Le Roi de fer
l’histoire des Templiers, jusqu’à la procédure même qui
fut employée pour parvenir à leur suppression. Le rouleau de parchemin qui
contient la transcription des interrogatoires de 1307 mesure à lui seul
22 m 20.
Depuis ce prodigieux procès, les
controverses n’ont jamais cessé ; certains historiens ont pris parti
contre les accusés, d’autres contre Philippe le Bel. Il n’est pas douteux que
les accusations portées contre les Templiers étaient, en grande partie,
exagérées ou mensongères ; mais il n’est pas douteux non plus qu’il y ait
eu chez eux d’assez profondes déviations dogmatiques. Leurs longs séjours en
Orient les avaient mis en contact avec certains rites perpétués de la religion
chrétienne primitive, avec la religion islamique qu’ils combattaient, voire
avec les traditions ésotériques de l’Égypte ancienne. C’est à propos de leurs
cérémonies initiatiques que se forma, par une confusion très habituelle à
l’Inquisition médiévale, l’accusation d’adoration d’idoles, de pratiques
démoniaques et de sorcellerie.
L’affaire des Templiers nous
intéresserait moins si elle n’avait des prolongements jusque dans l’histoire du
monde moderne. Il est connu que l’Ordre du Temple, aussitôt après sa
destruction officielle, se reconstitua sous la forme d’une société secrète
internationale, et l’on a les noms de grands-maîtres occultes jusqu’au XVIII ème siècle.
Les Templiers sont à l’origine du
Compagnonnage, institution qui existe encore aujourd’hui. Ils avaient besoin,
dans leurs commanderies lointaines, d’ouvriers chrétiens. Ils les organisèrent
et leur donnèrent une règle nommée « devoir ». Ces ouvriers, qui ne
portaient pas l’épée, étaient vêtus de blanc ; ils firent les croisades et
bâtirent au Moyen-Orient ces formidables citadelles, construites selon ce qu’on
appelle en architecture « l’appareil des croisés ». Ils acquirent
là-bas un certain nombre de méthodes de travail héritées de l’Antiquité et qui
leur servirent à édifier en Occident les églises gothiques. À Paris, ces
compagnons vivaient soit dans l’enceinte du Temple, soit dans le quartier
avoisinant, où ils jouissaient de « franchises », et qui demeura
pendant cinq cents ans le centre des ouvriers initiés.
Par le truchement des sociétés de
compagnons, l’Ordre du Temple se rattache aux origines de la franc-maçonnerie.
On retrouve en celle-ci les « épreuves » des cérémonies initiatiques
et jusqu’à des emblèmes très précis qui non seulement sont ceux des anciennes
compagnies d’ouvriers, mais, fait plus étonnant encore, figurent sur les murs
de certaines tombes d’architectes de l’Egypte pharaonique. Tout donne donc à
penser que ces rites, ces emblèmes, ces procédés de travail, furent rapportés
en Europe par les Templiers.
[4] La datation utilisée au Moyen Âge n’était pas la même que celle
employée de nos jours, et en outre elle changeait d’un pays à l’autre.
L’année officielle commençait, en
Allemagne, en Suisse, en Espagne et au Portugal, le jour de Noël ; à
Venise, le 1 er mars ; en Angleterre, le 25 mars ; à Rome,
tantôt le 25 janvier et tantôt le 25 mars ; en Russie, à l’équinoxe de
printemps.
En France, le début de l’année
légale était le jour de Pâques. C’est ce qu’on appelle le « style de
Pâques », ou « style français », ou « ancien style ».
Cette singulière coutume de prendre une fête mobile comme point de départ de
datation amenait à avoir des années qui variaient entre trois cent trente et
quatre cents jours. Certaines années avaient deux printemps, l’un au début,
l’autre à la fin.
Cet ancien style est la source d’une
infinité de confusions, et il en surgit de grandes difficultés dans
l’établissement d’une date exacte. Ainsi selon l’ancien style, la fin du procès
des Templiers se plaçait en 1313, puisque Pâques, l’année 1314, tomba le 7
avril.
C’est seulement en décembre 1564,
sous le règne de Charles IX, avant-dernier roi de la dynastie Valois, que
le début de l’année légale fut fixé au premier janvier.
La Russie n’adopta le « nouveau
style » qu’en 1725, l’Angleterre en 1752, et Venise, la dernière, à la
conquête de Bonaparte.
Les dates données dans ce récit sont
naturellement accordées sur le nouveau style.
[5] L’hôtel des Templiers, ses annexes, ses « cultures »,
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