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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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qu’il n’existe pas de Vraie Croix et qu’il n’est d’autre Dieu qu’Allah.
Va !
    — Puis-je me considérer comme délié de mon
serment ?
    — Tu le peux. En attendant le jour où Dieu t’ouvrira
les yeux…
     
    Avant de partir, Morgennes fut examiné par le médecin
personnel de Saladin : Moïse Maïmonide. Celui-ci avait fui Cordoue, où les
persécutions des Almohades à l’encontre des Juifs – dont il était l’un des
plus éminents représentants – se faisaient de plus en plus violentes.
Depuis, il était resté auprès du sultan.
    Moïse venait de soigner Simon. Il avait appliqué sur sa
blessure un électuaire qui, assurait-il, le remettrait complètement sur pied
d’ici « le coucher du soleil ». « Quant aux énormes bosses qu’il
a sur le front, elles finiront par se résorber d’elles-mêmes. » Il se lava
les mains dans une bassine d’eau claire.
    — Enfin, ajouta-t-il en se tournant vers Morgennes pour
l’examiner, il est heureux que ce jeune homme sache aussi mal se servir d’un
couteau. J’espère pour vous qu’il en fera meilleur usage contre ses ennemis.
Quoique, tout bien considéré, je n’en vois pas l’avantage… Ses ennemis étant
après tout mes amis…
    Morgennes étudia le vieil homme, ne quittant pas des yeux
ses mains tavelées qui couraient comme des gazelles sur son épiderme, le
palpant çà et là, appuyant sur un côté, pressant un bout de chair entre le
pouce et l’index, pinçant la peau afin de mesurer la façon dont elle marquait,
l’examinant si bien qu’il avait l’impression d’être un livre dont Maïmonide
tournait les pages, à la recherche de son âme.
    — Tout va bien ! fit le vieux Juif en donnant à
Morgennes une tape sur la joue, comme s’il eût été un enfant. Hormis cette
vilaine blessure à l’œil, mais qui a été très bien soignée, ces marques de
brûlure au visage – qui ont d’ailleurs fort bien cicatrisé – et ces traces
de coups – communes chez les soldats de votre âge –, vous êtes en
excellente santé. Bien des jeunes ne peuvent en dire autant Vous vivez à
reculons : on dirait que l’âge vous rajeunit. Profitez-en, c’est un don
rare… Vous pouvez vous rhabiller.
    Morgennes le regarda, stupéfait que le vieillard n’eût rien
vu. Était-ce à cause de son âge ? Maïmonide n’avait, à vrai dire, qu’un
peu plus de cinquante ans ; ce qui était âgé, certes, mais guère plus que
Morgennes.
    — Combien de temps me reste-t-il ? demanda celui-ci.
    — Vous reste-t-il ? Mais je ne sais pas, moi,
maugréa le vieil homme. Pour quoi faire d’abord ?
    — Combien de temps, reprit Morgennes sur un ton qui se
voulait impérieux, me reste-t-il avant que la lèpre ne se déclare, et
n’envahisse mon corps…
    — La lèpre ? Quelle drôle d’idée, grommela
Maïmonide sans paraître avoir rien remarqué de la froide condescendance de
Morgennes. Je vous assure que vous êtes en parfaite santé. J’ai bien vu en
effet quelques taches brunes qui sont d’anciennes traces de la lèpre, mais vous
êtes, fort heureusement, entièrement guéri. C’est même miraculeux ! Vous
devriez remercier Dieu (loué soit-il)…
    — Mon pouce, dit Morgennes. Regardez, j’ai perdu
l’ongle du pouce de la main droite.
    — Ce n’est rien, le rassura Maïmonide. Une blessure que
vous vous serez faite en tirant l’épée du fourreau. Regardez : il se
reforme déjà. Et puis, dit-il en lui prenant la main, voyez vos autres
doigts : l’ongle est solide, brillant, avec une belle demi-lune à la
jointure de la peau.
    Le vieux médecin lui lâcha la main et – percevant
l’inquiétude de Morgennes – l’interrogea :
    — Vous n’avez pas de raison de l’avoir attrapée de
nouveau ?
    — Je l’ignore, dit Morgennes, qui n’osait parler de la
perte de Crucifère.
    — Allons, vous devriez le savoir… Avez-vous été mis en
contact avec du sang, des humeurs ou du pus de personnes ayant elles-mêmes la
lèpre ?
    — Non.
    — Avez-vous été récemment dans une mésèlerie ?
    — Non plus.
    — Pensez-vous avoir été empoisonné ? Avez-vous bu
de l’eau d’un puits contaminé ?
    — Je ne crois pas.
    — Alors tout est bien, conclut Moïse Maïmonide. Vous
l’avez eue, c’est certain. Mais vous ne l’avez plus. Et on n’a jamais vu de cas
où le mal de lèpre revenait de lui-même après être parti… D’ailleurs, on a vu
très peu de cas de guérison. Mais vous,

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