Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le granit et le feu

Le granit et le feu

Titel: Le granit et le feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
messire !
    — Ici, Ogier !
    Champartel et le Tolédan ! Ils l’attendaient en bas du fossé.
    — Nous avons mis une échelle.
    Cette échelle, Ogier ne la vit pas. « Sainte Vierge ! », pensa-t-il, en parvenant au bord de la contrescarpe.
    Il sauta et roula parmi les morts, cependant que des traits sifflaient autour de lui.
    — Ah ! Ogier, dit Pedro del Valle… Arriba  !… La jetée brûle… Quand le beffroi a éclaté, des tisons sont tombés dessus !
    — Hâtons-nous, messire, hurla Champartel : ils sont là ! Ils nous cherchent.
    De nouveau, des traits de toute espèce jaillirent des créneaux et des archères. Le forgeron courut en direction de la poterne, suivi de Pedro del Valle et d’Ogier. Ils longeaient la muraille où leurs ombres dansaient. Ils trébuchaient parfois sur des corps et des armes. Heurtant une échelle rompue, Ogier tomba. Sa main s’enfonça dans quelque chose de mou et de putride : un ventre. « Merdaille de merdaille : je suis tout embrené ! » Il entendit Guillaume hurler :
    — Ah ! c’est toi Champartel… Mon neveu ?
    — Il suit avec l’armurier.
    Debout… Courir, Confiance à la main… Ne pas la lâcher, même si elle le gênait.
    — Là ! Là ! crièrent des hommes.
    Une rafale de sagettes se fracassa sur les pierres, quelques pouces au-dessus de la tête d’Ogier. Le Tolédan grogna :
    — Ils m’ont eu !
    Ogier l’attrapa par la taille, le soutint, le tira.
    — La poterne, dit-il.
    Ils s’engouffrèrent dans l’ouverture.
    La herse aux barreaux plus gros que des baliveaux tomba dans son logement de granit, et l’épais battant de fer réintégra son chambranle.
    — Tu nous as fait peur ! s’exclama Guillaume.
    Ogier s’adossa à la muraille.
    — Pedro est-il bien empoint ?
    — Non, répondit Blanquefort.
    Il brisa une flèche sur son genou :
    — Je viens de la lui sortir de l’épaule.
    Près du sénéchal, un porte-feu, Philippe, agitait sa torche. Champartel riait :
    — On les a eus !… On les a eus !… Vous avez vu ?… Boum !… Patatrac ! Dieu soit loué !
    Il avait une vaste entaille au front et une joue poisseuse de sang.
    « Un fèvre, lui ? songea Ogier. Il a tout d’un bon écuyer… Peut-être mieux encore !… Il m’a attendu au péril de sa vie ! Et del Valle également ! »
    Il demanda, en essuyant, contre sa hanche, sa main gantée de pourriture :
    — Haguenier ? L’as-tu perdu de vue, Thierry ?
    — Il est mort… Je l’ai vu tomber alors qu’il portait secours à Roudouleux… Le premier une sagette, l’autre un coup d’épée.
    — Renaud ?
    — Il vous a précédés de beaucoup, dit Guillaume. Et il était si pantelant qu’après avoir franchi cette porte, il s’est pâmé comme une pucelle. Je ne sais où il est parti.
    — Un couard ! dit Champartel. Sitôt que la meschéance [127] a tourné mal, très mal, il a guerpi. Il a même laissé l’armurier s’occuper seul des bestiaux.
    Ogier estima inutile d’en dire davantage. Le jugement du forgeron s’accordait au sien. Il demanda :
    — Et Jean ?
    — Je suis là ! Je vous sais bon gré de vous soucier de moi… Ah ! là là, vous avez vu comment on les a eus !
    — Il a une navrure à un bras, commenta Blanquefort. Sitôt ici, il s’est inquiété pour toi.
    — Mille grâces, compagnon ! dit Ogier en s’inclinant.
    — Montons ! décida Guillaume.
    Derrière Philippe, ils gravirent les marches de l’escalier à vis et débouchèrent dans la haute cour où des cris de joie partant des fenêtres et des murailles les accueillirent.
    Un petit groupe attendait sur le perron du donjon. Une forme blanche s’en détacha et courut au-devant d’Ogier.
    — Tu es vivant !… Vivant, beau cousin.
    Ah ! comme elle était heureuse. Il était enveloppé dans une étreinte nerveuse et tiède. Tancrède riait, pleurait et semblait ne pas s’apercevoir qu’il puait. De sa part, il n’aurait jamais cru possible une joie aussi franche et complète. Sa juvénilité, son ardeur éclataient si violemment, dans cette nuit finissante, qu’il en eut presque honte pour elle.
    — En vérité, Dieu a été bon, commenta Guillaume tout en séparant, d’un geste prompt, sa fille de son neveu. Car, je l’avoue, je n’espérais pas une telle déconvenue pour Canole… Je me disais que si les flammes mangeaient à moitié son beffroi, ce serait suffisant. Allons, fille, laisse ton cousin souffler.
    Le

Weitere Kostenlose Bücher