L'âme de la France
obtenant réparation.
« Je ne sais si depuis le commencement de la monarchie il s'est jamais passé rien de plus glorieux pour elle, écrit Louis XIV. C'est une espèce d'hommage de roi à roi, de couronne à couronne, qui ne laisse plus douter à nos ennemis mêmes que la nôtre ne soit la première de la chrétienté. »
En 1664, six mille soldats français iront combattre aux côtés des Impériaux et seront victorieux des Turcs au Saint-Gothard.
C'est manière d'affirmer que le roi de France peut agir dans toute l'Europe selon sa volonté, et qu'il ne craint ni les Habsbourg de Vienne ni ceux d'Espagne.
À la mort du roi d'Espagne, Louis XIV réclame les biens de Marie-Thérèse, son épouse, dont la dot n'a pas été versée par Madrid. C'est la guerre de Dévolution (1667-1668). La France obtient Lille, Tournai et Douai au traité d'Aix-la-Chapelle.
De 1672 à 1679, il mène la guerre contre la Hollande, la plus grande puissance marchande d'Europe et donc du monde. Les peintres, les écrivains, les musiciens, Racine, l'historiographe du roi, célèbrent le « passage du Rhin » à Tolhuis, le 16 juin 1672.
Mais la guerre est longue, coûteuse, incertaine malgré les victoires de Condé et de Turenne. Louis XIV et la Cour sont présents sur le front. La guerre est pour eux un grand jeu glorieux qui enfle l'endettement de l'État. Mais la gloire n'a pas de prix, et le royaume s'agrandit de la Franche-Comté au traité de Nimègue, en 1679.
La prépondérance française – déjà inscrite dans les traités de Westphalie (1648) et des Pyrénées (1659) – en sort renforcée.
Qui pourrait dès lors s'opposer à la politique de « réunion » de villes au royaume de France – Strasbourg en 1681 –, qui ne sont que des annexions masquées par des arguties juridiques, voire des coups de force que l'armée et le royaume le plus puissant d'Europe imposent ?
Ceux qui ne se plient pas doivent méditer le sort de Gênes, bombardée par la flotte française qui l'écrase sous dix mille bombes incendiaires (19 mai 1684) pour la punir d'avoir fourni des galères à l'Espagne.
À Ratisbonne (15 août 1684), une trêve est conclue entre l'empereur, l'Espagne et Louis XIV : le roi de France est l'arbitre de l'Europe. Non seulement il paraît capable d'imposer sa loi à tous les autres royaumes, mais il est un « modèle ».
La langue française est devenue la langue diplomatique. Versailles et sa Cour sont imités dans toute l'Europe.
Cette prééminence fait naître parmi les élites, puis parmi le peuple français, un sentiment de supériorité, d'impunité, même, qui va caractériser l'âme de la France.
En 1683, quand meurent l'épouse de Louis XIV, Marie-Thérèse, et Colbert, qui a été le bon ouvrier de l'absolutisme, Louis XIV est dans la plénitude de sa force. Il n'a que quarante-cinq ans.
Il est le Roi-Soleil.
28.
La mort, en 1683, a donc commencé à rôder dans les galeries du château de Versailles inachevé où le roi et sa Cour se sont installés.
Le soleil brille encore, mais il est froid comme dans un précoce automne qui annonce un hiver rigoureux.
L'absolutisme a sa logique. Il veut tout dominer : les grands, les humbles, les États étrangers. Comment accepterait-il qu'une minorité conserve ses croyances, continue de se rassembler autour de pasteurs formés en Angleterre, dans les Provinces-Unies, ces puissances ennemies du royaume, et à Genève ?
« Je crus au début, dit Louis XIV, que le meilleur moyen pour réduire peu à peu les huguenots de mon royaume était de ne les point presser du tout par quelques rigueurs nouvelles, de faire observer ce qu'ils avaient obtenu sous les règnes précédents, mais aussi de ne leur accorder rien de plus et d'en renfermer même l'exécution dans les plus étroites bornes que la justice et la bienséance le pouvaient permettre. »
Les intendants, dans les provinces, serrent le lacet, appliquent les édits qui restreignent ou interdisent le culte protestant. Les huguenots ne peuvent exercer certains métiers et n'ont pas l'accès à la maîtrise.
Une Caisse de conversion est créée pour les inciter à quitter la religion prétendument réformée et à rejoindre celle du roi, censée être celle de tous les sujets du royaume.
L'émigration est contrôlée.
Un édit royal – du 14 juillet 1682 – interdit aux sujets de quitter la France pour s'installer à l'étranger sans en avoir obtenu
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