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Le peuple du vent

Le peuple du vent

Titel: Le peuple du vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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l’autre jour ? grommela-t-elle.
    — Il le fallait, Bertrade.
    — Et aujourd’hui, faut encore ?
    — Oui. J’ai besoin de vos lumières. Depuis combien de temps vivez-vous ici ?
    — Oh, depuis toujours, messire, j’y suis née ! Et puis, j’suis plus très jeune mais pour vous dire combien, j’sais point trop, j’sais pas mon âge, savez. Vaut mieux pas.
    Elle riauda et, à sa nervosité, Hugues comprit combien elle était inquiète.
    — Vous avez connu le père de Serlon : Richard de Pirou ?
    — Oui.
    — Et Guillaume de Pirou, son frère aîné ?
    — Euh, Guillaume... Celui qu’est mort trop tôt, noyé. On meurt beaucoup noyé par ici. On parle pas des morts, savez, ça porte malheur. Les chandeliers et le calice, c’est lui qui les a offerts à Baptiste pour honorer saint Laurent.
    — Vous avez aussi connu leurs enfants ?
    Avait-elle compris où il voulait en venir ?
    — Oui, j’ies ai élevés, fit-elle. J’suis longtemps restée nourrice, savez, même que maintenant alors que ça fait bien des lunes que j’ai plus de lait, on continue à m’appeler la nourrice !
    — Tous les trois ?
    — Serlon et Muriel et leurs enfants aussi.
    Elle le regardait en dessous et il comprit qu’il aurait du mal à tirer autre chose d’elle.
    — J’ai entendu parler d’un autre enfant, insista Hugues, un fils né de Guillaume de Pirou.
    — Ah, oui ! C’est de Robert que vous voulez parler. J’m’en souviens pas bien. L’est parti quand il était petit.
    — Parti où ?
    — J’sais pas.
    Elle se leva :
    — J’peux, messire ? Le seigneur y serait pas content si me voyait assise à raconter ma vie au lieu de travailler. Déjà qu’il est pas facile...
    — Allez-y ! Ah, au fait, ce frère Aubré, vous le connaissez bien ?
    Elle se troubla, puis répondit très vite :
    — Non, pas plus que ça.
    — Je vous ai souvent vue en sa compagnie.
    — Rapport qu’y pouvait pas aller en cuisine, j’iui apportais sa mangeaille. L’est bien gentil et aidant.
    Le maître d’armes et Tancrède venaient d’entrer, la vieille en profita pour s’esquiver.
    — Vous m’avez mandé, messire ?
    — Oui, maître Jehan. J’ai besoin de vos lumières pour ceci.
    Hugues lui tendit les pointes de flèches.
    — J’aurais pu questionner votre forgeron, mais je me suis dit que vous seriez à même de me répondre.
    L’homme examina les traits.
    — Viennent d’ici, fit-il au bout d’un moment. Voyez, notre forgeron aime laisser sa marque...
    Il pointa l’ongle sur un détail au bout du manchon de métal :
    — ... ce petit trou.
    Et effectivement, Hugues aperçut une marque identique sur les trois dards.
    — Qui peut se procurer ces armes hormis les soldats du château ?
    — Faut être honnête, la salle des plaids est ouverte et les faisceaux de lances et de flèches y sont entreposés. Toutes les personnes qui connaissent le château.
    — Je le pensais aussi. Y a-t-il des gens qui braconnent ?
    — Oui, mais on veut pas le savoir. Y a des garçons d’écurie, Till par exemple, c’est un bon archer. C’est souvent lui qui chasse les perdreaux pour la table et aussi un peu pour sa mère. Tant que le seigneur y laisse faire...
    — Je comprends.
    L’Oriental s’était tu.
    — Vous avez encore besoin de moi ?
    — Non, merci.
    Bertrade avait fini de revêtir le corps, elle rabattit le linceul et, sans demander son reste, emboîta le pas au maître d’armes.
    — Me voilà à nouveau bredouille, murmura Hugues. Tancrède !
    Le jeune homme, qui regardait les cadavres d’un air morose, sursauta.
    — Savez-vous si le guet a aperçu la troupe de Serlon ?
    — Oui, alors que je revenais avec le maître d’armes, j’ai entendu sonner leurs trompes.
    — Nous allons devoir le prévenir de la mort de son beau-frère et de celle de Sven.
    — Que va devenir Bjorn ?
    — Il va avoir tout le monde à ses trousses d’ici peu. Allez. Il faut que je réfléchisse. Je ne suis pas si sûr que tout ça soit aussi simple qu’il y paraît.

46
    Bjorn avait passé la nuit dans une de ses nombreuses cachettes, simple abri de bois flotté, de mousses et d’algues, adossé à la dune. Il s’était endormi d’un coup, roulé dans son manteau, épuisé par la fatigue et le chagrin, rêvant de Muriel, et de batailles où il affrontait Ranulphe en habit de deuil.
    Au matin, après avoir erré sur la grève, Bjorn était retourné vers le lac de Pirou,

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