Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
Vom Netzwerk:
des manœuvres et je n’ai donc pas pu te suivre.
    — Est-ce ton point de vue que
tu viens d’exposer ?
    — En toute sincérité, oui.
Memnon sait qu’il serait dangereux de t’affronter en rase campagne car il ne
dispose pas de troupes suffisamment nombreuses pour contrecarrer ta
phalange ; mais il sait probablement que tu ne possèdes pas de grandes
réserves.
    — Et comment le
saurait-il ?
    — Le système d’informations que
les Perses ont mis au point est extraordinaire : ils ont des espions
partout, et ils les paient fort bien. En outre, ils peuvent compter sur un
grand nombre d’amis et de sympathisants macédoniens. Memnon n’aura qu’à
temporiser avant de déclencher des actions de diversion dans ton dos, aussi
bien sur terre que sur mer, te causant des difficultés à défaut de te piéger.
    — Le crois-tu vraiment ?
    — Je veux seulement te
prévenir, sire. L’expédition à laquelle tu te prépares n’a rien à voir avec les
précédentes. »
    Le bateau prenait le cap vers le
large, affrontant les ondes frangées d’écume. Le chef de nage battait le rythme
et les rameurs courbaient leur échine luisante sous le soleil, plongeant et
soulevant leurs longues rames.
    Alexandre semblait absorbé par le
roulement pressant des tambours et par le cri des rameurs qui tentaient de
garder le rythme.
    « On dirait que tout le monde a
peur de ce Memnon, observa-t-il soudain.
    — Il ne s’agit pas de peur,
sire, précisa Néarque. Nous nous contentons de tracer les grandes lignes d’un
scénario possible, ou plutôt probable selon moi.
    — Tu as raison, amiral :
nous sommes plus exposés et plus faibles sur mer, mais personne ne peut nous
battre sur terre.
    — Pour l’instant, dit Eumène.
    — Pour l’instant, admit
Alexandre.
    — Et donc ? interrogea
encore Eumène.
    — Même la flotte la plus
puissante du monde a besoin de ports, n’est-ce pas, amiral ? demanda
Alexandre en se tournant vers Néarque.
    — Cela ne fait aucun doute,
mais…
    — Il faudrait que tu occupes
tous les abords des Détroits jusqu’au delta du Nil, pour lui couper la route,
suggéra Eumène.
    — En effet », dit
Alexandre sans broncher.
    Tard dans la nuit, la veille du
départ, Alexandre regagna Aigai où il s’était rendu pour accomplir un sacrifice
sur la tombe de Philippe. Il monta aussitôt dans les appartements de sa mère.
Elle veillait, solitaire, brodant un manteau à la lumière des lanternes. Quand
il frappa à sa porte, elle vint à sa rencontre et l’embrassa.
    « Je n’aurais jamais cru que ce
moment viendrait, dit-elle en essayant de dissimuler son émotion.
    — Ce n’est pas la première fois
que tu me vois partir, maman.
    — Mais cette fois, c’est
différent, je le sens. J’ai fait des rêves étranges, difficiles à interpréter.
    — Je l’imagine. Aristote dit
que les rêves sont engendrés par notre esprit, c’est pourquoi tu peux chercher
la réponse au fond de toi.
    — Je l’ai cherchée, mais depuis
un certain temps, l’introspection me procure un sentiment de vertige, presque
de peur.
    — Et tu en connais la raison.
    — Que veux-tu dire par
là ?
    — Rien. Tu as beau être ma
mère, tu demeures pour moi l’être le plus mystérieux que j’aie jamais
rencontré.
    — Je ne suis qu’une femme
malheureuse. Et voilà que tu pars pour une longue guerre. Mais il était écrit
que ces choses-là se produiraient, que tu accomplirais des exploits
extraordinaires, surhumains.
    — Qu’est-ce que cela signifie ? »
    Olympias se tourna vers la fenêtre,
comme si elle cherchait des images et des souvenirs parmi les étoiles, ou sur
la face de la lune. « Il y a longtemps, avant que tu naisses, j’ai rêvé
qu’un dieu m’avait effleurée tandis que je dormais dans ma chambre nuptiale aux
côtés de ton père. Et un jour, à Dodone, pendant ma grossesse, le vent qui
s’insinuait parmi les branches des chênes sacrés a murmuré ton nom à mon
oreille : Alexandros.
    « Certains hommes, engendrés
par des femmes mortelles, connaissent un destin hors du commun, et tu es de
ceux-là, mon fils, j’en suis certaine. J’ai toujours considéré le fait d’être
ta mère comme un privilège, ce qui n’implique pas que le moment de la
séparation en soit moins amer.
    — Il l’est aussi pour moi,
maman. J’ai perdu mon père il y a peu de temps, t’en souviens-tu ? Et un
témoin a dit qu’il t’avait vue glisser une couronne de fleurs

Weitere Kostenlose Bücher