Le retour de la mariée
base-ball, il attendit donc, prêt à frapper. Lorsqu’il aperçut les bottes du bandit venu prendre des nouvelles, il abattit le pommeau de métal de toutes ses forces. Nezpointu s’écroula. Un coup de feu retentit dans le hall. Le plus jeune de la bande s’affolait. Par précaution, Logan ramassa l’arme que l’autre avait lâchée. Lorsqu’il se releva, la femme aux beaux yeux le bouscula avant de se précipiter dans le hall en hurlant plus fort encore. Ce n’était plus un cri d’alarme ou de peur, mais un cri de guerre.
En pénétrant à sa suite dans le hall, il la vit se précipiter sur l’Agité, au moment même où le jeune bandit, hurlant lui aussi, tirait. La balle manqua heureusement son but, ricocha sur un poteau de fonte et se logea dans le plafond.
L’Agité passa brièvement du cri de menace aux lamentations, puis se tut. Agenouillée sur lui, la furie le tenait par les deux oreilles et lui frappait le visage contre les dalles du sol. Il saignait du nez. Elle ne se releva qu’après s’être assurée qu’il ne bougeait plus, en chassant la poussière de sa robe.
Fascinante. Elle était fascinante.
Logan s’avança vers elle non pour l’aider, car elle n’avait pas besoin d’aide, mais pour la féliciter. Mais il n’en eut pas le temps. Le caissier avait ouvert la porte et, déjà, Prescott surgissait, à la tête d’une dizaine d’adjoints.
— Tout va bien, Lucky ? Qu’est-ce qui se passe ?
Logan lui fit un compte rendu rapide des événements, en insistant sur le rôle de l’étonnante inconnue.
— Je n’ai jamais rencontré une femme comme elle, dit-il au shérif qui, dans le bureau directorial, passait les menottes à l’Edenté fort déconfit. Extraordinaire, vraiment.
— Elle s’appelle comment ?
— Je n’en sais rien. Dans le feu de l’action, elle ne m’a pas donné son nom. Je vais le lui demander tout de suite.
Mais quand ils revinrent dans le hall, les otages étaient partis, et la belle avec eux. Logan sortit sur le trottoir pour examiner la rue… en vain. Aucune walkyrie en robe de voyage et aux yeux violets n’était en vue. Elle avait disparu.
En emportant avec elle le médaillon d’or incrusté de rubis auquel il tenait tant.
Celui qu’on appelait « l’homme le plus chanceux du Texas » haussa les épaules. La guigne le poursuivait.
Chapitre 2
Caroline remercia poliment l’hôtesse. Elle avait demandé à être installée au fond de la salle luxueuse, à l’abri d’un rideau de plantes vertes. Assise sur une banquette capitonnée de velours, elle se sentait un peu nerveuse. Après l’épisode du hold-up à la banque, elle ne souhaitait pas revoir Logan Grey avant de s’être préparée à subir l’épreuve qui allait sceller son destin. En choisissant de recevoir son invitée dans l’établissement le plus élégant de la ville, elle évitait au moins le risque de croiser ce rustre.
— Mme Wilhelmina Peters doit me rejoindre, dit-elle à la serveuse qui s’approchait. Vous la connaissez ?
— A Fort Worth, tout le monde la connaît, répondit la jeune fille, que la question semblait amuser, mais au Jardin des Délices, elle est carrément célèbre.
— Pourquoi ?
— Vous le verrez, madame. Je vous souhaite un agréable après-midi.
Caroline s’apprêtait à vivre un moment très particulier. Elle n’avait jamais rencontré la célèbre Wilhelmina Peters, mais elle était journaliste comme elle, dans un Etat où les hommes exerçaient dans la presse, comme dans bien d’autres domaines, un quasi-monopole. Le Standard d’Artesia ne jouissait pas du même prestige que le Daily Democrat de Fort Worth, mais il était assez connu pour que la reine locale du ragot accepte de rencontrer, ne fût-ce que par curiosité, sa principale collaboratrice.
Savoir, c’est pouvoir, disent les stratèges. En recueillant lemaximum d’informations sur Logan Grey, elle aurait barre sur le scélérat.
— Souhaitez-vous prendre quelque chose pour patienter ? demanda la serveuse, qui revenait, son plateau à la main. Mme Peters aime bien se faire attendre.
La visite d’une inconnue l’intriguait sans doute. Caroline aurait aimé commander un whisky, mais elle estima raisonnable de s’en tenir au thé.
Quelle journée, et quelle aventure ! L’année si tranquillement commencée tournait à la catastrophe. Loin de chez elle en ce début d’avril, elle vivait dans la peur, prête à tout faire pour préserver du
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