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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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pour la bonne cause et de gagner ainsi le
paradis ? Bien sûr que non. Ces gens étaient incapables du moindre
sacrifice ; tout ce qu’ils faisaient, c’était se venger, d’eux-mêmes et
des autres, en étalant à la vue de tous leur peur, leur petitesse et leur
lâcheté. Mais pas leur amour, et certainement pas leur amour de Dieu. Pour
Dieu, ils n’avaient que mépris.
    Simon sentit quelque chose se briser en lui.
    Puis un mouvement dans le ciel attira son attention. Il leva
la tête et suivit du regard le noble oiseau de Cassiopée. « C’est drôle,
pensa-t-il. Nous, nous laissons des traces sur le sable ; elle c’est dans
le ciel. »
    Il observa attentivement Cassiopée, ses vêtements clairs,
qui flottaient sur sa peau, cette manière d’être là tout en étant ailleurs, cet
air indifférent, et pourtant concerné. « Drôle de femme, se dit Simon.
Quel âge a-t-elle ? » Elle devait être à peine plus âgée que Berthe
de Cantobre. Pourtant, quel caractère ! En fait, Simon ne croyait plus à
la pureté de Berthe ; de même qu’il commençait à douter de l’impureté de
Cassiopée. Oui, elle avait été violée par les Maraykhât, puis chez les Batinis,
par Rachideddin Sinan, et sans doute même par les fidâï chargés de la remettre
aux Templiers blancs, à El Khef, en échange de l’or pris aux Hospitaliers. Il
avait maintenant l’intime conviction que l’innocence n’était pas une chose
acquise et qu’on pouvait perdre, mais, au contraire, une qualité qui devait se
gagner, et ne pouvait plus se perdre ensuite, une fois acquise. À ses yeux,
Cassiopée était une sainte. Oui, mille fois plus que la petite Berthe,
certainement grosse à présent d’un quatrième marmot et vivant dans la crasse
d’un château de Bourgogne.
    En vérité, à ses yeux, Cassiopée valait mille fois plus que
deux cent mille besants d’or. Elle était vraiment, comme disait Morgennes, une
relique ! Ô comme il comprenait que Saladin eût reconnu – ce qu’il
avait pris tout d’abord pour un aveu de faiblesse – qu’il l’eût échangée
contre la Vraie Croix, même si la Sainte Croix était l’un des éléments clés de
sa politique en Terre absolue.
    Il poussa alors son cheval au galop vers Cassiopée, sentant
battre contre sa poitrine l’oliphant qu’il avait pris aux Hospitaliers. Simon
rougit, ralentit son allure. Il lui semblait distinguer dans les
« Clang ! Clang ! » du cor tapant contre son bouclier les
coups d’épée qu’il avait donnés à ce chevalier franc, qui ne s’était même pas
défendu avant de mourir.
    Cassiopée s’était retournée en entendant s’approcher un
cheval au petit trot. Elle vit Simon et lui sourit. Ce sourire mit Simon mal à
l’aise, mais il s’efforça de faire bonne figure.
    — Nous sommes bientôt arrivés, dit-elle. Tu n’auras pas
à supporter son poids bien longtemps…
    Elle faisait allusion à la croix tronquée, que Simon tenait
sans trop vouloir montrer son plaisir. Après tout, Dieu leur avait signifié à
tous qu’il l’avait choisi, lui, pour la porter. Il l’avait guéri. Peu importait
que ce fût au contact du Saint Bois, grâce aux soins de Cassiopée, à la nuit,
ou à la venue de Moïse Maïmonide – dont les bandages lui enserraient le
torse et l’empêchaient de souffrir. Les voies du Seigneur étaient aussi
infinies qu’impénétrables.
    — Oh, dit Simon. Elle n’est pas si lourde, sans son
reliquaire…
    — Je vois. Quel honneur, tout de même, que de porter ce
bois que le Christ lui-même n’a pas réussi à porter.
    — Comment cela ?
    — N’as-tu pas lu les Évangiles ?
    — Si.
    — Alors, tu sais que pour au moins trois d’entre eux,
Jésus n’a pas porté sa croix. En tout cas pas tout seul.
    — Non. Je l’ignorais.
    — Sais-tu que les Sarrasins considèrent que ce n’est
pas Jésus qui fut crucifié – Dieu l’aimant trop pour cela – mais
Judas. Pour d’autres c’est Simon de Cyrène – celui qui porta la croix à la
place de Jésus…
    — Non, je ne le savais pas…
    — Tu devrais pourtant te sentir concerné, petit Simon…
    Il rougit, baissa les yeux tant la puissance du regard de
Cassiopée le troublait, et demanda, pour changer de sujet :
    — Comment se fait-il que Saladin ne nous ait adjoint
qu’un seul homme, son neveu, pour nous escorter ?
    — Parce que c’est un sage, et que le Prophète a
dit : « Le meilleur nombre de compagnons est de

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