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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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quatre. »
     
    Ils chevauchaient depuis plusieurs heures quand Taqi revint
vers eux au grand galop, dans un nuage de poussière. Il les interrogea :
    — Avez-vous bu suffisamment ?
    — Oui, répondirent-ils en chœur.
    — Alors, allons-y !
    D’un geste, il leur désigna une vaste bande de sable
brûlant, derrière laquelle brillait, telle une émeraude dans un nombril, une
douce lueur verte.
    — L’oasis des Moniales ! déclara-t-il
pompeusement. On ne la voit qu’à certaines heures, peu avant le coucher du soleil.
Ce soir, je ne prierai pas : nous n’avons pas le temps. Si nous perdons de
vue cette lumière, nous sommes morts.
    Il éperonna vigoureusement les flancs de son cheval et
s’élança dans le désert. Il disparut bientôt derrière une dune, où les autres
le suivirent.
    Il fallait, pour avancer, fixer le joyau à l’autre bout du
désert. Il s’inscrivait dans leur champ de vision comme le but ultime, celui
que vise l’archer quand il décoche sa flèche. D’ailleurs, Morgennes se sentait
à la fois trajectoire, arc, flèche et cible, tant il était tendu vers cet
unique objectif : retrouver Crucifère, en finir avec ces aventures,
pouvoir enfin se reposer.
    Une joie immense s’éleva en lui. « Mon Dieu,
pardonnez-moi d’avoir douté ! » Il lui semblait, en effet, que Dieu
lui permettait de retrouver à la fois la Vraie Croix, la quiétude et Crucifère.
    Alors que la soif commençait à les tenailler – mais ils
n’osaient pas encore boire, pas avant d’être ou perdus ou arrivés –, les
contours d’une oasis apparurent. Ils tremblaient dans l’air comme un mirage,
menaçant à chaque instant de disparaître. Pourtant, ils restèrent là, stables
et fiers, posés dans la lumière déclinante du soir tel un monument de
fraîcheur, un endroit à part, hors du temps et de la vie.
    Cette oasis des Moniales, ainsi que Fémie l’avait nommée,
était d’après Taqi les restes de Gomorrhe ; d’autres disaient qu’elle
n’était rien que l’oasis des Moniales, maintenant réduite à l’essentiel :
une immense crevasse bordée de palmiers blancs. À moins qu’il ne s’agît de
l’antique Ctésiphon, qu’avaient détruite, peu après la mort de Mahomet, des
cavaliers chargés de répandre Sa parole. Elle aurait donc été jadis la capitale
de l’ancien Empire parthe, anéantie parce que sa beauté faisait de l’ombre à Babylone.
Les Parthes l’avaient fondée plus de sept cents ans auparavant. C’était l’une
des plus belles, l’une des plus anciennes cités que l’Histoire eût connue. Tout
cela n’était plus. La ville avait été pillée, abandonnée, puis était tombée à
l’état de ruine, avant d’être oubliée.
    Jusqu’au jour où Saladin avait appris qu’une reine y avait
établi son royaume, et que ce royaume, chrétien, était celui de femmes. Il y
avait envoyé une armada d’espions dont un seul était revenu, mais cela lui
avait suffi pour apprendre qu’elles y menaient une vie de discipline, qui
ressemblait beaucoup à celle des moines soldats du Temple ou de
l’Hôpital ; et que les hommes étaient bannis de leur royaume – sauf
quand il s’agissait de remplacer l’une d’elles, morte au combat. Des raids
étaient alors menés à l’extérieur, afin d’y capturer les plus
« athlétiques » des mâles pour les donner en « pâture » aux
plus belles d’entre elles.
    Saladin s’était dit que ses espions n’auraient pas à se
plaindre, au moins dans un premier temps, du sort qui leur serait réservé par
Zénobie, la reine des Amazones. Ensuite, ce serait une autre paire de manches,
puisqu’elles n’étaient pas réputées tendres : après avoir copulé, elles
arrachaient avec leurs dents les testicules des mâles qui les avaient fécondées
et les réduisaient en esclavage ou les envoyaient se perdre dans le désert.
    Après avoir promu l’unique rescapé de ses espions au rang de
chef des eunuques, Saladin envoya chez les Amazones le cadi ibn Abi Asroun à la
tête d’une ambassade puissamment armée. Le cadi était porteur d’un message
avertissant les Amazones que, si elles ne se comportaient pas en tous points
comme les gens du Livre – en dhimmis –, et s’obstinaient à refuser
d’acquitter l’impôt, le sultan se verrait dans l’obligation d’anéantir leur
royaume.
    Zénobie répondit avec une caravane de cinquante chameaux,
chargés d’or et de pierres précieuses ; ainsi que la promesse

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