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Le granit et le feu

Le granit et le feu

Titel: Le granit et le feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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laissant seul devant les malandrins.
    — Le couard !… L’immonde couard !
    — Laissez-m’en un ! cria Pedro del Valle.
    Ogier voyait flamboyer le beffroi derrière son adversaire.
    « Ils sont là, maintenant, mais sans eau, ils ne peuvent maîtriser tout ce feu. »
    Soudain, dans un vacarme d’orage au ras du sol et des zébrures d’or foudroyantes, le colosse vola en éclats, répandant autour de lui une grêle de déchiquetures incandescentes. Des madriers à peine consumés, des chevrons écarlates, des miettes de boiseries épargnées par les flammes, tombèrent et rebondirent sur le sol, assommant des Goddons, en effrayant d’autres et dispersant les bœufs qu’ils avaient refoulés.
    « La poudre !… La poudre de Lordat !… Ce que le feu ne pouvait accomplir, eh bien, elle l’a fait… Leur chas est mort ! Ruiné ! »
    Tout en riant, le damoiseau repoussait avec un plaisir fou la lame adverse. Dès l’instant qu’il avait réussi à terrasser le monstre, tout lui devenait possible.
    D’un coup d’œil, il évalua son homme : un barbu, la tête couverte d’une cervelière sarrasine, le torse enveloppé d’un tabard templier : Barbiéri. Il maniait habilement une alfange.
    « Tu vas souffrir, Italien ou Sicilien… Crapule ! »
    Il vaincrait. Il ne périrait pas dans cet engagement, et cette assurance, maintenant, procédait d’une certitude dont il reconnaissait l’effronterie : il était trop jeune, trop beau pour faire un mort.
    — Tu ne pourras fuir comme ton compère, damoiseau !… Tu ne reverras pas les tiens !
    Ogier rompit, rompit encore, cherchant le coup. À reculer pour prendre ses distances et frapper net et fort, il buta d’un talon contre un corps – Escrive ? – et chut à la renverse. En hurlant de plaisir, le malandrin bondit.
    Ogier roula, échappa de peu à la lame sifflante, repoussa un taillant et fut debout.
    — Messire ! hurla de loin Champartel, ils arrivent ! Voulez-vous mon aide ?
    Que faisait-il là ? Pourquoi n’était-il point dans le fossé ? Sa générosité pouvait lui coûter la vie !
    Des bœufs couraient lourdement dans les décombres rutilants et certains ruaient comme des chevaux affolés. Une pluie de sagettes et de carreaux siffla.
    « Ils tirent des murailles… Il était temps ! »
    Parmi les routiers qui progressaient sur plusieurs rangs en criant :
    « À mort ! À mort ! » une dizaine tombèrent.
    — Tu vas mourir, damoiseau.
    Ogier parait, répondait aux coups, cherchant à imposer sa hâte et sa fortitude. Barbiéri était âgé, il devait pouvoir le manœuvrer.
    — Tu vas mourir, non seulement parce que tu as fait voler notre chas en morceaux, mais parce que je te maudis depuis le sac de Saint-Rémy… Tu vois, je t’ai reconnu… Nul ne regrette plus que moi, parmi nous, que Knolles t’ait fait grâce et accordé cette pute dont j’avais envie…
    « Parle ! Parle encore !… Que ton verbe t’épuise une fois pour toutes ! »
    Attaquer l’arme avant le corps ! C’était ce que lui avaient appris Vivien de Podensac et Blanquefort.
    — Je ne mourrai pas, malebouche. Ce sera toi !
    Le damoiseau répondit à une charge furieuse par une parade aussi brève que possible, contre-riposta et dégagea Confiance. Aussitôt Barbiéri redoubla, envoya quelques bourrades qu’il éluda aisément. Un bœuf passa, les séparant, et guerpit, tête basse, vers des routiers.
    — Foireux… Ne sais-tu donc que rompre ?
    Ogier sentit Barbiéri à sa portée. Fournit une estocade. Déjoua un taillant destiné à son cou. Il eut soudain la certitude que l’instant était arrivé : quand, avec un cri de rage, le routier chargea impétueusement, il gauchit [126] , et reprit l’avantage, le touchant au biceps.
    — Blanc-bec, tu m’as eu !… À moi, maintenant !
    Bien qu’il pût encore se servir de son alfange, Barbiéri se trouvait désormais désavantagé. Ogier temporisa, cherchant le coup infaillible. Enfin, sur une attaque à la désespérade, il se fendit en visant carrément la main : sa lame s’enfonça dans la croix du Temple.
    L’homme s’agenouilla en crachant sang et plaintes.
    Les routiers n’étaient plus qu’à dix ou douze pas, masse grouillante, hurlante, hérissée de lances, d’épées, de fauchards. Un nouvel essaim de sagettes et de carreaux alentit leur ardeur.
    Le damoiseau courut vers la chaussée d’où s’élevaient des fumées.
    — Ici,

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