Le retour de la mariée
extraordinaire. D’un geste preste, elle se saisit du carré de soie qu’elle portait, le roula en boule, et s’agenouilla pour l’enfoncer tout entier dans la bouche du malheureux bandit. Quand elle se redressa, la rougeur de ses joues ajoutait à son charme.
— Il faut que je fasse le travail toute seule ? lança-t-elle agressivement.
Au lieu de s’en formaliser, Logan sourit à ce reproche, qui l’amusait. Quelle femme ! Il ouvrit la porte, tira le corps recroquevillé à l’intérieur du bureau, fit tomber un épais rideau pour l’y envelopper, et ficela l’ensemble en un temps record.
Une adjointe aussi efficace méritait le respect. Il pouvait la consulter sans déchoir.
— Vous avez une idée, pour la suite ?
— C’est vous qui me le demandez ? A moi qui n’ai pas votre expérience ?
— Vous me connaissez donc ? fit-il, tout naturellement flatté.
— Oh oui ! répondit-elle avec conviction.
— Nous sommes-nous déjà rencontrés ?
On aurait pu croire qu’il venait de la frapper au creux de l’estomac. La bouche ouverte, les yeux écarquillés, elle semblait prête à vider sur lui le chargeur du pistolet qu’elle tenait encore. Mais après quelques secondes, elle se redressa, carra les épaules, et ramena sur son joli visage une apparence de sérénité.
— Allons délivrer les autres, dit-elle calmement.
— Bonne idée, mademoiselle.
— Mademoiselle , répéta-t-elle à voix basse, en grondant presque.
Sans doute n’avait-elle pas l’habitude d’être appelée ainsi.
Enfin Lucky Logan voyait la chance lui sourire. A condition de bien jouer son jeu, il allait faire l’économie d’une excursion au Terminus. Il savait se montrer charmeur quand il le fallait, et cette superbe créature lui avait fait la démonstration de ses talents dans le maniement des ceintures de pantalon. Il lui fit un clin d’œil.
— Quand on en aura fini avec les autres, on pourrait aller déjeuner ensemble, vous ne pensez pas ?
Une série d’émotions déconcertantes bouleversa les traitsde la belle. L’indignation, la surprise, la révolte, et pour finir une fureur noire.
— Non merci ! lança-t-elle avec hargne.
Son regard violet était celui d’un fauve prêt à mordre. Le sourire de Logan s’effaça. Elle ne voulait pas de lui. Il se le tiendrait pour dit. Mais quelle erreur avait-il commise ?
Qu’importe ! Il finirait bien par le découvrir. Aucun mystère ne lui résistait bien longtemps.
En attendant de résoudre celui-ci, il s’approcha du bureau directorial, vérifia la solidité et la masse de la canne à pommeau de métal que Bob utilisait quelquefois et décrocha le téléphone pour mettre son ami le shérif Prescott au courant des événements. Les policiers ne pouvaient donner l’assaut, puisque la porte de la banque était fermée, mais ils interviendraient dès l’ouverture.
La femme ne le quittait pas des yeux, son médaillon dans une main, le pistolet du bandit dans l’autre.
— Vous savez vous en servir ? lui demanda-t-il en désignant l’arme.
— Je ne suis pas maladroite, dit-elle modestement.
— Vous avez déjà tué un homme ?
— Seulement dans mes rêves, Logan Grey, seulement dans mes rêves.
En prononçant ces mots, l’inconnue lui adressa un sourire si cruel qu’il sentit les poils de sa nuque se hérisser.
— Mais en cas de nécessité, je n’hésiterais pas à abattre l’un de ces bandits, poursuivit-elle.
Aucun doute à ce sujet !
— C’est bien, mais j’espère que nous n’en viendrons pas à ces extrémités. Vous disposez d’une autre arme, qui peut faire tout autant d’effet.
— Une autre arme ? Laquelle ?
— Votre voix. A mon signal, il faudra crier de toutes vos forces, sans arrêt, jusqu’à ce que je vous fasse signe d’arrêter. Il y en a au moins un qui viendra aux nouvelles.
Elle acquiesça d’un hochement de tête. La canne à lamain, Logan alla se poster au tournant du couloir pour jeter un regard furtif dans le hall. L’Agité s’appuyait au comptoir tandis que Nezpointu tenait en respect les otages, depuis la porte d’entrée.
— Vous êtes prête, euh… ? demanda Logan. Comment vous appelez-vous, au fait ?
— Je suis prête, répondit-elle simplement.
— Allez-y !
Elle prit une profonde inspiration et se mit à hurler. Si fort que Logan ne pouvait plus distinguer le bruit des pas de leurs agresseurs. La canne levée à la manière d’une batte de
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