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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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donnait sur les jardins entre l’avenue Raphaël et l’avenue Prudhon. À droite, on distinguait la porte de la Muette. Derrière, s’étendait, vert et doré, le Bois de Boulogne.
    L’ameublement était semi-moderne. Un large divan recouvert d’un tissu trop bleu ; quelques chaises plus confortables d’aspect qu’en réalité, des tables trop basses, une plante exotique, un phonographe américain, et, dans un coin, une des valises de Jeanne. En somme, rien de troublant, et cependant, Ravic ne se sentit pas à l’aise. Les choses étaient ou très bonnes, ou très mauvaises ; pour lui les choses moyennes ne signifiaient rien du tout. Et il détestait les plantes exotiques.
    Il s’aperçut que Jeanne l’observait. Elle semblait n’être pas très sûre de sa réaction, mais elle l’avait été tout de même assez pour tenter la chance.
    Il souleva le couvercle du phonographe. C’était un meuble qui avait vaguement la forme d’une malle. Il y avait un appareil automatique pour le changement des disques. Des disques étaient sur la table. Jeanne en prit quelques-uns et fit fonctionner l’appareil.
    « Tu sais comment ça marche ? »
    Il le savait.
    « Non », dit-il.
    Elle tourna un bouton.
    « C’est merveilleux. Il joue comme ça pendant des heures. Il n’est pas nécessaire de se lever pour changer les disques. On peut rester étendu ici, à écouter, à regarder tomber le crépuscule, et à rêver. »
    L’appareil était excellent. Ravic reconnut la marque. Le prix était d’environ vingt mille francs. La musique aérienne de la chanson sentimentale J’attendrai emplissait la chambre. Jeanne se pencha vers lui.
    « Ça te plaît ? »
    Ravic fit signe que oui. Il ne regardait pas le phonographe. Il regardait le visage de Jeanne complètement absorbé par la musique. Comme cela lui était facile ! Et comme il l’avait aimée pour cette facilité qu’il ne possédait pas ! Elle se redressa et lui sourit.
    « Viens, tu n’as pas encore vu la chambre à coucher.
    –  Est-il nécessaire que je la voie ? »
    Elle le regarda avec surprise.
    « Tu ne veux donc pas la voir ? Pourquoi pas ?
    Allons-y », dit-il.
    Elle toucha son visage, puis elle l’embrassa et le prit par le bras.
    La chambre était meublée en style français. Un grand lit en imitation Louis XIV ; une table de toilette dans le même style ; un miroir baroque ; une tapisserie d’Aubusson moderne ; des poufs, des chaises, bref le décor d’un film de deuxième ordre. Et parmi tout cela, un très beau bureau florentin du XVI e , qui jurait comme une princesse dans un milieu de nouveaux riches. Il était dans un coin ; et, sur ce meuble précieux, un chapeau de violettes et une paire de souliers argent avaient été négligemment jetés.
    Le lit était défait. Ravic pouvait voir la place où, quelques minutes auparavant, Jeanne était étendue. Des flacons de parfum encombraient la table de toilette. Un des placards était ouvert et laissait voir plusieurs robes. Des robes qu’elle ne possédait pas autrefois. Jeanne n’avait pas lâché le bras de Ravic. Elle s’appuya contre lui.
    « Ça te plaît ?
    –  Oui. Tout ça te va très bien. »
    Il sentait le bras et le sein qui se pressaient contre lui, et, sans penser, il l’attira. Elle répondit docilement à sa pression. Leurs épaules se touchaient. Son visage était calme maintenant, il ne restait plus trace de l’agitation qu’il avait remarquée à son arrivée. Son expression était limpide et assurée, et il parut même à Ravic qu’il s’y dissimulait comme une satisfaction, comme une vague ombre de triomphe.
    « C’est étrange, pensa-t-il, comme cette sorte de bassesse leur va bien. Elle veut faire de moi une espèce de gigolo de second ordre ; elle n’a pas la moindre honte de me montrer naïvement l’appartement que son amant a meublé pour elle ; et, en même temps, elle ressemble à la Niké de Samothrace.
    –  Quel dommage que tu ne puisses pas avoir un endroit comme celui-ci ! dit-elle. Un appartement. C’est tellement différent ! Tellement différent de ces ignobles chambres d’hôtels.
    –  Tu as raison. Je suis content d’avoir vu tout ceci. Il faut que je m’en aille, maintenant…
    –  T’en aller ? Tout de suite ? Mais tu ne fais qu’arriver ! »
    Il lui prit les mains.
    « Je m’en vais, Jeanne. Pour de bon. Tu vis avec quelqu’un. Je ne partage avec personne les femmes que j’aime. »
    Elle

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