Le Huitième Péché
continuaient à suivre des yeux la signora , elle se mit à raisonner :
— Mais alors, cela signifierait que cette personne a pénétré dans l’appartement de Marlène.
Malberg haussa les épaules.
— Le fait qu’elle se promène ici en prenant des allures de grande dame laisse en tout cas supposer qu’elle a encaissé une coquette somme en échange de son silence.
— Tu crois qu’elle peut connaître les circonstances de la mort de Marlène ?
— Il ne serait pas absurde de le penser, n’est-ce pas ?
La signora Fellini flânait apparemment sans but précis. Elle errait dans le marché sans rien acheter. Elle allait tantôt à gauche, tantôt à droite pour revenir finalement à l’endroit où Malberg l’avait découverte. On aurait pu penser qu’elle s’efforçait de semer d’éventuels poursuivants.
Tout à coup, après avoir jeté un regard à sa montre, elle pressa le pas et quitta le Campo dei Fiori pour se diriger vers la Piazza Farnese. Elle passa à droite des deux fontaines qui ornent la place pour continuer directement vers le Palazzo dans lequel se trouve l’ambassade de France.
Puis elle fit tranquillement les cent pas à l’ombre de l’imposant édifice, comme si elle attendait quelqu’un.
Cachés derrière une des fontaines, Caterina et Lukas l’observaient. Au bout de dix minutes, la signora Fellini sembla s’impatienter. C’est à cet instant qu’un homme en vespa survint. Il portait un jean, un tee-shirt rouge et un casque noir avec une visière en plexiglas. Il semblait avoir tout son temps. Il mit très calmement son engin sur sa béquille et s’approcha de la signora tout en défaisant la bride de son casque. Elle s’adressa à lui, lui reprocha vivement, semblait-il, son retard. Elle finit par tirer avec précaution une enveloppe de son sac pour la remettre à l’inconnu.
— Étrange, dit Malberg sans regarder Caterina. Tu ne trouves pas ?
— Oui, plutôt, répondit celle-ci, les yeux rivés sur la scène qui se déroulait devant eux.
L’homme ouvrit l’enveloppe et donna l’impression de compter des billets de banque. Mais la somme ne semblait pas le satisfaire. Dans un geste de colère, il froissa l’enveloppe et la mit dans la poche droite de son jean. C’est à cet instant qu’il enleva son casque d’un geste brusque et se mit à invectiver la femme.
— Luuuukas ? (La voix de Caterina était totalement désemparée.) Luuukas ! Dis-moi que ce n’est pas vrai.
Elle serrait la main de Malberg à lui broyer les doigts.
— Mais c’est Paolo ! s’exclama Malberg, sidéré. C’est ton frère !
Caterina s’agrippait à Malberg, elle enfouit son visage contre sa poitrine.
— Il me semble que tu me dois une explication, remarqua Malberg avec aigreur.
Caterina le regarda avec de grands yeux écarquillés.
— Lukas, je suis aussi étonnée que toi. Tu ne penses tout de même pas…
— N’essaie pas de me faire croire que tu n’étais pas au courant du double jeu que jouait ton frère !
La voix de Malberg trahissait une grande colère. Caterina sursauta.
— Par la Sainte Vierge et tout ce qui m’est sacré, je ne savais pas qu’il était de mèche avec cette femme. Je ne sais même pas ce que tout cela signifie. Paolo est une petite frappe, mais pas un assassin !
Caterina se détourna. Elle avait les larmes aux yeux.
Malberg resta impassible.
— Tu sais ce que cela signifie, dit-il. Quelles que soient les personnes qui se cachent derrière ces assassins, elles étaient toujours très bien informées sur le moindre de mes pas. La chambre prétendument si sûre, dans la pension Papperitz, ce n’était qu’une duperie. Il y a même sans doute un dispositif d’écoute dans la pièce. Et la manière dont Paolo a joué les ignorants, lorsque nous cherchions une entrée dans l’appartement de Marlène, révèle ses grands talents d’acteur ; nous devrions aller féliciter ton frère pour ce morceau de bravoure !
— Comment peux-tu être aussi injuste ? Ne me rends pas responsable du fait que Paolo a mal tourné !
— Ton frère qui m’aime tant… C’est bien ce que tu m’as dit, n’est-ce pas ?
Malberg ne décolérait pas. L’idée que Caterina ait pu aussi l’abuser le mettait en fureur.
— Tu partages avec ton frère le même appartement, vous vivez ensemble, comme un couple, et tu veux me faire croire que tu ignorais tout ? Tu veux vraiment que je gobe ça ? Tu ne trouves pas que
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