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L'âme de la France

L'âme de la France

Titel: L'âme de la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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est le « Nouveau Constantin » dont les courtisans chantent les mérites, que madame de Sévigné, La Fontaine et La Bruyère louent pour son action pieuse.
    Il n'est que Vauban pour mesurer les conséquences négatives du départ de tant de talents huguenots à l'étranger alors même que le royaume est de plus en plus endetté, qu'au lieu d'investir leur fortune dans les activités manufacturières ou marchandes les riches préfèrent l'achat de terres, le prêt à intérêt, l'acquisition d'offices, les garanties offertes par un État absolutiste plutôt que les risques économiques.
    Car les huguenots exilés étaient précisément ouverts sur l'économie moderne telle qu'elle se pratiquait aux Provinces-Unies et déjà en Angleterre.
    Sur ce plan-là aussi, le « modèle français » s'oppose au « modèle anglo-hollandais ».

    Louis XIV a une vision de la puissance et de la gloire qui s'accorde à ce goût de la terre, de la rente et de l'héritage qui caractérise les élites françaises.
    Il revendique ainsi – au nom de sa belle-sœur, la princesse Palatine – le Palatinat.
    Ses troupes entrent en Dauphiné pour y combattre les vaudois hérétiques.
    Louis tente d'aider Jacques II à reconquérir son trône, mais le débarquement de troupes dans l'Irlande catholique se solde par un échec.
    Reste donc la guerre continentale contre la ligue d'Augsbourg, conduite depuis 1686 mais déclarée le 15 avril 1689. Et marquée par l'impitoyable violence des troupes françaises, qui mettent le Palatinat à sac en 1688-1689 :
    « Je vois le roi assez disposé à faire raser entièrement la ville et la citadelle de Mannheim, écrit Louvois, et, en ce cas, d'en faire détruire entièrement les habitations. »
    On brûle « les villes que l'on ne peut forcer », on fait mettre « le feu dans les villages et leurs dépendances ».
    La France apparaît ainsi au reste du continent comme une puissance menaçante et oppressive, persécutrice de ses propres sujets protestants, et les huguenots exilés – Pierre Bayle, Jurieu – décrivent les horreurs des dragonnades, la menace que Louis XIV fait peser sur l'Europe entière.
    Ces années 1683-1689 sont bien le tournant du règne de Louis XIV. L'absolutisme s'y déploie et y dévoile sa violence.
    Devenu dévot, en quête de toujours plus de gloire et d'autorité, le monarque commence aussi à être harcelé par la maladie – on procède à « la grande opération » d'une fistule le 18 novembre 1686. « Le roi a souffert aujourd'hui sept heures durant comme s'il avait été sur la roue », confie madame de Maintenon.
    Louis XIV fait face à la douleur comme à l'Europe coalisée.
    Mais on ne danse plus le ballet à Versailles.
    29.
    C'est la guerre. Elle écrase le dernier quart de siècle du règne de Louis XIV et marque de son empreinte profonde et cruelle l'âme de la France.
    Le roi a voulu imposer aux États d'Europe la prépondérance française. Mais, malgré les victoires militaires – Fleurus en 1690, Steinkerke en 1692, Neerwinden en 1693 –, la suprématie navale de l'Angleterre (bataille de la Hougue, 1692) et la résistance des États obligent Louis XIV, aux traités de Turin et de Ryswick (1696, 1697), à renoncer à toutes ses conquêtes. Il ne conserve que Strasbourg. La leçon est nette : une nation ne peut dominer par la force le reste de l'Europe.

    Et pourtant la guerre reprend dès 1701.
    Le petit-fils de Louis XIV, le duc d'Anjou, devient Philippe V, roi d'Espagne, sans renoncer pour autant à la couronne de France.
    Les Français gouvernent à Madrid.
    Une compagnie française se voit attribuer l' asiento , le privilège du transport des esclaves vers l'Amérique ; Philippe V et Louis XIV sont actionnaires de cette compagnie négrière.
    Ce n'est plus seulement à un empire occidental que s'opposent l'Angleterre, la Hollande, les princes allemands. Au-delà de la question de la succession d'Espagne, la guerre a pour enjeu la domination économique, le grand commerce.
    Aux traités d'Utrecht et de Rastadt (1713, 1714), Philippe V doit renoncer à la couronne de France.
    L'Angleterre, puissance maritime, commence son ascension. Elle conserve Gibraltar. Elle a brisé l'empire continental qui risquait de se constituer entre Madrid et Paris ; elle s'apprête à contrôler les mers.
    Deuxième leçon pour le royaume de France : les États – et d'abord l'Angleterre et les Provinces-Unies – n'acceptent

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