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Le Huitième Péché

Titel: Le Huitième Péché Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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jusqu’au château fort de Layenfels. Dans la très ancienne petite bourgade de Lorch, la route nationale bifurqua dans la vallée de la Wisper bordée de riches vignobles. Puis ils arrivèrent à un croisement.
    Gonzaga, trop fier pour porter des lunettes, tenait la feuille à bout de bras.
    — Maintenant, c’est sur la gauche, dit-il d’une voix pâteuse.
    Il se mit à pleuvoir.
    — Êtes-vous certain, Éminence, que nous sommes toujours sur la bonne route ? demanda Soffici avec une pointe d’inquiétude dans la voix.
    Gonzaga ne répondit pas. Il vérifia une fois encore l’itinéraire.
    — Comment en serais-je certain ? C’est la première fois que je fais ce trajet. Cette maudite route doit bien mener quelque part, non ? finit-il par dire sur un ton peu aimable.
    Le secrétaire tressaillit, Alberto se réveilla brutalement. Constatant la maladresse de Soffici, il proposa de reprendre le volant.
    Soffici immobilisa le véhicule et coupa le moteur.
    La route escarpée, envahie par la végétation, était si étroite que Soffici et Alberto eurent du mal à sortir de la voiture pour changer de place.
    Il régnait à cet endroit le plus parfait silence, que seules venaient troubler les gouttes de pluie tombant sur les buissons.
    Tandis qu’Alberto reprenait le volant, le cardinal baissa sa vitre. Une odeur fraîche de mousse montait du sol. Gonzaga prit une grande inspiration. Un chien aboyait dans le lointain.
    — On continue ! ordonna le cardinal.
    Alberto mit le contact, mais la voiture refusa de démarrer.
    — Il ne manquait plus que ça ! s’écria Gonzaga, ulcéré, en soufflant par le nez.
    — Par la Sainte Vierge ! s’exclama Alberto qui se sentait responsable de cet incident. Ma voiture ne m’a encore jamais laissé en plan. C’est la première fois, Éminence.
    Gonzaga eut un geste agacé, puis frappa sur l’épaule de Soffici.
    Le monsignor comprit le message du cardinal secrétaire d’État. Alberto fouilla dans la boîte à gants et en ressortit une casquette qu’il tendit à Soffici.
    — Ce ne doit plus être bien loin ! lui cria encore Gonzaga par sa vitre ouverte. Au bout de quelques mètres, Soffici disparut au détour d’un virage.
    Dans de tels moments, le monsignor maudissait son patron.Ce n’était pas pour rien qu’à la curie, on le surnommait en cachette Gonzaga le Chacal. On ne savait jamais comment il allait vous traiter.
    Toujours est-il que le second du pape avait plus d’ennemis que d’amis au Vatican. Pour être plus précis : Soffici ne connaissait personne dont il aurait pu dire qu’il était un ami de Gonzaga.
    Cela n’empêchait cependant pas le monsignor de se montrer fidèle et dévoué à son patron. Pour un homme comme lui, accomplir sa mission revenait à servir le Très-Haut. Lorsque Gonzaga lui avait dévoilé son entreprise en confidence, Soffici avait sans état d’âme prêté solennellement serment d’emporter avec lui ce secret dans la tombe.
    La montée devenait de plus en plus pénible. Soffici, pas sportif pour deux sous, haletait et cherchait à reprendre son souffle. Les buissons mouillés en bordure de la chaussée lui giflaient le visage. Tout cela ne contribuait pas vraiment à améliorer son humeur.
    Soudain, après un virage en épingle à cheveux, il vit apparaître un mur à travers des branches. Soffici s’arrêta. Il était à présent trempé jusqu’aux os.
    Il leva les yeux vers le ciel et reconnut, dominant les arbres, les murailles et les tours d’une imposante forteresse.
    — Jésus Marie… murmura-t-il à mi-voix.
    Avec ses créneaux, ses tours et ses tourelles, l’édifice ne le rassurait guère. Il s’était imaginé que le château Layenfels serait plus accueillant.
    Soffici s’approcha du porche à pas hésitants. Il avisa une guérite à côté d’une porte fermée par une grille. Bien qu’il fît déjà jour, une lumière brillait derrière la minuscule fenêtre de la petite maison du gardien. Tout ceci renforçait l’impression menaçante et mystérieuse que dégageaient ces lieux. Soffici avait du mal à croire que cette forteresse, perchée au-dessus du Rhin, pouvait réellement servir les desseins auxquels Gonzaga avait fait allusion.
    Aucun son ne franchissait les murailles du château, pas une voix ni un bruit de pas, rien. Soffici se mit sur la pointe des pieds pour regarder par la fenêtre : la minuscule pièce ressemblait à une cellule de moine. Des murs nus, une table rustique,

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