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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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fixer avec des yeux où se lisait un désespoir sans nom. Et elle aussi, elle parla, d’une voix lente et dolente.
    – Regarde-moi, Jean-François ! Je suis la mère de Bertille… Bertille à cause de qui tu n’oses frapper l’hérétique, le paillard, l’excommunié… parce qu’il est son père !… Fou ! triple fou !… Je suis ici, moi, damnée dans les tourments de l’enfer, à cause de lui, par lui !… Parce qu’il m’a déshonorée, parce qu’il est le père de mon enfant, grâce au plus odieux, au plus lâche des crimes, parce qu’il m’a prise enfin par force et par violence. Est-il possible de tenir compte d’une telle paternité ? Et si je suis ici, moi, c’est parce que le maudit est cause que je me suis tuée !… Comprends-tu, Jean-François ?
    La damnée fit une pause comme si elle avait attendu une réponse et elle reprit d’une voix lamentable :
    – Non, on ne peut le considérer comme un père, et ma fille le méprise et l’exècre !… Moi, Jean-François, j’avais espéré que tu me vengerais, que tu nous vengerais tous. Et cela eût adouci nos tourments. Mais tu es lâche, tu n’oses pas, tu recules, et je te maudis, nous te maudissons tous, nous ses victimes !… et tu seras des nôtres, Jean-François, puisque tu as peur !
    Et Ravaillac, les cheveux dressés, emporté par l’épouvante, hurla :
    – Je frapperai ! j’en jure Dieu et la Vierge ! Je ne savais pas, moi ! Je croyais bien faire ! Mais puisqu’il n’est son père que par suite d’un crime… il est condamné !…
    Au même instant, un sourd grondement se fit entendre. L’infernale vision s’évanouit. La fulgurante clarté s’éteignit brusquement, le brasier disparut, le mur reprit sa place, la lueur blafarde perça péniblement à travers les vitres de l’imposte réapparues.
    Ravaillac, debout, au milieu de la petite pièce, se demanda s’il n’avait pas rêvé. Mais la chaleur étouffante qui régnait encore, mais le mur brûlant sur lequel il alla poser la main, attestèrent qu’il n’était pas le jouet d’une illusion. Et d’ailleurs il était debout, il allait, il venait, il voyait le moine étendu sur son lit. Et précisément, comme pour mieux lui prouver qu’il était bien éveillé, Parfait Goulard parla. Il lui dit avec un reste d’aigreur :
    – Eh bien, en as-tu fini avec tes imaginations ? Vas-tu te reposer enfin ?
    – Non, mon frère, répondit doucement Ravaillac, je vais prier.
    – Prie, si tu veux, mais ne beugle pas ! Dieu n’est pas sourd. Sans répondre, Ravaillac se mit à genoux et pria, comme il l’avait dit, avec plus de ferveur que jamais.
    L’insupportable chaleur disparaissait peu à peu. Maintenant une agréable fraîcheur régnait dans la chambre. Des bouffées de parfums très doux arrivaient on ne savait d’où. L’angoisse et la terreur qui étreignaient le malheureux prosterné sur le parquet faisaient place à un bien-être délicieux.
    Et tout à coup, les sons d’une musique céleste arrivèrent jusqu’à son oreille charmée, mystérieux et lointains. Il redressa sa tête extasiée. Une fois encore, il se trouvait plongé dans les ténèbres épaisses. Une fois encore, un frisson l’agita. Mais cette fois-ci, le frisson était très doux.
    Brusquement le mur disparut de nouveau. Une lueur pâle, tamisée éclaira la chambre. Il s’approcha les mains jointes. L’abîme insondable et infranchissable était encore là. Mais plus de brasier ardent. A la place, des plantes et des fleurs, comme il n’en avait jamais vu de pareilles. Et ces plantes et ces fleurs embaumaient l’air de parfums d’une douceur enivrante.
    Il leva les yeux et tomba à genoux, ébloui, fasciné, les traits animés d’une joie puissante qui le transfigurait.
    Là-bas, très loin, mais très visible, sur un trône d’or, Dieu lui-même, tel qu’il l’avait toujours vu représenté dans les missels et dans les tableaux qui ornaient les églises. A la droite de Dieu, un siège vide. Autour de lui, des anges, d’une beauté irréelle, allaient et venaient en chantant. Et des orgues, des harpes, des violes les accompagnaient en sourdine.
    Chacun de ces anges, vêtus de longs voiles de soie flottants, avait une auréole d’or autour de la tête et chaque auréole portait un nom. Depuis saint Clément – qui paraissait jouir d’une vénération toute particulière – en passant par saint Jean Chastel, tous ceux qui avaient essayé d’attenter

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