L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
défoncer ? »
suggéra-t-il.
Il se rangea ensuite à côté de Bob Ford
pendant que Foote levait le pic à charbon au-dessus de sa tête avec un
grognement, le faisait tournoyer et l’abattait près de la serrure, fendant le
bois et plantant la pointe dans la porte, de sorte qu’il dut tortiller le
manche pour l’en extraire.
« Les portes verrouillées qu’il faut
défoncer, c’est une petite comédie à laquelle on se livre à chaque fois – c’est
un peu comme le bénédicité avant les repas », confia Jesse à Bob.
Le machiniste souffla et abaissa une seconde
fois le pic au voisinage de la poignée ; le bois céda sous le choc, gémit,
se brisa vers l’intérieur. Constatant qu’ils finiraient de toute façon par
entrer, le convoyeur tira les loquets du bas et du haut de la porte, puis lança :
« C’est bon, vous pouvez entrer
maintenant ! »
Jesse s’avança et poussa d’un coup sec la
porte qui s’effaça, pantelante, dans l’obscurité. Henry Fox recula, les mains
levées, tandis que le chef bagagiste éteignait les lumières. Jesse somma le
machiniste et le chauffeur d’aller se percher dans les herbes du talus et
ordonna à Bob Ford de les surveiller. Bob enfonça le canon de son revolver dans
les côtes de Foote et les deux cheminots allèrent s’asseoir à côté du ballast
comme si c’était la routine. Jesse se hissa à l’intérieur du wagon en prenant
successivement appui sur les mains, puis sur un genou ; Dick Liddil, ainsi
que Charley Ford, qui passait par là, l’imitèrent et allumèrent une lanterne
pendant que Jesse soulevait divers paquets et les secouait pour deviner leur
contenu.
« Ça, c’est un sac de femme, diagnostiqua-t-il.
Plein de jolies perles et de fleurs en papier.
— Ça se pourrait », convint le chef
bagagiste avec un sourire qui ne savait s’il devait persister ou disparaître.
Jesse fracassa une boîte contre un clou et l’éventra.
À l’intérieur, dans un cadre ovale, il trouva la photographie d’un enfant dont
la joue avait été déchirée par la tige de métal. Jesse balança le cliché au
plafond, rajusta son foulard sur son nez et fusilla du regard le convoyeur.
« Je veux que tu m’ouvres ce coffre. »
Du regard, Fox chercha conseil auprès du chef
bagagiste. Celui-ci baissait la tête. Fox sourit nerveusement au hors-la-loi, mais
sous l’effet de la frayeur, son expression avait quelque chose de complaisant
et d’insolent. Charley Ford se campa devant lui et l’estourbit avec son
pistolet. Le coup résonna tel un claquement de mains avec des gants, telle une
pomme rouge s’écrasant contre un arbre. Le convoyeur s’effondra à genoux, le
visage dégoulinant de sang, et le chef bagagiste se plaqua contre la paroi du
wagon, horrifié.
« Ce n’était pas la peine de le cogner, Charley,
lui reprocha Liddil.
— Si, c’était la peine, objecta Jesse. Ils
ont besoin d’être convaincus. Ils suivent les règles fixées par leur compagnie
et moi, je suis mes mauvais penchants – c’est comme ça que ça fonctionne. »
Charley rayonna de fierté. Jesse déblaya les
registres posés sur le seul coffre-fort en vue, qui était un peu moins haut qu’une
poudreuse.
« Amène-toi et occupe-toi de ça », enjoignit-il
au convoyeur.
De l’autre côté de la cloison, Melloe s’inquiétait.
« Ça va là-dedans ? » s’exclama-t-il.
Dick Liddil entendit une fusillade nourrie et
effrénée au-dehors et se pencha par la porte ; les gars de Cracker Neck
tiraient sur un chef de train et un serre-frein accroupis le long du train avec
une lanterne rouge. Frank James leur hurlait d’arrêter et, au bout d’une
vingtaine de balles, ils s’exécutèrent. Bob Ford était baissé, son pistolet
contre sa joue.
« T’as eu les jetons ? » l’apostropha
Dick.
Bob se releva, mortifié.
« Je n’ai rien pigé à ce qui se passait ! »
Fox rassembla ses esprits, se mit à composer
la combinaison du coffre de l’U. S. Express et, au bout de deux échecs, tomba
suffisamment juste pour ouvrir la porte en forçant. Le chef bagagiste l’aida
alors à grimper sur les cages à volailles, sur lesquelles Fox s’assit avec
lourdeur, fêlant le bâti de deux d’entre elles. Le chef bagagiste se jucha avec
précaution sur celle recouvrant le coffre-fort de l’Adams Express Company, dans
lequel se trouvait la plus grosse somme d’argent.
Ce fut Charley Ford qui vida le coffre de l’U. S.
Express, avec une
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