Le Japon
siècles ; on y trouve également d’autres restes d’animaux consommés (canards sauvages, poissons, cervidés, etc.). Ils prouvent que les groupes étaient présents à l’année sur des aires relativement limitées.
La poterie, déjà discrètement présente au début de la période, alors que le mode de vie était sans doute encore nomade, devient une donnée archéologique extrêmement abondante à partir du IV e millénaire. Quant à l’habitat, et les bâtiments de type semi-enterré qui se développent dans l’est de l’archipel, il peut être fort dense, au point qu’on peut presque parler de « villages ». Ainsi en est-il du site de San.nai Maruyama (fin IV e -fin III e millénaire), tout au nord-est de Honshû. On y observe des sortes d’îlots, gravitant autour d’une « place » centrale. À côté de l’espace domestique que constitue la maison semi-enterrée, un certain nombre de bâtiments imposants, à vocation probablement collective, apparaissent : lieu de stockage (silos enfouis) ou lieu dédié à la « production » de biens domestiques (vannerie, laque, « traitement » des marrons et des glands). Enfin, un espace funéraire, intégré à ce lieu de vie, est organisé et réparti le long des chemins d’accès reliant les différents « îlots » au cœur du « village ».
Les milliers de sites recensés par l’archéologie japonaise laissent entendre que, en près de quatre mille ans, les sociétés de la période Jômon atteignent un niveau decroissance très élevé que seule l’absence d’agriculture empêcherait de qualifier de « néolithique ».
Cette croissance concerne surtout les régions de l’est et du centre-est de l’archipel (comme dans le cas de Nagano). Ce sont aussi ces régions qui sont le plus concernées par le regroupement de l’habitat en villages, les dispositifs d’ensilage pour le stockage des fruits de la collecte (châtaignes, marrons et glands), l’exploitation forestière raisonnée et la mise en place d’une « forêt de châtaigniers » (la concentration de châtaigniers autour des grands sites d’habitat montre que la forêt d’origine a été éclaircie par la main de l’homme pour que les châtaigniers y prennent davantage de place).
Ainsi donc c’est l’absence d’agriculture qui fait du Jômon un cas « à part ». Avec cette dernière, la civilisation Jômon aurait pu être comparable avec les autres sociétés, de l’Atlantique au Pacifique, où se mettaient progressivement en place des dynamiques agricoles.
Pourtant, ce n’est pas par absence d’espèces végétales domestiquées ou susceptibles de l’être, ou pour avoir méconnu l’aspect technique de l’agriculture que les sociétés du Jômon demeurèrent en dehors d’une économie de production généralisée. En effet, l’archéologie a mis en évidence que des espèces cultivables étaient connues très tôt des populations qui peuplaient l’archipel, probablement vers 3000 avant notre ère : l’orge, le panic (graminée cultivée comme céréale ou comme plante fourragère) ainsi que deux variétés de millet ou le sarrasin, plus tard. Le riz, quant à lui, apparaît au II e millénaire dans le grand ouest de l’archipel. Mais de toutes les espèces, ce sont les fabacées (haricots mungo et haricots azuki) qui sont le plus souvent repérées, ainsi que la perilla , une plante toujours utilisée aujourd’huicomme condiment. Toutes ces plantes sont bien des espèces domestiques.
Plusieurs arguments peuvent mettre en cause l’existence d’une véritable agriculture. D’une part, les traces archéologiques sont relativement discrètes et ne sont pas proportionnelles à l’importance des principaux sites repérés.
D’autre part, ce qui frappe dans la répartition et la nature de ces espèces domestiquées, c’est que celles qui auraient permis de bâtir une économie de production (telles que l’orge, le millet, le sarrasin) sont en nette infériorité face aux haricots et, surtout, à la perilla , cette dernière étant très représentée. Il est en effet difficile de croire à l’existence d’une économie vivrière fondée sur la culture d’une plante condimentaire.
Lorsqu’une espèce fait son apparition dans l’archipel, c’est souvent pour disparaître peu de temps après, sans forcément être remplacée, et réapparaître en une autre région, pour en disparaître à nouveau. Ce qui conduit d’ailleurs à
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