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Le peuple du vent

Le peuple du vent

Titel: Le peuple du vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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regardant la fin du chargement du sel sur le navire marchand. Il y avait si longtemps qu’il rêvait de ça ! Partir. S’en aller pour ailleurs.
    — Plein d’anguilles ici ? avait demandé un marin venu s’asseoir à ses côtés sur la berge.
    — Oui.
    — Tu connais bien le coin ?
    — Je suis pêcheur de mon métier.
    — Et la côte ?
    — J’connais que ça. C’est mon pays.
    L’homme le regarda d’un air soudain intéressé.
    — Tu la connais juste par ici ?
    — Oh, non, protesta Bjorn. J’suis allé plusieurs fois d’Avranches à Barfleur.
    Il se rappelait ces marches furieuses où il laissait le vent et le froid calmer sa douleur.
    — V’ià une bonne nouvelle ! s’exclama l’autre.
    — Pourquoi ?
    — On a perdu notre pilotin.
    — Pilotin ?
    — Oui, un gars de chez vous qui connaissait les grèves et les récifs, mais l’a rien trouvé de mieux que de se faire fracasser le crâne à la Sainte-Croix. L’avait trop bu, l’a choisi de faire sa cour à une drôlesse qu’était pas libre et son mari lui a expliqué. Trop fort. Il est mort assommé comme un boeuf par la cognée. Du coup, on est coincés ici. Alors, si tu veux du travail, tu ferais bien d’aller voir notre capitaine.
    — Pour aller jusqu’à où ?
    — D’abord, on doit remonter jusqu’à Barfleur.
    — Ça, je connais.
    — Ensuite, faudra retourner vers Avranches et le Mont au péril de la mer. Puis, si t’es bon, on sait jamais, peut-être qu’y te gardera. Il a le sang chaud, mais c’est pas un mauvais, notre capitaine.
    Bjorn n’hésita plus et se leva :
    — Il est où ?
    — Oh, tu peux pas te tromper, fit le marin en lui désignant une silhouette qui gesticulait à la proue, c’est celui qui gueule à l’avant ! Bonne chance !

47
    Dès son retour au château, après avoir appris la mort de Ranulphe, Serlon avait envoyé des patrouilles chercher Bjorn. En vain, le pêcheur restait introuvable.
    — Je ne peux tout de même pas laisser la mort de mon beau-frère impunie ! tempêtait Serlon en faisant les cent pas dans la salle des plaids.
    Sigrid entrait à ce moment-là.
    — Qu’est-ce que tu veux, toi ?
    — Prendre vos ordres, mon père.
    — Ah ! Bien. Tu as prévenu Mauger et Clotilde de la mort de leur père ?
    — Impossible de trouver mon cousin, quant à la petite, on vient de me la ramener.
    — Comment cela : impossible de le trouver ? Tu as questionné le guet ?
    — Oui.
    — Et d’où venait la gamine ?
    — Elle était partie avec les lavandières au lac. J’ai envoyé des gens à sa recherche, ils l’ont trouvée près des mielles. Elle m’a avoué qu’elle cherchait après son frère.
    — Et il est où celui-là ?
    — Son lit n’était pas défait. À mon avis, il n’a pas passé la nuit au château.
    Serlon frappa la table d’un violent coup de poing.
    — Par Dieu ! On ne te demande pas ton avis !
    Sigrid pâlit et se tut.
    — On assassine ma soeur, on transperce de flèches mon beau-frère, on tue mon faiseur de miel, et maintenant, je perds mon neveu. Où sont mes hôtes ?
    — Toujours à la chapelle avec frère Baptiste.
    — Bon. Et l’autre, le moine blanc ?
    — Avec eux, mon père.
    — Fais seller mon cheval.
    — Vous sortez ?
    — Oui, je sors, il faut peut-être que je te rende compte de mes faits et gestes ? Il est temps que tu te maries, ma fille ! Cela te calmera le sang, tu auras une maison à mener. Ce vieux Contrières ne demanderait pas mieux. Une jeunesse, vigoureuse comme toi ! En buvant chaque jour du sang de boeuf, il arrivera peut-être à te faire des enfants !
    Et Serlon, tout en la congédiant, partit d’un rire salace.

48
    La mi-nuit avait sonné depuis longtemps. L’aumônier, après avoir relu un passage des Saintes Écritures, jeta un dernier regard sur l’autel et regagna sa cellule d’un pas lourd. Depuis la mort de Muriel, un terrible sentiment de culpabilité le rongeait. Si seulement il avait cru la jeune femme, si seulement il avait parlé...
    Sur ordre de Serlon, les cadavres de Ranulphe et de Sven avaient été menés à l’église de Pirou. Un office avait été célébré à la hâte puis on avait inhumé Sven dans la fosse commune et le sire de l’Épine dans une tombe non loin du mur d’enceinte.
    Baptiste repensa avec tristesse à l’homme aux abeilles. Il était de ces gens discrets qu’on aime sans s’en rendre compte et qui manquent plus que ceux qui

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