Noël, comme Bassompierre nous l’avait dit.
    Mariette nous communiqua cette nouvelle, alors qu’elle nous
servait à table et nul de nous trois n’aurait senti l’immense satisfaction
qu’elle en éprouvait, si le retour en force de son accent ne l’avait de nouveau
trahie. Pour qui la connaissait, il était, de reste, bien évident qu’elle
voyait dans le retardement de cette union, soit la main de Dieu, soit celle de
la bonne fée allemande du Comte, soit peut-être les deux, liguées pour une fois
contre les puissances

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