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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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infernales dont Charlotte était issue.
    En janvier, le Connétable se rétablit, mais mon père, en
revenant du Louvre, nous apprit que le Duc de Bouillon faisait de grandes
difficultés pour vendre à Bassompierre, c’est-à-dire au Roi, puisque c’était là
ce que Sa Majesté voulait donner à son favori, sa charge de premier gentilhomme
de la Chambre.
    Le barguin portait surtout sur le prix : Bouillon en
voulait 45 000 livres, et le Roi, rabattant de plus de la moitié ses
prétentions, ne lui en voulait donner que 20 000. Mais Bouillon, neveu de
Montmorency, estimait aussi que Bassompierre n’était pas assez haut pour sa
cousine Charlotte. Fille de Connétable, il lui eût fallu rien moins qu’un
prince, par exemple le Prince de Condé. Le Roi s’était récrié. Condé aimait
mieux la chasse que les dames, et de reste, pour Charlotte il voulait
Bassompierre, et personne d’autre.
    Son ton avait été si ferme que mon père en augura qu’avec ou
sans la charge de premier gentilhomme de la Chambre, Bassompierre épouserait
Charlotte avant Pâques. Il se trompait. Malgré la protection de sa fée
allemande, Bassompierre perdit tout : bien-aimée, alliance flatteuse, gros
héritage, charge royale, mais sans que Bouillon y fut pour rien, sans que Condé
y gagnât rien qu’un exil volontaire, et circonstance plus surprenante encore,
avec l’assentiment de la belle. Et comment la chose se fit, c’est ce que je
vais conter.
     
    *
    * *
     
    À quelques jours de là, un page me vint, pendant la matinée,
porter un billet du Roi me mandant de me trouver sur le coup de dix heures dans
les appartements du Dauphin. Et au guichet du Louvre où Praslin se trouvait de
garde, que vis-je debout, absurdement plus petit que le capitaine des gardes,
mais chatoyant d’autant de couleurs qu’une prairie en mai, qui, sinon le jeune
Romorantin ? Lequel m’attendait et me fit dix saluts plutôt qu’un de son
chapeau empanaché, la main gauche galamment sur la hanche, un sourire à la
négligente jouant sur ses lèvres et ignorant avec superbe les regards de mépris
que Praslin de haut déversait sur lui, et qui devinrent plus écrasants encore
quand il vit le muguet m’accoler et me baiser.
    — Chevalier, me dit Romorantin en me prenant par le
bras et en m’entraînant dans la cour du Louvre, que je suis donc aise de voir
votre tant belle face ! Le Roi m’a posté là pour vous conduire aux
appartements de Monsieur le Dauphin et vramy, vous ne sauriez croire à quel
point j’ai pâti à faire le pied de grue au côté de ce Praslin. Très assurément,
il me pue ! Il se doit cirer le cheveu et la moustache de cette même
graisse de porc que ses soldats étendent sur leurs bottes ! J’en étais
suffoqué !
    Là-dessus, il rit d’un rire de fausset, comme enivré de son
propre esprit.
    — Mais Marquis, dis-je en souriant, qu’est cela ?
Vous ne prononcez plus les « o » en « ou », les
« oi » en « é » et vous donnez maintenant droit de cité au
« d » que vous trouviez jadis, si bien je me ressouviens, dur et
dental.
    — Hélas ! Chevalier ! dit-il, mes amis et
moi-même n’avons pas varié en nos opinions. Nous pensons toujours que le
« ou » est plus suave que l’« o », que l’« oi »
est un sot volatile et se doit prononcer « é », et que le
« d » est infâme, mais le Roi, ayant appris par quelque indiscret
compagnon nos petites délicatesses, nous a traités de « sots
caquets » et fait défense de faire offense à la langue française. (Comment
trouvez-vous ma défense de faire offense ? L’assonance n’est-elle
pas bien bravette ?) Il est vrai que le Roi, présentement, est dans une
épouvantable colère et c’est sur nous que la foudre est tombée.
    — Et quelle est la cause de cette ire ? dis-je,
alarmé.
    — Mais comment, Chevalier, vous êtes bien le seul, à la
cour, qui l’ignore ! C’est la faute à la Des Essarts. Henri, ayant rompu
avec la Verneuil et envoyé la Moret au couvent, s’est tout soudain aperçu qu’il
était sans petite compagne de jeux et a voulu remettre en selle la Des Essarts,
laquelle, étant indubitablement la plus sotte pécore du royaume, a exigé de
faire partie, à son âge ! du ballet des Nymphes de Diane que la
Reine va faire danser devant la cour à l’Arsenal. Et du diable si je sais qui
est cette Diane, ni ses nymphes !
    — Diane est la déesse romaine de la chasse et ses
nymphes sont comme

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