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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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le sourd ronronnement des flammes, il sentait l’anormale chaleur, comme s’il marchait sur une plaque chauffée à blanc. N’importe, il voulait récuser le témoignage de ses sens. Il voulut, à tout prix, se persuader qu’il était le jouet d’une hallucination.
    Et il courut au lit de Parfait Goulard ; il l’étreignit de toutes ses forces, et d’une voix tremblante, il bégaya :
    – Là !… là !… ne voyez-vous pas ?…
    – Je vois le mur.
    – Non !… Une lueur aveuglante !
    – Tu es fou ! C’est à peine si on se voit ici.
    – Ne voyez-vous pas le feu ?… Ne sentez-vous pas que nous brûlons ?
    – Je sens qu’il fait très chaud, en effet… C’est l’orage.
    – C’est l’enfer !… C’est le feu de l’enfer !… Et si vous ne voyez rien, si vous ne sentez rien, c’est que moi seul, je suis damné !…
    Tout ceci avait été dit avec une volubilité et une angoisse sans cesse grandissantes chez Ravaillac et s’était terminé dans une sorte de râle affreusement désespéré. Chez le moine, avec un calme nuancé d’un peu d’étonnement inquiet. [25]
    Lorsque Ravaillac eut prononcé ces dernières paroles, le moine se secoua furieusement, s’arracha à son étreinte et cria avec colère :
    – A tous les diables d’enfer, le fou qui m’empêche de dormir avec ses imaginations !…
    – Je vois ! hoqueta Ravaillac, je sens ! je brûle !… C’est l’enfer, vous dis-je !
    Rageusement, le moine se leva. Il prit Ravaillac par la main et le conduisit à l’endroit où jaillissaient les flammes. Il leva cette main et l’appliqua contre un obstacle imaginaire en disant d’un air bourru :
    – Tu vois bien qu’il n’y a rien là, autre que le mur ! Ne le sens-tu pas ?
    – Je sens que je brûle ! hurla Ravaillac… Je vois un abîme sans fond, une fournaise ardente, infranchissable !
    Et c’était vrai, ce qu’il disait. A la place où se dressait le mur qui avait bien réellement disparu, il y avait maintenant une fosse. Cette fosse était extraordinairement profonde, d’une longueur égale à la pièce où se tenaient les deux hommes, et large de deux bonnes toises. Et le fond de cette fosse était une fournaise ardente. Et cela constituait bien un abîme de feu infranchissable, comme l’avait dit Ravaillac.
    Le moine cependant, haussa les épaules et gronda :
    – Ah ! mais vous m’excédez, monsieur Ravaillac !… Vous feriez mieux de vous coucher. N’oubliez pas que vous vous mettez en route demain matin et que vous aurez à couvrir une longue étape.
    Ravaillac avait reculé jusqu’à la porte et de là, il contemplait la fournaise d’un air hébété. A ce moment, un coup de tonnerre formidable ébranla la pièce. Il eut un sursaut de terreur et haleta :
    – Avez-vous entendu ?
    – Je n’ai rien entendu… parce qu’il n’y a rien, que dans votre stupide imagination, tonitrua Goulard exaspéré. Par la barbe du Saint-Père, si vous ne voulez pas vous coucher, libre à vous. Mais ne m’assommez pas avec vos sottes imaginations. J’ai besoin de repos, moi, puisque j’ai promis de vous accompagner !
    Et le moine se jeta sur son lit et rabattit son capuchon de l’air d’un homme qui ne veut plus rien voir et rien entendre.
    A ce moment, des voix, qui paraissaient très lointaines, et qui cependant étaient très distinctes, se mirent à crier :
    – Jean-François ! Jean-François ! Es-tu là ?…
    – J’y suis ! hoqueta le malheureux, à moitié fou de terreur.
    – Regarde, Jean-François !… Ecoute !… Voilà ce qui t’attend, puisque tu es trop lâche pour frapper le tyran !… Tu seras à nous !… Tu viendras avec nous !…
    Et alors là, dans cette fournaise, au milieu des flammes rouges, vertes, violettes, il vit un grouillement d’êtres aux masques grimaçants, courant, bondissant, hurlant, se tordant en des spasmes de douleur. Et c’était une vision d’horreur et de cauchemar, dont il ne pouvait détacher ses yeux exorbités. Et tous, les uns après les autres, avec des ricanements sinistres ou menaçants, les griffes tendues vers lui, tous, ils criaient :
    – Viens !… Viens avec nous !… Tu seras des nôtres !
    Puis tout cela disparut, s’évanouit, comme balayé par quelque souffle mystérieusement puissant. Et il ne vit plus qu’une femme, jeune, belle, au visage doux, infiniment triste. Et du milieu de la fournaise où elle s’était arrêtée, elle paraissait le

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