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Le secret des enfants rouges

Le secret des enfants rouges

Titel: Le secret des enfants rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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affection, je vous envoie plusieurs objets qu’il désirait vous léguer en mémoire de vos explorations dans le Sud-Est asiatique. Il tenait particulièrement à vous remettre une coupe qui, selon lui, recèle un mystérieux envoûtement. Vous connaissez son sens de l’humour et le scepticisme qu’il affichait envers les croyances animistes. Ne voyez par conséquent dans ce don aucune intention désobligeante. En dépit de la laideur de ce calice, mon cher frère était convaincu qu’il vous porterait chance tout au long de votre vie. C’est pleinement persuadée de cette vérité que je reste votre amie dévouée.
    Lady Fanny Hope Pebble
     
    — Quel dommage que vous ne m’ayez jamais montré cette coupe, j’aurais tant voulu la voir !
    — Ma chère enfant, ayant eu vent de votre habileté à sonder mes cachettes, j’ai pris soin de verrouiller mon coffre, dit Kenji en adressant un clin d’œil à Victor.
    — Sous-entendez-vous que je suis curieuse ?
    — Aussi sourd soit-il, le vieux renard a l’ouïe fine lorsque la belette rôde près de son terrier. Hélas, j’ai eu beau ajouter un cadenas, la ténacité de notre cambrioleur a déjoué mes précautions. L’animal a eu le nez creux, la coupe était emmaillotée dans un furoshiki.
    — Un furoshiki ? répéta Victor.
    — Une de ces étoffes de soie qui enveloppent les cadeaux, selon la coutume japonaise. Celui dont je m’étais servi me venait de l’oncle Hanunori Watanabe. J’en possède heureusement un second identique.
    — Décoré de cigognes aux ailes déployées, il est superbe ! Je l’ai admiré quand…
    Iris devint pivoine, consciente de s’être trahie.
    — Quand… ? demanda doucement son père. Comme elle demeurait muette, il poursuivit d’un ton égal :
    — Quand vous avez soulevé les lattes de mon sommier… Pour y débusquer la poussière, je suppose. N’en parlons plus.
    — Revenons-en à cette coupe. Pouvez-vous la décrire ? Je prierai Tasha d’en exécuter un croquis, proposa Victor.
    — C’est une singularité. La calotte crânienne d’un singe – sans doute un gibbon –, fixée sur un petit trépied de métal enjolivé de trois brillants et d’un minuscule faciès de chat aux prunelles figurées par deux agates jaspées.
    — Il y a là un paradoxe, remarqua Victor. On vous ravit deux livres et une coupe de bazar, on néglige d’emporter vos estampes, on dédaigne la librairie.
    — Un vrai casse-tête chinois, dit Kenji, pince-sans-rire. Je pencherais plutôt pour les premières armes d’un apprenti monte-en-l’air. Venez Iris, nous allons mettre de l’ordre, demain nous aviserons.
     
    Profondément absorbé, Joseph s’échinait à traduire un article du Times , et cet exercice ne se faisait pas sans douleur. Une concentration farouche plissait son front, car les mots refusaient de se plier à la force de son intelligence.
    — Eh bien, Joseph, vous êtes encore là ?
    Joseph releva la tête. Victor le considérait avec une expression moqueuse.
    — C’est un cadeau de Mlle Iris. Apprendre par tous les moyens fait partie des leçons d’anglais qu’elle me…
    Il se mordit la langue, pour un peu il vendait la mèche. Un sourire niais illumina son visage.
    — Patron, en français, ça veut dire quoi pebble ?
    — Votre accent est épouvantable, épelez.
    — P, e, deux b, 1, e.
    — Pierre, galet, caillou. Allez donc accrocher les contrevents, nous partons.
    — Et murder, patron ?
    — Meurtre, assassinat, au choix. Bon, ça suffit, vous élaborerez vos intrigues criminelles en dehors des heures de travail.
    — J’n’élabore pas, patron, je traduis.
    — Vous avez raison, Joseph, étudiez, armez-vous de persévérance, peut-être les cours de Mlle Iris porteront-ils leurs fruits.
    Radieux d’avoir obtenu la complicité tacite du patron, Joseph replia son journal, mais sa félicité se mua en inquiétude lorsque Victor lui lança d’un ton sévère avant de franchir la porte :
    — Un conseil en passant : ne brûlez pas les étapes.
    L’atelier était vide. Victor regarda le chevalet, puis ses yeux se posèrent sur la table. Elle avait laissé un mot.
    Chéri, je rentrerai tard : un coup de feu chez l’éditeur. Ne m’attends pas. Euphrosine a préparé un excellent ragoût, il n’y a qu’à réchauffer. Je t’aime, je t’embrasse partout. Tasha.
     Tes photos d’enfants sont splendides.
    Par la verrière, il aperçut le ciel gris ardoise. Il

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